Chapitre 22

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Son sang ne fit qu'un tour. Une sueur froide coula le long de sa colonne vertébrale et Lucie frémit d'horreur. Une rapide analyse de la situation lui indiqua qu'elle se trouvait en ce moment même dans un pétrin monstre.

Un contaminé se tenait dans la même pièce qu'elle à moins de cinq mètres.
Seulement cinq mètres.
La jeune fille n'arrivait plus à bouger, paralysée par le regard meurtrier du fondu qui la fixait, silencieux.

Une seule pensée traversa son esprit en alerte.
Agir.
S'éloigner de cet homme au plus vite. Prendre la fuite sans tarder.
Alors la blondinette laissa ses sens prendre le dessus et son corps prit les commandes de ses actes.
Et elle hurla.

Son cri parut faire réagir le fondu. Une étincelle de lucidité fugace passa dans ses yeux vitreux, durant un laps de temps si minime que Lucie eut du mal à le percevoir.
Mais il fut bien là.
L'homme secoua la tête comme pour enlever une dernière parcelle d'humanité en lui puis son regard replongea dans la démence.

Un rictus carnassier étira ses lèvres fines et ensanglantées, dévoilant des dents pourries, jaunes et resserées. Certaines d'entre elles se chevauchaient et des caries complétaient cet ensemble macabre.
Un rire sortit de sa gorge ravagée, empli d'hystérie.
Tremblante, Lucie repensait douloureusement à cette nuit où elle avait entendu Severina se comporter ainsi.

Lucie était tellement plongée dans ses souvenirs désagréables qu'elle ne vit pas que le fondu s'était rapproché d'un pas.
Quand elle s'en rendit compte, il était déjà trop tard.
L'homme n'était plus qu'à deux malheureux mètres. La distance entre eux s'était amenuisée tant et si bien que la jeune fille bondit en arrière, hurlant de plus belle. Elle pivota sur ses talons et prit la fuite sans demander son reste.

Surpris d'abord, le malade ne réagit pas. Puis un hurlement gutural retentit derrière Lucie qui déglutit en accélérant sa foulée, le coeur battant. La peur qu'elle ressentait en ce moment lui comprimait le thorax, coupait sa respiration déjà difficile.

Le fondu déboula du couloir d'où il venait et dérapa sur le sol en criant de rage.
La blondinette se retourna. Et regretta. De près, le contaminé était encore plus effrayant. Des lacérations profondes et des entailles zébraient son torse, ses bras, ses jambes. Des bleus et des ecchymoses recouvraient sa peau tandis que des cavités à l'origine inconnue parsemaient son crâne dégarni et son visage, à l'aspect de chair fondue.

Cette image se grava dans la mémoire de Lucie.
Elle fut certaine qu'elle reviendrait la hanter toutes les nuits désormais.
À supposer qu'elle survive à la première.

                              ***

La jeune fille déambulait en courant dans les dizaines de couloirs, sans savoir où aller. Le fondu s'était élancé à sa poursuite. Elle le savait grâce à sa respiration et à ses bruits rauques.

Là. Un escalier. Espérant que le fondu se rétamerait aux premières marches, elle tenta le coup. De plus, son instinct lui soufflait pour elle ne sait quelles raisons de monter. Toujours plus haut. Lucie jeta un coup d'oeil en arrière.
Malheur.
L'homme gravissait les marches avec agilité, de plus en plus rapide.
Paniquée, la blondinette franchit le reste des marches quatre par quatre.
Des chiffres décoraient les murs. Elle n'y avait pas prêté attention auparavant. Ils semblaient indiquer que Lucie se trouvait au sixième étage.
"Cet immeuble est immense", haleta-t-elle, essouflée, en regardant autour d'elle.
Si elle savait...
Des pièces s'ouvraient à droite, à gauche, des fenêtres ornaient les murs.
Lucie s'approcha de l'une d'elles et essaya de voir où est-ce qu'elle se trouvait.
Impossible.
Crasseuses et opaques, les vitres ne donnaient pas la moindre visibilité sur le monde extérieur.

