5) Ça va ?

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- Ça va ?

Aujourd'hui on m'a plusieurs fois demander si ça allait, à quoi je pensais pour paraître aussi fermée, ce que j'éprouvais réellement au plus profond de moi. Mais comment dire que ça ne va pas, qu'on a besoin d'aide ? Comment avouer ses pensées les plus sombres ? Comment expliquer ce qu'on ressent, si on ne sait pas soi-même ?

- Qu'est-ce qui t'arrives ? Je te reconnais plus, t'es plus la même.

C'est vrai j'ai sûrement changé. Je n'arrive plus à penser et à vivre comme avant. Je ne suis plus la petite fille insouciante, gentille, qui accepte tout sans même chercher à comprendre. J'ai peut-être changé, en mal. Mais je ne suis plus le petit mouton qui suit le troupeau.

J'aimerais pouvoir te présenter mes excuses. Or je n'en vois pas l'utilité. Je ne vois pas ce à quoi je devrais me faire pardonner. J'ai simplement avancé sur un chemin différent des autres. Je ne dépend plus d'eux, ni de personne. J'avance en parfaite solitaire, je me méfie des autres. Je n'ai pas confiance, j'ai peur du mal qu'on peut me faire, et je ne veux plus me faire avoir.

Peu importe si on vient à me le reprocher. Leurs jugements ne me touchent plus. A vrai dire j'ai parfois l'impression que plus rien ne me touche. Je me sens totalement vide, comme un vulgaire objet qui ne fait qu'accomplir ses tâches. Je vis mais avec lassitude, avec peur, avec douleur.

Il arrive que je ressente cette douce sensation de chaleur au plus profond de moi. Il arrive que je me laisse aller, qu'un sourire vienne étirer mes lèvres. Il arrive que j'oublie, que je laisse échapper un rire. Il arrive que je me sente bien, avec cette joie qui flotte dans l'air, qui me rend unique et à l'aise.

Mais...

Tout ça ne dure jamais assez longtemps. Arrive toujours cet élément perturbateur. Il surgit de nulle part, me bousille de l'intérieur. Il s'empare de mes pensées, vient tout gâcher. Il se joue de moi, me ramène plus bas que Terre. Il me fait douter sur mes joies d'hier. Il me blesse, brise mon cœur et mes espérances, me donne envie d'abandonner.

Mais comme d'habitude, je ne montre rien. Et on ne voit rien. L'être humain ne cherche pas à voir plus loin que le bout de son nez. Tu te sens mal, mais tu le gardes pour toi ? T'en fais pas, personne ne te le fera remarquer. L'homme est tellement égoïste qu'il se focalise seulement sur son propre malheur, sur ce qu'il peut comprendre sans difficultés. Pourquoi chercher compliqué quand on peut faire simple ? Eh oui, ma pauvre tu es beaucoup trop compliquée pour eux ! Mais je m'y habitue...

L'humain est une pourriture incarnée. Il joue avec tes peurs, se moque de toi, mais ce n'est que pour rire, non ? Il ne sait pas voir quand il faut s'arrêter, la limite qu'il ne faut pas franchir... Il continue ses railleries, sans chercher à savoir si tu te sens bien, si tu es prêt à subir le reste. Bah oui ce n'est que pour rire après tout...

J'ai ce mal au ventre permanent, j'ai cette peur imminente. Peur de l'abandon. Peur du futur. Peur de la vie. Peur de tout. Je ne suis qu'une pauvre âme non loin du gouffre, un âme brisée qui ne demande qu'à être réparée, une âme quelques fois quasiment prête à s'envoler...

Je ne sais plus où donner de la tête. L'être humain est tellement hypocrite. Elles parlent dans son dos, je ne préfère même pas savoir ce qu'elles peuvent dire sur moi. A vrai dire je m'en fous pas mal, je n'ai pas vraiment besoin d'elles. Hypocrite à mon tour, je ne suis là que par dépit. Je ne sais plus ce que je dois faire, ce que je  veux, qui je suis. Je suis définitivement perdue.

Mais je souris le plus possible, je cache tout ça, je le garde pour moi...

- Ça va.

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