Magical... Boy ? - Terraink

Gratitude

"David... ?"

Thomas en resta interdit, ses jambes pourtant minces lui semblaient soudainement trop lourdes pour lui et ses yeux essayaient de suivre tant bien que mal tout ce qui se déroulait devant lui.

La créature devant lui était immense et arrivait presque au second étage d'un des petits immeubles les entourant, gluante, dégoulinante, se rapprochant d'un monstre qu'il avait vu dans un des rares film des studios Ghibli qu'il avait regardé. Contrairement à d'autres, elle semblait envahie par des espèces de vers qui rampaient sous sa peau...
Si tant était que cette chose ait un épiderme.

Mais ce qui l'interpellait n'était pas ce tas de chair putride.

Plutôt cet homme qui sautait de rebord de fenêtre à rebord de fenêtre, évitant les bouts que la chose arrivait à détacher de son corps pour le viser.

Cette silhouette, ces cheveux, cette façon d'être si agile...
Même si Thomas n'était pas très doué en reconnaissance visuelle, là c'était apparu comme une évidence à ses yeux.

"David !" L'appela-t-il, sa voix était partie dans les aigus.

L'interpellé tourna aussitôt la tête vers lui, confirmant ses craintes.
Apparemment, même s'il portait un masque et une tenue presque aussi ridicule que la sienne, c'était bien David.

Menant aussitôt une main à son oreille pour se transformer à son tour, Thomas n'osa ni n'eut le temps de se poser la moindre question qu'il se retrouvait mêlé au combat le plus aisé qu'il n'ait eu depuis un temps.

C'était comme si ses coups étaient bien plus puissants lorsqu'il combattait avec un autre guerrier de l'amour.
Même s'il était toujours médusé du fait que David soit comme lui et qu'il n'ait jamais rien remarqué, il se souvint soudainement des nombreuses fois où son ami avait soudainement quitté les salles de cours et les amphis pour une raison inconnue.

Mais Thomas ne s'était jamais questionné sur ces absences.
Après tout, elles ne le regardaient pas.

Ce fut seulement après quelques coups donnés grâce à son bâton magique et quelques balles de lumières sortant de l'arme de David que la créature laissa place à un homme d'une quarantaine d'années, déjà bien amoché, qui s'évanouit dès que les vers s'échappèrent on ne sait comment de son corps.

Le bouclé se précipita à ses côtés dans l'espoir de pouvoir l'apaiser, mais David fut plus rapide et à peine eut-il touché le corps qu'une brève lumière l'inonda, les coutures bleues de son costume devenant blanches un quart de seconde avant qu'il se relève, faisant face à un Thomas légèrement dépité.

Il n'y avait pas réellement porté d'attention durant leur combat, mais le costume de son ami était tout de même beaucoup moins ridicule que le sien.
La seule chose sur laquelle l'attention méritait d'être portée était cet énorme ruban bleu clair noué autour de son cou (mais Thomas savait qu'il avait le même en violet autour du sien) et une boucle d'oreille légèrement plus grosse que la sienne presque cachée par ses cheveux. Il ne portait pas de short ni de chaussettes hautes, mais un bermuda et des espèces de baskets à cœur, le tout coloré de bleu clair. Même son masque était relativement beau, un loup d'un blanc éclatant sans plus d'artifices.

Son arme était un pistolet qu'on aurait pu croire en plastique bleu à paillettes, avec un cœur en guise de viseur.
Contrairement au bouclé qui ne pouvait utiliser son bâton qu'au corps à corps, David pouvait garder ses distances avec les créatures sans prendre le risque de la manquer.

Ils restèrent quelques instants à se dévisager, avant que David n'enlève son masque pour avoir une vue plus dégagée.

"T'étais pas chez ta grand-mère ?"

Suivant le mouvement, le plus petit enleva le sien avec un sourire, content d'avoir enfin quelqu'un avec lui le soutenant dans ces combats.

"Si j'avais su que... J'aurai jamais sorti une excuse aussi minable."

David ne sembla se rendre compte que maintenant que leurs costumes étaient toujours sur eux.
Il prit le bras de Thomas et se mit à courir jusqu'à l'autre bout de la rue, pour que personne ne les voit à côté d'un cadavre.

Ce fut une fois dans un garage à demi fermé et vide au milieu d'une rue déserte qu'ils redevinrent comme avant, de simples étudiants en plein fou rire...

... Sous le regard rosâtre et perplexe d'un grand homme masqué penché sur le toit d'un immeuble.

...

"Putain ! Si j'avais su !"

Thomas et David étaient revenus à la fac pour manger quelque chose, vu qu'étrangement tous les restaurants et cafés sur leur route étaient fermés.

Assis tous les deux au pied d'un mur dans le bâtiment délabré qui leur servait d'amphithéâtre, ils regardaient les autres étudiants passer devant eux, dans les mains de l'un un café serré et dans les mains de l'autre un chocolat bien trop sucré.

Le bouclé avait son sac  dos derrière lui pour ne pas que le mur soit trop inconfortable, heureusement que Mouki avait fait sa chiffe molle et était parti comme d'habitude.

"Je pensais que j'étais le seul...
- Moi aussi ! Je n'ai jamais croisé personne avant... !"

David ricana en menant son chocolat à ses lèvres, toujours un grand sourire collé à ces dernières.

"Tu foutais quoi ? Pourquoi t'es pas venu m'aider avant ?
- Bah disons que... J'ai un détecteur de corrompus qui... Il déconne un peu."

Thomas ne fut pas étonné d'entendre son ami glousser à nouveau.
Il n'était pas déçu que David soit avec lui, mais il avait tout de même du mal à se faire à l'idée que, comme lui, il risquait sa vie à longueur de temps.

Mais s'il pouvait ne pas affronter ça tout seul, il s'accrocherait à cette présence à ces côtés comme à une bouée.

Damien ne pouvait pas savoir tout ça.
David serait son soutien pour les combats, et Damien son soutien tout court.

"Un détecteur de corrompus ? Moi c'est comme si j'avais un radar..." Lui expliqua David, les yeux perdus dans les volutes qui s'échappaient de son chocolat. "Il est très efficace... Même si j'ai failli le perdre plusieurs fois.
- Comment ça ?
- Quand tu ne combats pas pendant un moment... C'est comme si tes pouvoirs se désactivaient d'eux-même. J'ai refusé de me battre pendant un temps... Et quand j'ai du reprendre parce qu'Eva était en danger... J'ai failli mourir et elle aussi."

Thomas resta muet, comme pendu à ses lèvres et buvant ses paroles plus vite que son café.

"Du coup j'ai du --
- Tu l'as apaisée ?"

David eut un sourire triste, ce qui étonna son ami.
Il était passé du rire aux larmes en seulement quelques secondes.

"N-Non... J'ai pu juste la sauver... Mais elle était gravement blessée... Et elle est toujours en rééducation à l'hôpital.
- C'est en bonne voie alors !
- Ça fait presque trois ans qu'elle y est."

Thomas se mordit la lèvre, il se sentait tellement idiot d'un coup.
Il posa sa main sur l'épaule de David, qui eut un nouveau sourire qui se voulait rassurant.

"Du coup je suis content... De plus supporter ça tout seul."

Le bouclé sentit son cœur s'alléger.

"Oui... Moi aussi."