Chapitre 21

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Il m'arrivait souvent de me poser sur une chaise et de constater à quel point ma vie n'était plus celle que je présageais. Pour quelles raisons me direz-vous ? Eh bien, je suppose pour de trop nombreuses causes... Je ne veux pas tourner autour du pot mais ma famille est en grande partie responsable, et j'utilise bien ce mot « responsable » car je juge que certaines choses auraient du se passer autrement. Je me suis toujours sentie plus ou moins seule à certaines périodes de ma vie. Il y a eu des périodes où la joie régnait, sans l'obsession pour l'argent et les secrets, une belle époque. On dit souvent que l'adolescence est une période difficile à vivre mais elle l'est encore plus quand on est mal entouré. Sans le soutien de mes amis et sans mes distractions habituelles, je crois que je ne serais pas celle que je suis aujourd'hui. Une mère obsédée par le vice, l'argent et les commérages et un père malade... Je n'avais pas le droit d'avoir de problèmes, ils étaient toujours les victimes dans l'histoire. À force de se concentrer sur leur nombril, ils n'ont même pas vu toutes les idées qui me sont passées par la tête : le suicide, le burn-out, la douleur... L'attention était toujours portée vers ceux qui en demandaient trop. J'étais perpétuellement dans une atmosphère de conflits, à qui aurait le dernier mot et la superbe réplique pour assener le coup final. Le plus triste dans tout cela, c'est que j'avais l'impression d'être la seule à voir à quel point cette situation n'était plus vivable. Je voulais partir, m'éloigner d'eux. Leur obsession de l'argent gâchait toujours tout, avoir toujours le besoin de se priver et de compter au moindre centime alors qu'on savait très bien qu'on avait les moyens. Ma seule échappatoire à cette époque, c'était l'écriture... et pleurer. Mais pleurer, c'est épuisant et ça fait mal aux yeux. On pleure mais personne ne nous entend, personne n'a envie de nous prendre dans ses bras, personne n'a envie de nous aider, finalement. J'ai parfois du mal à ravaler mes larmes, il arrive qu'elles s'échappent malgré moi et que cela devienne un torrent. Mais savez-vous ce qu'il y a de plus choquant ? Une personne qui vous voit pleurer, assise juste en face de vous, qui ne dit rien, ne fait rien et vous laisse pleurer. Ce genre de comportement, ça me fait penser à l'abandon et je déteste cela, il faut se battre. Avant que mon père ne nous quitte, il régnait déjà cette ambiance désagréable et insupportable. Je rentrais à la maison, un bref bonjour, on me montrait brièvement de l'intérêt pour ma journée et cela s'arrêtait là. On partait chacun de notre côté, faire nos activités. J'ai arrêté de profiter de nombreux plaisirs très tôt à cause de cette diabolisation pour les dépenses. Cours, manger, cours, études, sommeil. Rien de plus et même pas cher ! J'avais honte d'eux, je me disais tous les jours que jamais je n'éduquerais mon enfant comme cela, je lui donnerais de l'amour. Ils ont essayé de me mettre dans ce genre de case où on classe les gens sans même les connaître alors que j'étais leur propre fille, le fruit de leur chair. Quand j'ai commencé à me responsabiliser et à devenir une adulte, j'ai ressenti un second souffle mais j'avais besoin de plus. J'avais besoin de partir de chez moi et de me couper de cette atmosphère qui aspirait ma joie. Lorsque Chris a, au sens propre, déboulé dans ma vie, j'ai eu très peur, j'ai éprouvé ce que ressentent les enfants quand ils ne sont pas rassurés et qu'ils ont besoin de leurs parents. À ce moment là, à cause de ce sentiment de détresse, j'ai quasiment tout pardonné à mes parents, simplement pour qu'ils me viennent en aide. Mais cela, ce n'est jamais arrivé. Déjà pour la simple raison qu'il n'y avait plus que ma mère. Si Chris ordonnait une rançon, je pouvais être certaine que je ne bougerais pas d'un poil. Non pas que je critique ce besoin d'économiser mais la valeur de l'argent semble parfois dépasser une vie humaine, et ça, c'est tragique. Ça ne servait à rien de fuir de ce camp. Pour aller où, en plus ? Rentrer chez moi comme une fleur ? On ne me croirait jamais pour le camp, on me ferait discréditer, même. Est-ce que même je manque à quelqu'un ? J'ai bien des amis mais pas aussi proches... Sans Chris, je pense que j'aurais tout simplement mené la vie indépendante qui me faisait rêver. Sait-il tout cela ? Lui qui prétend si bien me connaître, connaît-il cette partie brisée de mon cœur ? J'ai besoin de quelqu'un, quelqu'un qui me veut du bien.

Chérie, tu m'appartiens !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant