-Il est vrai que j'ai toujours aimé danser. De tout temps j'ai eus à coeur de maîtriser les valses et m'entendre avec mes partenaires. C'était une époque merveilleuse: les jeunes filles avaient toutes une taille de guêpe, si bien parées de leurs plus belles robes, sorties spécialement pour ces bals. Elles avaient le teint pâle, et les cheveux longs, pour la plupart. Mais pas Angélique. Elle, était bien différente de toutes les femmes que j'ai pu cotôyer. Elle était encore plus fine, brune avec des cheveux aussi courts que ceux d'un homme, plus courts que les miens. Elle avait les yeux verts. Ils avaient exactement les mêmes nuances que celles que l'on pouvait trouver sur les ailes des oiseaux. Ah, <<Mon Hirondelle>>. Elle était un peu gauche, très intelligente, et son caractère de braise m'intimidait un peu, c'est certainement ce qui m'en fit tomber amoureux.
Malgré la faible luminosité de la pièce, les yeux de Charles brillaient. Jules avait le sourire aux lèvres, regardant son hôte repartir loin dans ses souvenirs, avec un don réel pour comter ses histoires. Il tenait un verre de vin dans sa main, mais il ne l'avait plus touché depuis qu'ils avaient abordé le sujet. Dans ses yeux pouvait se lire une certaine mélancolie, et Jules ne l'avait pas ignoré.
-Si le sort m'avait été favorable, nous serions peut-être dans le même caveau en ce moment.
Malgré la tristesse de ses propos, Jules arrivait encore à déceler la note d'humour et d'originalité dans cette phrase.
-C'est à ce moment qu'on t'a transformé?
-Oh non, j'ai du partir me battre pour la Grande Guerre. J'ai été transformé quelques années plus tard. Quand je suis revenu chez moi, elle était partie. Et avec une femme en plus. C'est ce que j'ai entendu dire.
Jules ne put se retenir de rire. Charles ne lui en tint pas rigueur, après tout, même lui trouvait cette situation ironique. Le destin a parfois un drôle de sens de l'humour.
-Sa mère m'a toujours détesté, je n'ai jamais su pourquoi. Passons. Le tournant le plus important de ma vie arriva un peu plus tard, pendant un voyage en Allemagne. Berlin était un superbe endroit de jour, malheureusement, de nuit, cette ville perdait tout son charme. Passé l'heure du couvre-feu, la ville était ... morte. Les gens rentraient chez eux, car la nuit les quartiers éloignés du centre avaient mauvaise réputation. On y pratiquait des ... rites particuliers, des sortes de réunions nocturnes, où les femmes n'avaient plus du tout la même valeur, on les y traitait comme des objets mis à disposition des hommes. Je n'ai vu cette scène se jouer qu'une fois, puis partis en plein spectacle. Malheureusement pour moi, je n'arriverais jamais à l'hôtel vivant. Je n'ai plus vu le jour se lever depuis.
Jules avait cessé de rire, et Ethan et elle affichaient tout leur sérieux. Jules pensa qu'elle avait eut la chance de se faire transformer par un ami, et que tout le monde n'avait pas cette chance justement.
-Bien , l'ambiance bat son plein à c'que j'vois, souligna Charles en souriant.
Apparemment, se remémorer tout ça ne l'affectait pas le moins du monde.
-Quel égoiste je fais. Et si on arrêtait de parler de moi?
Il se tourna en direction d'Ethan, ce dernier soupira.
-Bon, qu'est-ce que vous voulez savoir? Ma vie n'a rien de trépidante.
-C'est vrai, déclara Charles le sourire aux lèvres, mais étoffe un peu, rend-la attrayante.
-... Je suis né en Floride, j'ai entamé des études de graphiste, j'ai arrêté et je suis venu ici.
-C'est déprimant, encore plus que la dernière fois, fit Charles en secouant la tête, tout en souriant.
