Lorsque je rentre à l'appartement, Etta tourne en rond dans le salon et parle toute seule si je ne me trompe pas. Timmy, un masque sur la bouche, fait la poussière, le tout en remuant des fesses au rythme de la musique. Atchoum, quant à lui, fait l'équilibriste sur le dossier du sofa et malgré deux gamelles avortées, ne paraît pas décidé à abandonner l'affaire.
Aucun des trois ne m'a remarquée. Ils sont bien trop dans leur bulle pour voir Becca, celle qui se jette sur des inconnus dans un ascenseur.
Tout en regardant mes amis, je me dis que c'est plutôt normal que je sois bizarre. C'est après ce constat-là que je relâche mon sac de courses. Ce dernier vient s'écraser sur le sol. Heureusement, je n'ai rien pris de fragile. Nous devrions mettre une pancarte « maison des dégénérés » sur notre porte je crois, ou bien « maison des incompris » au choix. Personnellement, bien que la première proposition ne soit pas valorisante, je trouve qu'elle nous correspond tout à fait.
C'est Timmy qui se rend compte de mon arrivée le premier, trente secondes plus tard. Celui-ci retire son masque qu'il met à cause de son allergie aux acariens, puis avance vers moi. Il ne porte pas ses lunettes aujourd'hui, sûrement a-t-il mis ses lentilles même s'il dit ne pas les supporter. En parfait gentleman qu'il est, mon ami prend le sac pour l'amener dans la cuisine. Je le suis tandis que mon regard, intrigué, alterne entre lui et Etta.
— Elle est comme ça depuis trois bonnes minutes. Je n'ai pas réussi à comprendre si c'était le con de hier soir, sa patronne ou un amant le problème. En tout cas, elle est remontée.
Lorsque notre amie est contrariée, il n'est pas rare qu'elle monologue. J'ignore si elle s'imagine face à la personne ou pas, mais c'est son truc à elle.
— Je lui donne encore deux minutes. Si après ça elle radote encore, je lui fourre le balai dans les mains et je la fais nettoyer à coups de pied au cul.
J'éclate de rire. Primo parce que je viens d'imaginer la scène et deuzio car je sais qu'il en est capable.
— T'es un vrai tyran Timmy.
— Non, me contredit-il. Je travaille seulement pour le respect des règles de vie de cette colocation de fous.
Adossée contre le comptoir de la cuisine, je hoche la tête. Ah ça, il l'a dit ! Nous sommes une colocation de timbrés. Mais qu'est-ce que j'aime notre colocation de dégénérés justement.
— Pitié, dis-moi que tu as pris du shampoing pour Etta, souffle-t-il quelques secondes plus tard en se tournant vers moi.
Son visage m'indique clairement que sa supplication était sincère. Malheureusement pour lui, ma réponse ne va pas l'enchanter.
Je fais un signe négatif de la tête et mon ami feint se griffer le visage.
— Elle a encore piqué dans mon flacon. Et qu'elle ne mente pas, elle savait que c'était le mien. J'ai marqué mon prénom au feutre...
— Indélébile, complété-je, je sais Timmy, tu es venu nous le montrer avant de le planquer sur l'étagère la plus haute.
Ce jour-là, Etta et moi avons pouffé de rire après son départ et nous avons dit qu'il devenait de plus en plus dérangé. Tim est un psy qui étiquette tout et fait tout le temps le ménage. C'est tout de même surprenant.
Le pire, c'est qu'il nous a dit que lorsqu'il était gamin, il était hypocondriaque. Avec le temps, et une thérapie efficace, le syndrome a disparu (du moins en partie). Mais maintenant, il est maniaque, même si je me doute que je me ferais taper sur les doigts s'il apprenait que je viens probablement de déformer la signification d'une pathologie.
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Petit ami & Compagnie 2 - Partie 1 (Terminée)
Chick-LitÀ vingt-six ans, Rebecca Moreau, jolie vendeuse en pâtisserie, vit en colocation avec ses deux meilleurs amis. Bien qu'encore meurtrie d'un échec amoureux, sous les conseils de son amie, elle décide de reprendre sa vie en main. Cette fois-ci, fini l...