Le réveil le lendemain matin se passe sans incident. Les deux hommes s'habillent et déjeunent dans un silence confortable, comme s'ils avaient leurs habitudes ensemble depuis bien longtemps. Cependant, Junhong a une question à poser depuis qu'il est sorti du lit. Il ne trouve pas le moment pour la poser, mais l'occasion se présente alors qu'ils finissent de se laver les dents, lorsque Yongguk demande:
- Tu veux faire quoi aujourd'hui?
- Euh, je me demandais... Est-ce que je pourrais aller lire dans la bibliothèque?
- Bien sûr.
- Oh... merci!
Sur ce, Junhong se précipite presque dans les escaliers pour aller lire. Une fois arrivé à destination, il se retrouve planté au milieu des étagères, sans savoir par où commencer.
- Du mal à choisir?
La voix de Yongguk s'élève depuis l'entrée de la pièce, faisant légèrement sursauter le jeune homme de surprise.
- Oui, je ne sais pas quoi... je n'y connais rien...
Avec un sourire bienveillant, son aîné cherche rapidement puis déloge un gros pavé pour le mettre entre les mains de Junhong.
- Qu'est-ce que c'est?
- C'est écrit dessus Einstein.
- C'est qui Einstein?
- Je t'expliquerai plus tard. Ce bouquin, c'est le premier de la trilogie du Seigneur des Anneaux, c'est un classique. Ça n'est peut-être pas facile pour commencer, mais une fois que tu seras dedans tu ne voudras plus en sortir.
Ne voulant pas discuter plus longtemps et s'attaquer immédiatement au livre, Junhong ne répond pas et prend place sur le canapé exposé au soleil hivernal, bientôt rejoint par l'autre. Yongguk observe l'adolescent, attendri par la manière dont celui-ci est fasciné par l'ouvrage. Bien que cette vue lui soit agréable, il s'en lasse, voulant lui aussi relire ce cbef d'œuvre. C'est alors qu'il se rapproche, passe un bras autour des épaules du plus jeune, et lit avec lui, répondant patiemment aux questions de Junhong quant aux mots et expressions lui étant inconnus.
Le jeune homme est rapidement absorbé par l'histoire, oubliant presque la présence de Yongguk à ses côtés. Ce dernier est lui aussi en transe, mais pas à cause du livre, qu'il parcourt d'un œil distrait. Il est comme hypnotisé par Junhong, son expression passionnée, l'adorable lenteur avec laquelle il lit, et la sensation de sa poitrine qui se remplit et se dégonfle doucement, au rythme de sa respiration, contre lui, Yongguk. Il n'arrive pas à croire qu'une telle œuvre d'art se trouve juste là, juste à côté de lui.
Les deux hommes ne voient pas le temps passer, dans un agréable silence seulement ponctué par le léger bruit des pages tournées de temps à autre par Junhong, jusqu'à ce que le calme soit rompu par un soudain gargouillement semblable à un coup de tonnerre provenant de l'estomac de Yongguk.
Pendant une seconde, les yeux de Junhong se retirent du livre pour venir se poser dans ceux de son aîné, sous l'effet de la surprise. Cette seconde est pour Yongguk un instant magique.
Il est comme happé par ces yeux sombres mais doux, à l'éclat clair et innocent, ces puits de savoirs simples mais si essentiels, ces deux océans de chocolat chaud, ses yeux. Il se sent comme l'élu de ces jumeaux divins, comme si deux divinités juvéniles l'avaient choisi afin de lui donner chaque jour force et passion, faisant de lui pour toujours et à jamais l'être le plus heureux de l'univers. Jamais un regard n'a semblé si puissant pour Yongguk.
Cet instant hors du temps est rompu par le rire de Junhong, qui, amusé par le son, ne se rend pas compte de l'impact de son bref regard sur l'autre homme. Son rire n'est pas imité par Yongguk, qui se contente de sourire, légèrement déçu par la fin de ce moment sans pareil.
- Je pense qu'il faut qu'on aille manger, sinon je ne vais pas pouvoir me concentrer pour lire!
- Oui, il est déjà deux heures...
À contrecœur, Yongguk s'éloigne de l'adolescent et se lève avec un soupir. Junhong, lui aussi, regrette aussitôt le contact chaud de son hôte. En effet, après avoir passé plusieurs heures à lire le meilleur (et le seul) livre qu'il ait jamais eu entre les mains tout en étant confortablement installé contre un si bel homme, l'air autour de lui paraît bien froid et banal.
Junhong se lève à son tour du canapé, jetant un dernier regard curieux sur l'étagère entière consacrée à l'histoire de la famille impériale, avant de descendre pour déjeuner avec Yongguk.
Alors qu'il mangent en silence une soupe de poisson accompagnée de riz, le jeune homme se décide à essayer d'en apprendre plus sur son propriétaire.
- Monsieur... Yongguk?
- Hm? fait le plus âgé en face, la bouche pleine.
- Est-ce que je peux savoir pourquoi vous avez tant de livres sur la famille Choseon?
Un silence tendu s'installe. Yongguk hésite un instant après avoir avalé, puis répond avec une ferme assurance:
- Parce que ça m'intéresse. Pourquoi tu demandes?
- Je trouvais ça... curieux.
- Je trouve que c'est toi qui est un peu trop curieux. Tu te mêles de ce qui ne te regarde pas.
- Excusez-moi, je voulais juste en savoir un peu plus sur vos goûts, puisqu'on vit ensemble, apparemment.
- Change de ton. Tu devrais faire profil bas, après ce qui s'est passé hier et avant hier. Je n'ai toujours pas digéré ta fuite, ni ta petite escapade dans mon studio pour fouiller mon PC. Tu devrais être content de t'en être si bien sorti.
- Je n'ai pas fouil...
- Silence! tonne Yongguk.
- Et puis elle était très bien cette chanson. Elle parle de Himchan, non?
Au regard de son maître, Junhong comprend instantanément qu'il a manqué une occasion de se taire. Lorsque l'homme en face de lui se lève silencieusement, les bras tremblants, le garçon réalise qu'il vient de prononcer la phrase. La pire phrase possible, qui va immanquablement provoquer une crise chez Yongguk.
Ce dernier marche jusqu'à la chaise du garçon, l'empoigne par le col et le met debout face à lui.
- Je t'interdis de parler de Himchan.
- Pard...
- TA GUEULE!!
Le cri retentit dans toute la maison, faisant trembler Junhong au passage. La respiration de l'agresseur s'accélère, et sa main gauche, qui ne tenait pas le garçon, se crispe en un poing rageur et tremblant. Le poing de Yongguk se lève, pointé droit vers le visage angélique apeuré du plus jeune, mais la main s'ouvre au dernier moment et pousse violemment Junhong en haut du torse au lieu de le frapper au visage.
Le jeune garçon tombe à plat dos sur le sol de la salle à manger. Yongguk vient s'assoir à califourchon sur son ventre tout en lui saisissant une épaule d'une main et le cou de l'autre, jusqu'à ce que son regard croise celui de sa victime quelques secondes plus tard. À la vue des yeux embués de Junhong, la froide cruauté lisible sur son visage disparaît, ses mains se décrispent et viennent saisir beaucoup plus doucement les joues de Junhong, qu'il caresse avec ses pouces.
Le garçon, confus, ne sait plus à quoi s'attendre. Yongguk se penche alors lentement en avant, contemple longuement le visage de Junhong avec une expression incompréhensible, puis dépose un long baiser sur ses lèvres avant de se lever et de s'en aller sans un mot, l'air triste. Un claquement de porte indique à Junhong qu'il est allé se réfugier dans sa chambre.
Bouche bée, le garçon reste une minute par terre sans bouger, essayant de comprendre ce qui a bien pu se passer. Puis il se relève lentement pour finir sa soupe et celle de Yongguk, et débarrasse la table, toujours pensif.
Tandis qu'il essaye de trouver un sens au comportement de son propriétaire, installé dans le canapé la tête à l'envers et les jambes en l'air appuyées sur le dossier, la sonnette retentit.
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Esclave | Banglo
FanfictionYongguk se promenait lentement au milieu des jeunes hommes nus, s'arrêtant de temps en temps devant l'un d'entre eux pour le toiser, le fixant de son regard froid. Il palpe quelques paires de fesses au passage, mais ne semble jamais satisfait. Ses p...