Un bruit suspect attira son attention. À propos de bruit, son poursuivant semblait avoir abandonné la partie.
La jeune fille décida de l'oublier et souffla de soulagement. Pas pour longtemps. Un grattement se fit entendre. Lucie s'approcha d'un tournant et leva la tête. Le grattement cessa et son corps se pétrifia.
Écrit en grosses lettres de sang, grossièrement peintes sur un mur tâché de moisissure, le mot "RUN" était étalé. Il semblait avoir été inscrit à la va-vite.
"Courir, réfléchit Lucie. Mais pourquoi là..."
Sa réponse ne tarda pas à lui être apportée. Trois fondus plus horribles les uns que les autres surgirent de nulle part et la prirent en sandwich. L'un deux n'avait plus qu'un bras en moignon, les autres avaient comme...arraché leurs globes occulaires. Ils poussaient des hurlements affreux et Lucie crut que son coeur s'était arrêté de battre.
Une peur indescriptible s'empara d'elle et elle hurla de terreur, les yeux fermés.

Elle ne pouvait pas rester ici.
Mourir dévorée par des hommes assoiffés de sang.
Tremblante, la jeune fille ouvrit les yeux et ne réfléchit plus.
Elle fonça dans le tas. Donna des coups de poings et de pieds, et toucha un des fondus au visage. Il s'écroula au sol en poussant un gémissement.

La blondinette parvint à sortir de l'étaut que les contaminés avaient resserré sur elle en se débarassant de ses deux autres adversaires et prit la fuite.

                             ***

Lucie courut à en perdre haleine le long des couloirs. En voyant soudain un trou béant dans le sol à quelques centimètres elle vira de gauche.
Mauvaise idée.

Un fondu venait de la suivre. Haletante, Lucie se retourna, indécise...elle recula jusqu'au fond du cul de sac et sentit son dos buter contre le mur derrière elle.
Elle était prise au piège.

Son cerveau tournait à plein régime, à la recherche d'une solution.
Ce fut lorsque ses yeux se posèrent sur ses pieds qu'elle vit son échappatoire.
Une trappe.

                             ***

La jeune fille se réceptionna lourdement sur le sol et plissa son nez de dégoût. Elle avait atteri en plein dans une flaque de sang.
Elle souleva son pied droit et le secoua énergiquement, pour enlever la substance gluante qui lui collait à la semelle. Elle répéta la même opération pour l'autre chaussure et releva la tête. Elle se trouvait dans une petite pièce rectangulaire de neuf mètres carré environ.
Rien à signaler.
Elle sortit tranquillement de la pièce, persuadée qu'elle était en sécurité.

Lucie fit à peine quelques pas qu'un grognement résonna. Elle tourna la tête et écarquilla les yeux de stupeur.
Un fondu courait droit sur elle.

                            ***

Cela faisait dix bonnes minutes que la blondinette tentait de semer le contaminé.
L'homme enragé était tout près. Alors qu'elle sautait sur un palier, après avoir monté un énième escalier, une pression sur son bras lui arracha un cri de douleur. Le fondu avait planté ses doigts griffus dans sa chair.

Lucie n'eut pas le choix. Elle le mordit de toutes ses forces et sentit un jus poisseux au goût de moisi exploser dans sa bouche. Elle tint bon et le fondu lâcha son bras en hurlant.
- À l'aide ! cria Lucie. À l'aide !
Elle se remit à sprinter, quand elle vit une main sortir de l'ombre et la plaquer contre un mur.

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Voilà un nouveau chapitre ! Certes un peu court, je l'admet. J'attends avec impatience vos commentaires, histoire de savoir si j'ai suffisamment bien décrit l'environnement de l'immeuble, si vous parvenez à assez bien situer les lieux de l'action, etc...je voudrais aussi savoir si la description des fondus et de la course poursuite est suffisante pour l'instant.

1# wicked ! Merci 😄😄

Sur ce, j'espère que vous avez tout de même apprécié ce chapitre, et je vous dis à plus pour la suite ! 😃

L'immeuble maudit - L'Épreuve Parallèle (en pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant