chapitre 8

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J'avais mal dormi. Tellement mal que des énormes cernes avaient dû se dessiner sous mes yeux. Toute la nuit j'avais ressassé cette image pour moi digne d'un film d'horreur. Cette vision d'une Lynsey toute souriante aux côtés d'un Nate que je croyais jusque-là franc et honnête. Mais apparemment, je m'étais bien trompée sur son cas, il était comme tous les autres de son établissement : faux, malhonnête.

Et s'ils se connaissaient depuis longtemps et que de ce fait, Lynsey avait orchestré notre rencontre à Nate et moi pour me faire du mal ? Pour se venger de toutes ces années où nous avions été dans les mêmes endroits sans pouvoir se supporter ? Et si Nate se moquait en réalité de moi ? Que lui aussi avait une secrète haine envers ma personne, qu'il était en couple avec Lynsey et qu'il voulait la venger de moi ?

En réalité je n'avais jamais rien fait de mal à Lynsey, nous n'avions juste jamais pu nous regarder face à face sans vouloir nous étriper. Les rejets physiques comme on dit, mais c'est vrai que quand on ne sent pas une personne, que l'on n'arrive pas à la cerner, il est compliqué de lui faire confiance ou même de créer une amitié avec elle. Ainsi sont les lois de notre vie à tous.

Beaucoup trop de questions qui tournèrent dans ma tête à mon goût. Elles créèrent une sorte de musique stridente et infernale qui déchira peu à peu mes tympans jusqu'à ce que je m'enfouisse sous ma couette avec comme objectif de ne jamais plus en ressortir. Une mélodie écorchée, brisée, virevoltant tout autour de mon cerveau pour m'embrouiller ou me faire revenir à la réalité : je m'étais emballée beaucoup trop vite, et après l'épisode d'hier soir, j'étais persuadée de ne plus jamais le revoir. Et puis, au fond, je n'en avais plus envie.

J'allais continuer mes promenades du soir, passant toujours par le même chemin que d'habitude mais pour changer, dorénavant, j'allais continuer mon parcours en allant tout droit, sans m'arrêter, continuer sans fin, découvrir de nouvelles choses et de nouvelles rues sans ne plus jamais entendre sa belle voix. Marcher jusqu'à ce que perte de souffle s'en suive, même aller en dehors de la ville, peu m'importait tant que je n'avais plus affaire à lui. J'en avais ma claque de ce petit jeu de « ce soir tu apprends ça de moi et on verra demain pour le reste. », mais j'en avais surtout marre de tous ces soupçons qui tournaient autour d'eux, de ne pas savoir si ce que j'avais imaginé entre Nate et moi était éphémère ou non. Si ce n'était qu'au fond, de simples petits bouts de papiers déchirés, brûlés, pour ensuite en envoyer les cendres dans le ciel afin de ne plus jamais les voir apparaitre.

Puis, étrangement, je me sentis trahie, d'un côté, comme délaissée. Abandonnée seule dans mon petit monde où tout semblait différent de celui que les gens partagent. Je lui avais confié cet univers, et voilà qu'il en faisait des miettes, des petites poussières qu'il laissait s'évaporer dans l'air pour qu'elles ne reviennent plus. Mais après tout, nous n'étions pas amis, juste deux personnes qui se connaissaient par hasard et qui n'avaient rien à voir ensembles, c'était juste moi qui m'étais imaginé des choses impossibles, comme à chaque fois qu'il m'arrivait un événement quelconque. De toute façon, il n'avait aucun compte à me rendre, au fond. Nous n'étions rien mis à part deux lycéens de terminale aimant sortir le soir et habitant dans la même ville.

J'avais été stupide, tellement bête d'avoir cru en lui. J'étais aveuglée par sa beauté et notre première rencontre, et tous ces faits avaient débordé et avaient fait que je lui avais donné ma confiance sans vraiment m'en rendre compte, et que par conséquent, je m'étais confiée à quelqu'un qui pouvait potentiellement connaître celle que je considérais comme mon ennemie. En voilà une leçon dans ma vie, elle m'avait appris qu'au grand jamais il ne fallait se confier aux inconnus, suspects ou non. C'était à présent une nouvelle règle dans ma vie.

Je restai allongée dans mon lit, fixant toujours le plafond vide, l'esprit divagant dans toutes sortes de pensées que l'on pourrait identifier à des lieux, plus ou moins beaux pour chacune d'entre-elles. C'était drôle cette façon que j'avais d'idéaliser les choses de la vie en d'autres objets, à les transformer à travers des sortes de métaphores étranges. C'était peut-être de ça qu'on me parlait quand on me disait que j'avais un « truc » avec les mots, une chose étrange qui m'était propre. Sans doute.

ProgramméeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant