Chapitre XII: Moisissure Extérieure et Intérieure

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Le carrosse ralentissait en faisant crisser le gravier jusqu'à finalement s'arrêter. Des serviteurs quéruis ouvrirent la portière à Liaorme, qui une fois débarrassé de l'espace exigu dans lequel il avait voyagé depuis Noaral, s'attarda quelque secondes, pour réacclimater ses membres et ses yeux à l'extérieur. Les pépites de lumière dorée tombaient en cascade, avec pour falaise les haut murs de Roesarit, qui faisait que le vieux château était plus une tour avec une base fortifiée, ayant écrasée les attaques de toute sa masse jusqu'à les enfouir définitivement dans le passé. Liaorme le constatât à son architecture carrée et aux fenêtres minuscules, le château était là depuis plusieurs siècles, datant d'avant le dépassement de ses émules par l'invention du canon. Un vésalien l'emmena à l'intérieur, et pour cela, monter la petite colline étalonnée de terrasses plaquées de jardins. L'autre côté des murs épais était de rouge velours tracé de lignes de métal cousines des dorures, créant des motifs fait de parangons d'harmonie géométrique, accompagné par des tableau de moment historiques divers.

La montée étant inévitable avec un bâtiment de cette forme, les rampes d'escalier concourraient de longueur entre les murs et les lustres. Liaorme atteignit en haletant une porte ouverte sur une pièce bondée de monde. Le vésalien lui expliqua que c'était la salle d'attente pour voir le roi. Et c'était sur ces mots que Liaorme se retrouva seul avec des ribambelles de nobles aux cheveux blanc ou blanchis, qui essayaient d'installer toute leur contenance dans cette petite pièce, qui n'était pas sans lui faire écho avec la pièce de Noaral où lui et Mélise ont du attendre de se faire appeler. Et la encore, au bout d'une bonne heure, on dit enfin son nom, lui permettant d'entrer dans la pièce suivante, qu'il découvrit être la chambre royale, où le monarque encore au lit recevait son reflux quotidien de visiteurs. Liaorme remarqua les nombreuses rides omises de la peinture dont il se souvenait à Noaral et que la caractéristique d'émacié ne s'appliquait pas qu'à son visage. Les fines colonnes lumineuses sortant de l'unique et maigre fenêtre passaient en plein milieu de la chambre royale, pour s'arrêter grotesquement en une grosse tache claire sur le rideau du lit, à quelques centimètres du roi vésalien. Ce dernier commença à faire entendre sa voix brisée.

-A qui ai-je l'honneur?

-Liaorme Narévire au service de votre Majesté.

-Vous êtes donc l'humain avec des pouvoirs que Laedri m'a envoyé, et qui serait le dernier survivant de la Lorande?

-Exact, Sire.

Pour appuyer ses propos, il utilisât une arcane de lumière. Nileos leva les sourcils.

-Ah, je vois... (Il haussa difficilement la voix) qu'on lui trouve des appartements! Je vais vous verser une rente tous les mois, et vous aurez la première aujourd'hui.

On l'emmena donc dans un appartement un peu plus bas dans la tour, avec une chambre plutôt confortable, une petite vue sur le jardin, une garde robe vide et un valet de chambre quérui. C'est à ce moment que Liaorme réalisât qu'à part les vêtements qu'il portait, il n'avait aucun bagage. Ne sachant que faire, il interrogea son nouveau valet.

-Excuse moi, est-ce que tu pourrais m'apprendre comment les choses se passe ici?

-Le matin, toute la cour assiste au réveil du roi, en gage de respect. C'est aussi à ce moment là qu'il reçoit les invités. De onze heures à midi, le roi reçoit dans son cabinet les nouvelles, puis s'en suit le repas royal. L'après midi est consacrée à la promenade où à la chasse. Et c'est en début de soirée que le roi signe et envoie ses lettres.

