16) Je sais

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Je sais que je ne suis pas une fille facile à supporter, que je suis assez compliquée à comprendre, que je devrais pas réagir comme je le fais.

Je sais que tu prends sur toi à certains moments parce que tu ne veux pas envenimer la situation. Sincèrement, je ne sais pas comment tu fais. À ta place, je ne me supporterais tellement pas.

Je sais que mes sauts d'humeur t'inquiètent. Je n'arrive pas à passer au dessus de certaines choses, c'est mon caractère. Je sais, je suis pas agréable tous les jours.

Mais pardonne-moi...

J'essaie vraiment de passer outre, de régler mes problèmes, d'arranger mon cas. Mais tu sais, je finis par croire qu'il n'y a pas d'issues.

J'ai pas confiance en moi. Je supporte pas de me regarder dans le miroir. Je me sens tellement immonde. Regarde-moi bien, je suis sûre que tu me verras de cette façon un jour ou l'autre.

Tu as beau me dire que je suis belle. Sincèrement, j'aimerais y croire quelques instants. J'aimerais me dire que tu as raison. Mais je me regarde toujours de la même façon. Ça ne change pas.

Peut-être que tu as raison. Peut-être que je suis un minimum jolie. Peut-être que je suis trop exigeante en vers moi-même.

J'y pense quelques fois. Pourtant je ne sens pas à la hauteur. Et pas seulement physiquement...

J'ai beau tout faire pour vivre pleinement. Y a toujours ce truc qui vient tout foutre en l'air. Quand tu penses avoir réglé un problème, tu crois que surmonter les autres est possible.

Mais la chute est douloureuse. Mon corps pèse, tu sais. J'ai mal. Et même si je me crois invincible des fois, je n'ai aucun courage, je n'ai aucun mérite, je n'ai aucune force.

Et je me fais écrasée, comme un vulgaire insecte. Et la plaie ne fait que s'aggraver. Le couteau remue violement dans ma chaire, et la souffrance s'accentue un peu plus à chaque fois.

On me dit que je ne fais aucun effort, que je mérite pleinement ce qui arrive, que je finirais seule. Il trace mon destin. C'est ce qu'il lui est arrivé, et il me le fout en plein nez. Il s'acharne sur moi, et déchire le pansement que j'ai eu du mal à placer.

Crois-moi, j'ai essayé putain. J'ai tout fait pour. Mais y a un moment où je peux plus, où j'ai l'impression que mes efforts ne riment à rien, où j'ai l'impression que je fais chier les gens. J'essaie. J'essaie de leur parler quand je peux, mais ce que je récolte me rend sceptique...

Je ne sais plus qui est vraiment sincère.

Et je me sens atrocement seule. On me reproche bien des choses, dont le fait que je parte souvent, que je ne suis pas souvent à la maison. Je peux les comprendre. Je peux comprendre qu'ils voudraient que je sois plus avec eux. Je leur manque, n'est-ce pas? Ils me manquent aussi.

Mais tu vois y a un problème, un très gros problème.

Quand je reviens, je me sens bien. Et... J'espère que ça continue. Mais y a un truc qui va pas.

J'ai beau être de retour, essayer de parler, essayer qu'on me regarde un minimum. J'ai toujours l'impression d'être invisible, de ne pas exister. Tous les mots doux que je recevais quand je n'étais pas là ne sont plus que mirages.

Je suis là, à table, je les écoute. Je boie leurs paroles, j'essaie d'en placer une quand je peux. Pourtant on se fout pas mal de ce que je dis.

À trois, ils font une superbe famille. Ils parlent plutôt bien, et tu sais, je me sens juste de trop. J'ai l'impression que je n'ai pas ma place ici.

Dis-moi, je suis quoi ? Une plante verte ? Une boniche qui n'est importante que pour les tâches qu'ils ne veulent pas se coltiner eux-même ?

Je n'ai plus ma place. Je ne me sens pas chez moi. Je me sens sur un terrain inconnu.

Et quand on me demande ce que j'ai, je répond clairement. Mais la discussion n'est pas ce qui a de plus facile avec eux. Ils s'énervent aussitôt, et ne m'écoute plus. Alors j'abandonne aussi. Et je subis en silence, je fais la plante verte. Je n'existe pas, tu comprends ? Je suis rien, je suis pas celle qu'ils auraient voulu avoir.

Je sais. Je sais que je les déçois. Et ça me tue. J'en peux plus. Je me sens à la dérive. Je ne veux pas les perdre eux.

Ils sont ma famille, ma soi-disante famille. Tu sais, j'aimerais m'agiter devant eux, leur dire : "eh oh je suis là, j'existe". Mais je me tais, parce que demander de l'intention n'est clairement pas mon genre.

Pour ce qui te concerne, tu subis. Pardonne-moi mais je n'en peux plus. Je croyais que c'était réglé, que ça irait mieux. Mais mon ventre se serre à chaque fois. Et je me sens atrocement mal.

Je dis rien. Mais ça se voit sur mon visage. Je me cripse. Je me braque alors que je ne le veux pas. Je n'ai rien contre elle, qu'on se le dise. Au contraire.

Mais mon cœur ne le supporte pas. Amis. Ils sont amis. Je me le répète. Et au fond je le sais. Mais alors pourquoi mon corps réagit-il de cette façon ? Pourquoi fout-il tout en l'air et me fait-il douter ?

Je sais que c'est débile, complètement débile. Mais certains mots, certaines phrases ne me plaisent pas. Ce n'est rien. Faut que je passe outre.

Tu n'as rien à changer pour moi. Je vais accepter. C'est juste pas trop le moment. Je suis à bout. Je peux plus. Je sais plus où donner de la tête.

Je sais plus comment gérer tout ça. Je sais plus quoi faire. Je sais plus ce que je devrais ressentir. Je sais plus pourquoi tout a dégénéré.

Je sais plus grand chose. J'ai besoin de temps pour me faire à tout ça. J'ai besoin de temps, pour accepter qui je suis, qui nous sommes. J'ai besoin de temps pour trouver mes véritables alliés...

Je sais que le temps nous est compté. Mais comprends juste ma position. Comprends que je fais des efforts. Comprends que je suis fatiguée, que j'ai besoin de dormir, et de me réveiller ensuite en voyant le monde sous un autre angle.

Je sais que je t'aime. Et c'est parce que je t'aime que je suis ainsi. Je ne veux pas te perdre. J'ai peur que tu t'en vas ailleurs. J'ai peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas être celle que tu veux réellement.

Je vais y arriver. Je vais me battre pour passer les obstacles, les uns après les autres. Je vais affronter la vie en face, et arrêter de me lamenter dans mon coin.

Je sais que la vie est un combat qui est dur à mener. Mais il est appréciable. Car après l'obstacle, la récompense est présente. Et même si d'autres se montrent, je les surmonterai. Peu importe si je dois me blesser pour ça.

Je sais que je vais continuer de galérer. Mais peu importe. La vie est comme ça, elle n'est pas un terrain plat. Mais je sais que ça en vaut la peine.

Tu en vaux la peine.

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