22 octobre : frit

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Quand ils étaient petits et qu’ils allaient à la plage ensemble, Jack et Sally jouaient au poisson frit.

    — Le premier arrivé dans l’eau a gagné !

    Ils courraient sur le sable comme si leur vie en dépendait et se jetaient dans l’eau. Selon la météo, ils hurlaient à cause du froid ou ils riaient parce que l’eau était chaude. Ensuite ils sortaient de l’eau et allaient de rouler dans le sable, comme pour se pâner. Puis leurs parents devaient élire le plus beau poisson frit. Ils faisaient en sorte que ce ne soit pas toujours le même qui gagne.

    Tous les deux, ils adoraient partir en vacances à la mer ensemble. Il embêtaient leurs parents pendant le long trajet qui menait aux vacances ensembles. Ils dormaient dans la même chambre. Ils jouaient ensemble sur la plage. Parfois ils construisaient des châteaux de sable. Parfois ils creusaient une énorme trou pour s’enterrer dedans. Mais leur jeu préféré était le poisson frit.

    Alors, quand Sally lut ce roman, elle pensa immédiatement à son meilleur ami et à leurs après-midi de jeux à la plage.

    Dans ce roman, les personnages principaux s’amusaient à imaginer les pires techniques de tortures, les pires techniques de meurtre, pour rigoler. Les personnages principaux de ce roman étaient de véritables psychopathes.

    — On attache des pierres à ses jambes, on le met sur un bateau, on se rend en eaux profondes et on le balance dans l’eau. Ensuite il suffoque, il tente de remonter, il n’y arrive pas. Il essaye de respirer, mais tout ce qui rentre dans ses poumons, c’est de l’eau. Et il meurt.

    — Trop basique. On kidnappe ses frères et soeurs.

    — Et ses parents.

    — On kidnappe ses frères et soeurs et ses parents et on lui montre un film dans lequel on les asperge d’essence avant d’allumer le tout. On le force à les regarder se tordre de douleur et se consumer. Ensuite on lui fait croire à une blague, on le persuade que tout va bien pour eux, on le rassure. Et on le laisse rentrer chez lui et découvrir leurs corps carbonisés. Puis c’est lui qu’on asperge d’essence et qu’on allume.

    — Pas mal mais on touche pas à la famille. On l’enferme dans une pièce et on le regarde mourir de faim. Simple et efficace.

    — Trop simple. Tu connais les techniques de torture du Moyen-Âge ? Je connais un truc qui peut être pas mal. C’est une espèce d’énorme poutre en forme de triangle. On le met attaché à califourchon dessus avec des poids accrochés aux chevilles et la gravité fait en sorte qu’il glisse sur la poutre jusqu’à se séparer en deux. Et il meurt. On va dans un musée de la torture ou dans un château du Moyen-Âge dans lequel ces trucs sont exposés, on le vole, et on l’utilise sur lui.

    La partie qui rappelait à Sally ses après-midis sur la plage à jouer au poisson frit était celui-ci.    

    — On fabrique une énorme cuve et on lui demande gentiment de venir nous aider à la nettoyer parce qu’elle est trop grande pour qu’on la nettoie à deux. Il accepte. Ensuite on sort discrètement de la cuve pendant qu’il nettoie. On lui verse des kilos et des kilos de chapelure dessus, afin que ça le recouvre entièrement. Et avant qu’il ait le temps de se demander ce qu’il se passe, on lui verse des litres et des litres d’huile de friture chaude et puante. Il brûle, il hurle. Et il se transforme en poisson frit.

Ça y est j'ai rattrapé mon retard !

WRITOBER 2018Où les histoires vivent. Découvrez maintenant