Liaorme vérifia sur l'horloge qu'il n'était pas actuellement en retard pour quelque activité où sa présence serait un signe de politesse attentionnée. La constatation des deux heures vacantes entre le présent et le repas demandeur fût pour lui autant d'espace où installer sa tranquillité. Ne connaissant le château que schématiquement, aussi bien dans le lieu, que dans l'habitude et dans les personnes, il décida d'aller visiter les lieux et de faire connaissance avec les gens. Mais sur l'embrasure de la porte, vint le rattraper un sentiment de remord causé par une action qu'il avait oublié.

-Ah pardonne moi, j'ai oublié de te remercier et de te demander ton nom.

-Tivroé.

Étant enfin soulagé, il choisit de redescendre visiter les jardins, pour s'aérer un peu avec de l'air matinal parfumé par les fleurs. Il s'engagea dans une des allée sans y mettre de réflexion derrière.

Au dessus de lui, il vit les oiseaux d'un genre qu'il n'avait jamais vu sur son île, glisser vivement dans les airs, libres de tout obstacle terrestre. Et au pied du château monarchique, les fleurs ravissantes et les arbres à la robe de feuilles légère sortant de la terre, la même matière de laquelle quelque mois plus tôt, il émergea sur la même parcelle d'horizon que cette gigantesque machine, destrier métallique de la puissance lorandienne. Il s'assit sur un banc et leva les yeux aux ciel.

Sa civilisation, qui était la plus développée de tous les temps situés après l'Omubrine, avait finit par dévier vers le domaine des souvenirs et des mythes, alors que les autres pays continuèrent leur chemin vers l'excellence. Mais n'ayant pas de manieurs d'arcanes comme en Lorande, la puissance technologique était de fait très difficile à atteindre, alors elles essayaient d'autres routes: la finance, l'art, l'agriculture, la guerre... Domaines dans lesquels son île n'était pas indépassable. Et même à plus petite échelle, comme dans son champ de vision, qui du temps d'avant son sommeil n'aurait jamais pu ressembler à ça. Au final, la Lorande n'était pas le centre du monde...

Alors que Liaorme réfléchissait à tout cela, de la toux arracheuse de glaire commença à infester son rythme respiratoire, et en levant les yeux du sol maintenant ponctué de crachats, il vit qu'il était entouré de la mort noire qui bourgeonnait dans ce jardin, et faisait flétrir toute couleur végétale s'y opposant. Et même en ne faisant que survoler cette partie de verdure nécrosée, cette dernière trouvait un moyen de tuer les insectes et volatiles, qui finissaient immanquablement par y abandonner leur corps sans vie.

Au travers des yeux irrités de Liaorme, les éléments du monde se mirent à fondre, et c'est à ce moment là, au seuil du vomissement, qu'il se mit à courir. Il alla instinctivement se réfugier à l'intérieur du château, et avertir d'une voix à bout de souffle les premiers gardes en vue de ce dont il fût témoin. Après une marche incrédule, ils aperçurent, de loin, du fait des avertissements de Liaorme, l'herbe noircie et les cadavres d'oiseaux morts. Néanmoins, puisque les mouches pouvaient venir enlaidir ces carcasses, Liaorme et les gardes pouvaient dorénavant s'y aventurer pour compléter le constat de l'ampleur des dégâts.

L'incident arriva au oreilles du roi, qui reporta à un autre jour la chasse de l'après-midi et renforça la garde, même si ne connaissant pas la nature exacte de cet évènement, il faisait surtout cela pour calmer la cour. Liaorme passa sa première nuit à Roesarit dans la crainte. Il fît vite le lien avec la tentative d'enlèvement qu'il avait subi en route, par ces «Vésaliens Véritables», dont un des infiltrés dans le château royal avait peut-être essayé de l'assassiner. Il sentît que son séjour à Roesarit n'aurait pas la saveur qu'il aurait attendu ...

Quintessence Jardin CélesteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant