Chapitre 22 : Un Nouveau Pays des Merveilles ?

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—Alice—

Aussi loin que je me souvenais, je ne comprenais pas pourquoi ils avaient tenu à ce que je devienne leur chef. Ils n'aimaient que peu les humains, et je suis humaine. Ils avait tous l'âge de l'univers, et j'avais à peine 8 ans quand j'ai décidé de vivre pour toujours au Pays des Merveilles. Ma famille avait été la première à commencer à détruire le seul endroit où ils se sentaient bien, et pourtant ils me respectaient sans tenter de me faire payer.

J'avais décidé de rester au Pays des Merveilles peu avant que les destructions et les meurtres ne commencent, et parfois je le regrette. Je me dis que sans moi, tous auraient pu vivre heureux. Même le Jabberwocky qui était alors menaçant ou la Reine de Cœurs qui souhaitaient voir tomber les têtes de tout le monde.

Quand ils ont tous commencé à redevenir humains, j'ai eu peur. Peur que la haine et la rancœur qu'ils accumulèrent dans leurs vies humaines ne se répercutent sur moi, irrémédiablement. Ils avaient tous été plus ou moins détruits et bafoués par leurs semblables, qui aurait pu leur en vouloir ?

Depuis que le Pays des Merveilles avait commencé à s'étioler, j'ai partagé leur façon de penser.

Un endroit de rêves où n'importe qui pouvait circuler, détruit par la bêtise d'une race orgueilleuse et hypocrite. Rares étaient les humains qui venaient avec de vraies bonnes volonté ou un semblant d'innocence, et malheureusement pour eux, ils finissaient rarement bien. Le temps m'a appris qu'ils étaient généralement faibles. Les plus forts et les plus mauvais s'en prenaient à eux jusqu'à ce qu'ils puissent perpétrer leurs méfaits.

Le pire, dans tout cela, c'est que les habitants reprenaient conscience de ce qu'ils avaient été en temps qu'humain. Ils avaient été les faibles, devenus forts malgré eux pour certains, puis étouffés par plus forts qu'eux. Et malheureusement, ils devaient lutter. Ils sont devenus ce qu'ils répugnaient. Certains, se noyant dans une forme de folie, s'étaient construits une personnalité de façade pour cacher leurs envies destructrices, à l'instar de Tweedle Dee, Tweedle Dum et le Lapin Blanc. D'autres reprenaient leurs rôles de fou avec un plaisir certain, comme le Chat de Cheshire, le Jabberwocky, le Lièvre de Mars ou le Chapelier Fou. Il y en avaient même qui s'étaient construits sur une forme de folie destructrice. Le Loir, la Reine de Cœur, la Chenille s'étaient prêtés à ce jeu. Les derniers, enfin, avaient perdu leur joie de vivre et leurs couleurs à cause de cela. La Tortue Fantaisiste et la Souris étaient de ceux-là.

Moi ? Je ne savais où je me situais. La Chenille disait parfois que j'étais le maitre du jeu, mais je n'y croyais pas. Je me considérais juste heureuse dans mon pays d'adoption.

Bien sûr, je pourrais en vouloir à Lucie pour notre situation actuelle, mais je doute que si elle savait, elle aurait fait en sorte de nous faire du mal. À chaque fois qu'elle nous regarde, je vois la tristesse de son regard, une forme de regrets puissants. Et pourtant, je ne l'ai que peu aperçue. Il est évident qu'elle s'en veut. Elle nous évite.

Et puis, elle semble avoir de grands soucis à gérer.

J'étais heureuse d'être à la tête du Pays des Merveilles, ou du moins, des lambeaux de ces derniers. Je tentais de les rendre le plus heureux possible, malgré tout.

Quand je fus tirée de mon sommeil par des cris et des bruits d'objets cassés, je dormais avec la Reine de Cœurs. Elle était comme ma maman, depuis qu'elle avait cessé son isolement volontaire dans son château en ruines et laissé à l'abandon. J'avais découvert qu'elle aurait adoré avoir une petite fille, une enfant avec laquelle elle pourrait discuter de toutes sortes de choses futiles, avec qui elle pourrait partager son goût des vêtements extravagants et avec laquelle elle aurait une relation de confiance.
Moi, je l'aime beaucoup parce qu'elle me rappelle ma mère avant le Pays des Merveilles, avec quelques autres qualités qui font qu'elle est, pour moi, la mère idéale.

