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NYCTALOPES
CHAPITRE 16

Une main émerge, à côté de moi

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Une main émerge, à côté de moi. Un bras porte ses doigts jusqu'au tableau de bord, là où les boutons de la radio s'entassent. Nick se tient debout dans la voiture, pour atteindre le signe 'ON/OFF' de la musique. Lorsqu'il y parvient, un petit écran s'allume, et les haut-parleurs se mettent à cracher. David ne dit rien, les yeux sur la route, tandis que je suis des yeux les petits gestes de Nick. Il s'accroche au haut de mon siège, à l'aide de son autre main. Sous les grésillements incessants de la radio, je l'entends lentement respirer, alors qu'il s'acharne à trouver une fréquence où il y aurait de la musique.

— Ça sert à rien, tu sais ? Depuis cinq mois, il n'y a plus une seule radio qui diffuse quoi que ce soit.

Il semble ignorer ma remarque, en tournant encore une fois la roue, pour faire danser les chiffres à l'écran. Quand le silence radio le persuade qu'il n'y a rien à faire, il lâche un :

— Eh bah merde, avant d'appuyer sur le même bouton.

Le silence revient, plus lourd qu'autre chose.

Dehors, le soleil décline, et on aperçoit Venus. Les nuages se font peu, en cette fin de journée, et si on a de la chance, on apercevra peut-être les étoiles. Je cogne contre la petite porte devant moi, et curieuse, je décide de l'ouvrir. Des CD s'entrechoquent à l'intérieur, et un sourire me barre le visage.

— Nick ? j'appelle, et il se redresse, pour voir ce que j'ai trouvé.

Sans attendre, je lui passe la pile de pochettes que j'ai trouvé. Il doit y en avoir moins de dix, mais un sourire illumine son visage alors qu'il s'écrit :

— Génial !

David ne peut s'empêcher de jeter un coup d'œil vers Nick, pour apercevoir lui aussi les trouvailles que je viens de faire. Pour nous, ces débris de la même taille qu'une poche de jean représentent de l'or.

— J'ai pas vu de CD depuis l'apocalypse, putain ! Lâche-t-il entre ses dents, et je glousse à mon tour.

— Tiens, "Please, Please Me", the Beatles, tu attrapes ? lance Nick à mon attention en envoyant la fine boite en plastique.

Il replonge à travers sa découverte des albums de musiques, tandis que je m'acharne à trouver le bouton qui ouvrira le lecteur de la voiture. Ça ne dure pas longtemps, et quand je trouve le petit signe 'éjecter' sur le tableau de bord, je m'empresse de le presser pour y insérer le CD. Quelques secondes après que le disque soit avalé par la machine, des notes de batterie, de piano et de guitare se mettent à sortir des haut-parleurs des véhicules. Et dans ce nouveau monde qui ne porte plus que les paroles arrachés des bouffe-merde, nous faisons à nouveaux chanter les vieux artistes.

■■■

Après deux albums et six autres chansons, Nick s'est endormi, bercé par un son passé. Pas moi. La tête contre la fenêtre, j'observe le ciel. Il est complètement dégagé, et on aperçoit même cette traînée de poussière opaque, qui barre les cieux en deux. La galaxie, infinie, s'étant jusqu'à notre horizon. Mon front est posé sur la vitre. Elle est glacée, frigorifiée par les vents de nuit qui battent contre elle, au dehors. Je ne compte pas les virages que l'on prend, où les traînées de goudron que l'on enchaîne, hypnotisée par la voûte céleste. Ce paysage sombre, pourtant si simple, est à couper le souffle. Est-ce qu'il y a des gens, là-haut ? Des astronautes perdus dans leurs stations spatiales, qui ont regardé l'humanité mourir sans rien pouvoir faire ?

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