Sally était à un enterrement. Celui de son oncle. Elle ne l’avait pas beaucoup connu. Elle n’avait jamais été très proche de lui. Alors, elle n’était pas trop triste. Elle était là parce que c’était la famille.
En revanche sa tante, la veuve de son oncle, était dévastée. Forcément, elle avait perdu son mari. Son mari qu’elle avait tant aimé. Tant chéri. Elle tentait de cacher ses pleurs, mais ses yeux gonflés et rougis servaient de preuve. Elle avait déjà pleuré toute les larmes qu’il lui était possible de pleurer depuis la mort de son mari, mais elle pleurait encore. On lui pardonnait, elle était veuve.
Le cercueil était en bois, assez simple. L’oncle et la tante de Sally n’était pas très fortunés. Mais surtout, c’était des gens simples. Ils n’aimaient pas se montrer. C’était un couple plutôt discret en général. Il était aimables, mais pas extravertis. Ils allaient peu vers les gens. Le docteur, le boucher et le boulanger du village les connaissaient. Mais ils n’auraient jamais pu dire ce qu’ils préféraient entre un filet de boeuf et un carré d’agneau. Ils n’auraient pas pu dire non plus ce qu’ils préféraient entre une baguette bien cuite et un pain de campagne. Tout le monde les connaissait sans vraiment les connaître. Ils n’avaient pas beaucoup d’amis. En fait, seuls des membres de la famille étaient présents à l’enterrement. Ils allaient à l’essentiel.
Ils ne faisaient pas de vagues, pas de bruit, ils étaient discrets. Nul n’aurait pu penser qu’un tel malheur allait s’abattre sur eux.
L’oncle de Sally n’était même pas très vieux. Il avait la soixantaine. Et il était en pleine forme, il faisait du sport régulièrement et il se portait bien. Qui aurait cru qu’il mourrait si vite ?
La veuve vint s’asseoir à côté de Sally, sur une chaise en bois, comme le cercueil.
— Comment ça va Sally ? Tu as tellement grandi, quelle belle jeune fille tu es devenue !
Son sourire sonnait faux. Il était si faible et si triste que personne n’aurait pu s’y tromper. Sally lui signifia qu’elle allait bien. Elle lui signifia aussi ses condoléances.
— Et toi tante Olivia, tu tiens le coup ?
La veuve hocha la tête. Mais doucement, très lentement, une larme perla au coin de son oeil. Elle roula tout aussi doucement, tout aussi lentement sur sa joue, et vint s’écraser sur sa robe. D’instinct, Sally prit sa tante dans ses bras. La jeune fille était douée d‘une grande compassion, elle détestait voir les gens souffrir.
— Je…
— Ne parles pas tante Olivia, c’est normal de pleurer son mari. Tu ne dois pas te sentir coupable.
Cette fois-ci, la femme éclata en sanglots.
— Tu vas faire ton deuil, tranquillement, et ensuite tu ira mieux. Je te le jure.
— Tu ne comprends pas, murmura la veuve.
— C’est vrai, je n’ai pas perdu de mari, mais je te comprends quand même. J’ai
perdu un oncle.
— Mais je l’ai tué.
Forcément, la veuve culpabilisait, c’était tout à fait normal.
— Mais non tu ne l’as pas tué, il a fait une crise cardiaque, tu n’y pouvais rien.
— Je l’ai tué.
Sally devait la consoler.
— Ne t’en veux pas, ce n’est pas toi, personne ne pouvait s’en douter.
— Je l’ai empoisonné. C’est à cause de moi qu’il est mort, un poison de type curare.
Quelques jours plus tard, la veuve triste fut emmenée en garde à vue, fut jugée, puis condamnée à des années de prison.
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WRITOBER 2018
RandomJack et Sally sont inséparables depuis leur plus tendre enfance. Le mois d'Halloween risque bien de leur offrir quelques surprises... Alors... Trick or Treat ?