Elle avait voulu voir ce qu'il se passait en haut, hache à la main en chemise de nuit, mais un des automates, la petite fille, lui avait bloqué l'accès en lui disant qu'il valait mieux que nous restions dans notre chambre. Pour calmer ses nerfs, je lui avais fait du thé. Cela n'avait pas eu beaucoup d'effets, mais tant pis, j'avais fait de mon mieux. Pour passer le temps, je l'avais aidée à s'habiller.

Plus tard, nous avons entendu le Jabberwocky crier de joie. Naturellement, nous avons monté dans le hall d'entrée. Le Chat de Cheshire se faisait secouer dans tous les sens par le Jabberwocky, Lucie et Rosalie regardaient la scène dans un coin avec ce qui semblait être un grand sourire et un homme que je ne connaissais pas regardait tout le monde d'un ton neutre. Après m'être raclée la gorge pour signaler que j'étais là, je pris la parole :

-Quel est le problème ?

-J'ai réussi !!! J'AI RÉUSSI À NOUS CRÉER UN NOUVEAU PAYS DES MERVEILLES !!!

Oulah, aurait-il abusé du thé ?

-Est-ce-que tu peux nous expliquer de façon plus explicite, je te prie, demanda la Reine de Cœur ?

-Appelez les autres et suivez-moi, lança-t-il d'un ton surexcité !!

Quelques minutes plus tard, nous formions tous une petite procession qui suivait une Jabberwocky surexcité qui devait s'empêcher de voler pour que nous puissions le suivre. Loïc, Rachelle, Lucie et Rosalie nous suivaient. J'ignore où est passé l'autre inconnu, mais j'ai cru comprendre que nos hôtes l'avaient fait partir.

Ils nous mena jusqu'à une petite clairière, puis s'approcha d'un arbre. Il murmura quelque chose une fois entré en contact avec, puis je vis une sorte d'éclat blanc se former dans le tronc, semblable à une porte à travers laquelle Hazel passa. J'ignorai où il disparut, mais toujours est-il que nous nous engouffrâmes à sa suite.

La clairière dans laquelle nous nous trouvions alors avait beau être sombre, elle n'en demeurait pas moins magnifique. Un cadre naturel, calme, semblant enfermé dans une voûte étoilée où les seuls bruits qui se faisaient entendre étaient ceux d'un vent inconnu et de l'eau qui coule, provenant d'une petite rivière.

Le Jabberwocky s'approcha de ce qui semblait être l'alter-ego de l'arbre qui lui permis d'ouvrir le passage et murmure quelque chose qui le fit se refermer. Je tentais de toucher l'un des semblant de parois, et me heurtait à quelque chose de plat et de dur, alors que je m'attendais à ce que ma main passe à travers.

J'étais ébahie. Comment avait-il réussi à faire de telles choses à lui tout seul ? Cet endroit était vraiment magnifique !!

-Je sais qu'il n'y a pas encore d'habitation ou quoique ce soit qui puisse garantir le moindre confort, fit le Jabberwocky, mais on n'aura qu'à construire. J'avais pensé à une maison ou un petit village, avec une maison individuelle pour chacun...

-Je me charge des plans pour la construction, renchérit la Chenille presque aussitôt. Émilie et Ambre vont m'y aider. J'aurais besoin de toute la main d'œuvre possible lors de la construction.

-Ça mettra combien de temps, environ, questionna Loïc ?

-Je l'ignore, répondit la Chenille. Il faut que je calcule la superficie de cet endroit, quel genre de bâtiment nous construirons...

-On est pas prêt de retrouver le Pays des Merveilles, bâilla le Loir...

-N-n-ne soit p-pas si p-pessimiste ! Au m-moins, on a un l-l-lieu, maintenant, rétorqua la Souris !

Je souriais, lançais un regard complice à une Reine de Cœurs, qui semblait émerveillée. Je tirais sur sa robe, et elle me lança un sourire avant de me porter dans ses bras, me mettant au même niveau que tout le monde. Lucie nous souriait :

-En attendant, je peux vous héberger le temps qu'il faudra jusqu'à ce que vous puissiez vous construire tout ce que vous voudrez dans cet endroit.

Ça se voit qu'elle nous aime bien. Maintenant, l'avenir s'annonce meilleur...

Le Monde des Humains, la Première Face du Miroir (EN PAUSE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant