— C'est alors que nous avons vu des yeux bleus perçants rivés sur nous. D'après Moji, c'étaient des Esprits de Bois. Nous avons réussi à fuir de la forêt avec l'enfant et quelques heures plus tard, nous vous avons trouvés.
— Des Esprits de Bois, répéta Démétria pensive.
— Vous connaissez ces créatures ?
Démétria se pencha, plongeant son regard argenté dans celui d'Hadvar.
— J'ai entendu des histoires cocasses à propos de voyageurs se faisant agresser par de féroces arbres. En réalité, ce sont des âmes emprisonnées par les dryades. Les Esprits de Bois sont revêtus d'une apparence de végétaux pour tromper leur proie et leur force colossale leur permet de plier les meilleurs armures comme de simples feuilles de papier. Même le plus courageux des guerriers ne souhaiterait pas en croiser un. Quant aux créatures aux yeux rouges que vous avez mentionnées, il est possible que ce soit des hurleurs des lunes. (4) En temps normal, les dryades ne sont pas belliqueuses. Au contraire, elles sont assez timides. Rare sont ceux pouvant se vanter d'en avoir vu une. Tant que vous ne souillez pas leur environnement, il n'y a aucune raison de les craindre.
Hadvar se raidit. Son cœur bondit dans sa poitrine. Apprendre que de telles bêtes vivaient si près de Bourg-d'Argent ne le rassurait guère. Il remercia intérieurement Rhamée de l'avoir protégé. Toute cette histoire renforçait sa détermination de tenir secret l'existence des cristaux.
Des croassements résonnèrent au-dessus d'eux. Attirés par une quinte de toux sèche, les corbeaux s'approchèrent de la charrette, là où l'enfant malade se reposait.
— Du balai oiseaux de malheur ! cria Hadvar, en se dirigeant vers le chariot au pas de course.
Le garçonnet était réveillé.
— Comment tu te sens bonhomme ?
Le gamin crachait abondamment du sang entre une expiration bruyante et saccadée. Son état avait empiré.
Hadvar soupira, impuissant face à cette situation. L'aide espérée du village s'était volatilisée dès leur arrivée.
— Laissez-moi l'examiner, dit Démétria qui l'avait rejoint.
Mais bien sûr ! Pourquoi n'y avait-il pas pensé plus tôt ? Les rumeurs disaient que les paladins possédaient quelques capacités curatives, comme soigner les maladies et poisons grâce à leur magie sacrée.
La paladine monta dans le chariot. Le petit garçon de quatre ou cinq ans était recouvert d'une couverture brune tâchée de traces rouges. Elle s'accroupit près de lui et retira un de ses gantelets.
— Comment t'appelles-tu petit bout ?
— Lucius, répondit-il d'une voix fluette.
— Je suis Démétria, une paladine, connais-tu les paladins ?
— Oui.
Il fut pris d'une violente quinte de toux et recracha une gerbe de sang.
— As-tu des parents ou de la famille ?
Il secoua la tête et ses yeux s'humidifièrent après un instant.
— Ne pleure pas, dit-elle d'une voix affectueuse, alors qu'elle lui séchait ses larmes avec le pouce, la Lumière ne t'a pas abandonné. Cette douleur qui te ronge, je vais t'en soulager. D'accord, Lucius ?
L'enfant hocha la tête.
Démétria sourit chaudement et lui caressa la joue. Elle était froide. Il tremblait, aussi. L'épaisse étoffe en laine ne suffisait pas à le protéger du froid. La paladine pria sa déesse. La Lumière lui répondit et une vague d'énergie douce et pure enveloppa le jeune garçon qui arrêta de grelotter.
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Serena
FantasyLes impitoyables armées de la Matriarche dominent la surface du continent de Sancturia. Pour préserver son autorité et empêcher son royaume d'être déchiré par une nouvelle guerre, elle fait appel à ses guerriers saints : les paladins, de redoutables...