15 octobre : plâtre

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Quand elle était en primaire, Jack s’était cassé le bras. Il avait sauté d’une balançoire en mouvement, ce qui n’était pas très malin et lui avait valu une immobilisation du bras pendant un mois. Tous ses amis avaient insisté pour signer son plâtre, et son bras se transforma en une véritable oeuvre d’art.

    Une semaine plus tard, ce fut au tour de Sally.

    — Je suis maudite ! Une semaine après toi, c’est pas un hasard.

    Jack se moqua d’elle : elle était superstitieuse, c’était tellement idiot. Il n’y avait aucune malédiction, mis à part peut-être sa maladresse légendaire.

    Sally était tombée en essayant de grimper dans un arbre. Résultat : une jambe cassée.

    — En plus toi t’as un fauteuil roulant c’est trop classe ! Moi j’ai juste un plâtre tout nul au bras, et c’est le gauche, je peux toujours écrire donc ça sert vraiment à rien.

    Jack avait une façon bien particulière de voir les choses. En vérité, le fauteuil roulant était tout sauf pratique, heureusement qu’il y avait un ascenseur dans leur école. Sally était toujours obligée d’être accompagnée de quelqu’un, et cela l’énervait grandement. Elle préférait largement être autonome et se débrouiller toute seule. Mais pour une fois, elle ne pouvait pas.

    Cela apprit une chose aux deux meilleurs amis : il fallait arrêter de faire les quatre-cents coups et faire plus attention à eux. Malheureusement, Jack et Sally était des aventuriers, et il n’avaient jamais arrêté d’être casse-cou.

    Avoir un plâtre n’avait rien de glamour. Surtout quand on savait qu’ils étaient obligés de se laver avec le plâtre recouvert d’un sac poubelle pour ne pas l'abîmer.

    Jack fut le premier à guérir. Le vendredi soir, il quitta l’école avec le bras immobilisé et le lundi matin il revint avec la banane et plus de plâtre. Sally devait encore attendre deux semaines. Elle fulminait. Jack n’arrêtait pas de se vanter d’être enfin libre de ses mouvements, contrairement à elle.

    Quand elle arriva à l’hôpital, elle fut accueillie par une infirmière chaleureuse, et conduite dans une salle pour qu’on puisse couper son plâtre. Pour le couper, l’infirmière allait utiliser une sorte de scie circulaire. Quand elle la vit, Sally hurla à pleins poumons. Il était hors de question que qui que ce soit l’approche avec un engin pareil. Son cri fit accourir les infirmières des alentours vers la salle.

    — Tout va bien, besoin d’aide ?

    L’infirmière qui se chargeait de Sally rit.

    — Non, tout va bien, la demoiselle a juste eu un peu peur.

Peut-être que l’infirmière allait cruellement lui scier la jambe et que toute cette histoire allait finir en bain de sang et que Sally n’allait plus jamais pouvoir marcher. Son appréhension ne faisait que grandir. Peut-être que cette infirmière était une psychopathe. Sally ne voulait pas mourir, pas avant d’avoir été au collège, puis au lycée, puis d’avoir eu des enfants et un chien. Ou un chat.

Mais à son grand étonnement, tout se passa bien.

Des années plus tard, en se souvenant de cette anecdote, Sally sourit et se dit qu’elle avait déjà beaucoup trop d’imagination. Jack, lui, continuait de se moquer d’elle comme au premier jour, il était toujours aussi insolent.

JOYEUX ANNIVERSAIRE @ChachouPanda15 ❤

WRITOBER 2018Où les histoires vivent. Découvrez maintenant