chapitre 21

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Toute la nuit j'avais eu cette appréhension : me faire détester par ceux que j'allais aborder. Je ne savais pas vraiment encore ce que j'allais leur dire, mais j'espérais du plus profond de moi que mes mots viendraient tout seuls et me pousseraient dans un long discours ayant un sens. Là était l'une de mes plus grandes peurs : qu'ils ne me comprennent pas et qu'ils me prennent pour une jeune folle prête à être internée.

Pourtant, je devais le faire. C'était une certitude, ma vie ne prendrait un sens seulement une fois que mes pensées auraient été libérées, une fois que je serai plus légère et que j'aurai enfin déclaré au monde entier ce que, de ma courte vie, je retenais.

Je n'avais pas fermé l'œil, j'étais beaucoup trop stressée pour ça, et la douleur de la peur rongeait mon estomac. Je m'étais contentée de regarder Nate dormir et de penser à ce que ma vie actuelle serait si je ne l'avais jamais rencontré. Tout s'était passé si vite, les choses s'étaient présentées comme si elles étaient une évidence pour le monde. Tout était si naturel, si beau, si opposé. J'avais trouvé la perle, la pièce du puzzle qui manquait, et j'en étais fière. Fière parce que j'avais trouvé mon contraire, un contraire que j'avais su plus que tout aimer ; et tout compte fait, contrairement à ce qu'au départ je pensais, les contes de fées existaient. Pas de la même manière que dans les histoires de princesses, non, ils existaient simplement de la manière qu'on les façonnait. Chacun écrivait et vivait son propre conte de fée, celui qu'il avait décidé de mener.

Finalement, il n'y avait que les imbéciles qui ne changeaient pas d'avis, et en un mois de temps, certaines de mes persuasions avaient changés, et ma perception de certains éléments était devenue différente. Je me décidai à me lever et je me dirigeai vers la salle de bain pour me doucher. Il était sept heures trente, j'étais sacrément en avance, ça me laissait le temps de me préparer aussi bien mentalement que physiquement.

Alors, je m'habillai et passai dans l'entrée pour enfiler mes chaussures et une veste légère, puis, j'attrapais une vielle enveloppe et un stylo et j'écrivis un mot à Nate lui disant que j'étais partie à la boulangerie acheter de quoi petit-déjeuner. Je le plaçai sur la porte de ma chambre de sorte à ce qu'il le voit quand il se réveillerait et je sortis de chez moi. Il était huit heures trente-cinq, j'étais dans les temps.

Il ne faisait pas froid, la journée promettait d'être douce, ça semblait idéal pour faire ses aveux. Je ne tardai pas pour autant à l'extérieur. J'achetai deux croissants et deux pains au chocolat et je rentrai pour constater que ma maison était toujours sombre. Je n'avais pas hérité d'un petit ami mais d'une marmotte, la preuve : il était neuf heures et quart et il dormait encore. Je posai les viennoiseries sur la table, lançai la machine à café, attrapai une casserole et une cuillère en bois et me dirigeai à nouveau vers ma chambre. Les réveils en douceur, ce n'était pas mon truc, j'aimais bien embêter les gens au maximum, c'était une autre nécessité que j'avais.

J'entrai, allai doucement vers ma fenêtre que j'ouvris en grand, suivie des volets. La lumière pénétra dans la pièce mais il ne semblait avoir aucune réaction. Très bien, j'allais devoir utiliser la manière forte. Je repris ma casserole et ma cuillère, et sans aucun scrupule pour mes tympans ou pour les siens, je tapai sur le bout de ferraille pour faire un maximum de bruit possible. Sa première réaction : grogner. Des petits mots parfaitement incompréhensibles, vous savez ceux que le monde entier grommelle quand il se réveille. S'en suivit le déplacement de coussin : De sous la tête, à sur la tête. S'il avait pu faire comme dans les cartoons et rentrer le polochon dans ses oreilles, croyez-moi, il l'aurait fait. La prochaine destination du coussin fut le plein milieu de ma tête. Je stoppai immédiatement mon activité sous le choc du projectile que je venais de recevoir et il en profita pour prendre la parole :

- Tu ne peux pas me réveiller normalement, comme le font toutes les petites copines censées ?

Je rigolai et pris l'air de réfléchir.

ProgramméeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant