chapitre 19

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J'étais rendue dans cette rue où tout avait commencé. Quand je disais tout, je parlais bien évidement de ma déprogrammation, du jour où j'avais rencontré Nate. Ce soir fut tellement beau, même si j'en avais gardé des cicatrices dues à ma chute sur les pavés ; mais ça, ce n'était rien, ce n'était qu'un petit détail d'une grande histoire. Ce n'était rien comparé à ma rencontre avec Nate. J'étais venue ici pour me changer l'esprit, pour me vider la tête et pour réfléchir sur ma vie. Aujourd'hui, j'étais là exactement pour les mêmes raisons qu'autrefois, seulement, mon passage et la marque que je garderai cette fois-ci, n'allaient pas être les mêmes que la première fois et les autres qui s'ensuivirent. Non seulement parce que Nate n'était pas là, sous un lampadaire, mais aussi parce que mes envies, au fond, étaient autres.

Oublier. C'est de ça que j'avais besoin. Oublier que ma vie avait été jusqu'ici le plus grand des fiascos, oublier que cet homme avait un jour malheureusement fait partie de ma vie ; et pour cela, je ne vis qu'une seule et unique solution, parce que ma tristesse et ma confusion m'empêchèrent de réfléchir à d'autres possibilités. Je savais que ce que j'allais faire était stupide et pas vraiment fameux, et pourtant, comme ce premier soir, mes pieds me guidèrent tous seuls et m'interdirent de les contredire. Alors, je m'approchai de ce bar où Nate avait disparu un soir pour chercher de quoi me soigner, j'ouvris la porte et y rentrai.

Immédiatement, tous les regards se rivèrent sur moi. Je m'en étais doutée, une femme dans un bar, quelle infamie. Pourtant, je m'en fichais d'être là un intrus, je m'en fichais de me retrouver dans un monde qu'habituellement je ne côtoyais pas. Aujourd'hui, peu m'importait de savoir quels regards ils pouvaient poser sur moi ou quelles pensées malsaines ils pouvaient avoir à mon égard, parce que dans ce lieu-ci, nous étions tous égaux. Chacun était là pour une bonne raison : soit pour oublier, soit pour fêter, ou juste pour se satisfaire d'un petit coup dans le nez. Ce fut comme une nouvelle force qui me poussa à dépasser mes limites, qui me dit que là était mon seul choix tant j'étais déterminée et tant mon objectif était clair dans ma tête.

Je m'approchai d'un pas certain du bar accompagnée des dizaines de paires d'yeux qui me fixaient sans me lâcher, et me posai lourdement sur l'un des tabourets vide. J'appuyai mes coudes sur le comptoir, encadrai ma tête de mes mains et soufflai un coup. Bientôt, j'aurais oublié tout ça, mon enfance ne serait plus que trou noir.

« - Qu'est-ce que je vous sers mademoiselle ? Me questionna le barman qui essuyait un verre à bière devant moi.

- N'importe quoi, ce que vous avez de plus fort. Répondis-je.

Il s'arrêta net et me regarda comme si je venais de dire là, la plus grande imbécillité qu'il n'avait jamais entendue.

- Vous ne voulez pas juste un verre d'eau ? Me demanda-t-il.

Je soupirai un long coup avant de me masser les tempes. J'en avais plein la tête, et voilà que maintenant, il fallait que le reste du monde décide de continuer de s'acharner sur moi. Pourquoi était-ce si compliqué d'avoir un verre d'alcool quand on était une fille sans être prise pour une dégénérée ?

- Non, je ne veux pas de verre d'eau, je vous remercie. Donnez-moi une vodka ou je ne sais pas, quelque chose de fort, ça suffira.

Il lâcha à son tour un léger soupir avant de s'en-aller de l'autre côté du bar pour me servir la boisson surprise. J'en profitai pour me retourner et pour regarder autour de moi. L'ambiance était plutôt agréable, au fond, mais je l'aurais plus appréciée si j'étais là pour fêter mon bac ou quelconques autres événements. Toute la décoration, la musique, les gens entre eux me firent penser aux pubs irlandais où tout le monde trinquait avec des verres de bière remplis à plein et où les gens dansaient en ronde sans s'arrêter sur le chant des cornemuses. Oui, j'aurais pu aimer ce genre d'endroit, en fin de compte. Peut-être qu'au final, je m'étais fait un avis trop vite sur ces lieux que je trouvai fort sympathique en ce moment même.

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