Fray (BTS FF)

Chapitre 14

Je regarde Jin couper ma viande en petits morceaux silencieusement alors que tout le monde autour de la table se régale déjà du met préparé par mon frère, Jungkook sont commis attitré et moi, en tant que cuiseuse de riz instantané professionnel. Le bruit des couverts remplit la pièce quand Jin pose mon assiette devant moi. J'attrape maladroitement ma paire de baguettes et commence à manger de la main gauche.

- Le riz doit aller dans ta bouche Nao. Rit Jimin assit en face de moi.

Je lui fais une grimace accompagné d'un bougonnement rauque, faisant rire toute la tablée tandis qu'à côté de moi, Jin s'occupe de ramasser les grains recouvrant la table. Le bruit d'un grincement de chaise me fait quitter mon assiette des yeux, tout le monde suit Taehyung du regard alors qu'il entre dans la cuisine. Il revient quelques secondes plus tard et vient déposer une cuillère à soupe devant moi. Je le remercie d'un sourire alors que tous les rires se meurent, ne laissant plus que de la place pour nos estomacs affamés.

Je suis assise à côté du canapé, à discuter chiffons avec Suga et Jimin quand Taehyung vient vers moi pour la deuxième fois de la journée. Mes compagnons échangent un regard avant de s'éclipser, prétextant une modification à faire sur un futur morceau. J'attends patiemment que le salon se vide, les bras croisés sous ma poitrine, mes yeux bleus plongés dans ceux sombres du chanteur.

- Oui ? Demandé-je pour engager une conversation avec, probablement, celui avec lequel je l'ai le moins fait depuis mon arrivée dans cet appartement.

- On sort ?

Sa voix grave résonne dans la pièce et je fronce les sourcils, ne comprenant pas vraiment le réel fond de sa requête. Je le scrute, cherchant dans son regard une explication à cette soudaine invitation, mais mon petit cerveau ayant beaucoup trop de mal avec l'esprit humain décide simplement de l'ignorer.

- Je préfère rester un peu seule, je n'en ai pas vraiment eu l'occasion depuis ce matin, désolé.

J'attrape mes roues pour quitter la pièce et aller me réfugier dans la salle de danse qui, je le sais, est déserte à cette heure, quand il se place devant moi, me bloquant totalement le passage.

- Sérieusement ? Lancé-je dans sa direction alors qu'il vient attraper les poignées de mon fauteuil. Tu vas vraiment me kidnapper ?

- Probablement. Se contente-t-il de dire en avançant vers la porte d'entrée. Mets ça, il fait frais dehors.

Il décroche la première veste à capuche sur le porte-manteau avant de me conduire dehors. Je l'enfile lors de notre descente dans l'ascenseur qui se fait dans un silence de plomb. Ce silence nous suit même à l'extérieur et ce n'est qu'une fois rendue devant un banc, à quelques mètres seulement de l'immeuble, que j'ose ouvrir ma bouche.

- Pourquoi tu... Commencé-je avant de le voir sortir quelque chose de sa poche.

- Je pensais que tu en aurais peut-être envie. Souffle-t-il en posant, sur mes genoux, mon paquet de cigarettes que Jin m'a confisqué il y a plusieurs jours.

Je reste un instant interdite, à alterner mon regard entre le paquet et celui qui me l'a rendu. Très rapidement, je sors de cet état de latence pour venir allumer l'une d'entre elles entre mes lèvres, profitant enfin d'une dose bien mérité de nicotine.

- Merci. Dis-je simplement en inhalant de la fumée.

Il se laisse tomber sur le banc face à moi et enfonce ses mains dans ses poches, me laissant fumer une bonne partie de ma cigarette avant d'ouvrir de nouveau la bouche.

- Pourquoi tu le rejettes, ton frère ? Jin veut simplement t'aider.

Je comprends alors que c'est sa curiosité et non une simple gentillesse qui l'a pousser à récupérer mes cigarettes dans les affaires de Jin mais malgré tout, je ressens comme une dette envers lui. Après tout, sans lui, je n'aurais pas pu avoir accès à cette chose qui me fait tant de bien avant que Jin se désintéresse de moi, ce qui peut être très long.

- Avec le temps, on apprend qu'il est préférable de ne pas causer d'ennuis aux gens qui comptent. On culpabilise moins quand on se retrouve seule face au précipice, parce que, si, par inadvertance, on trébuche ou que l'on perd l'équilibre, on n'entraîne personne avec nous et personne n'assiste à la chute. Débité-je entre deux taffes.

Un nouveau silence, uniquement brisé par les bruits de la ville, vient nous séparer. Je vois à sa moue qu'il réfléchit à une réponse et j'ai du mal à décrocher mon regard de son nez plissé par cette tâche.

- Oui, mais lorsque tu trébuches et qu'il y a quelqu'un à tes côtés, il y a une chance, aussi infime soit elle, que tu parvienne à rattraper la main qu'il te tend.

C'est à mon tour de me trouver dépourvu face à ces mots. Je passe une main dans mes cheveux et entortille une de mes mèches autour de mon doigt en imaginant la scène. Jin sur le bord de la falaise et moi avec ma maladresse qui glisse. Je tombe et il essaye de me rattraper, j'arrive à m'accrocher à sa paume, mais il n'est pas assez fort, pas assez pour nous deux. Et là, il doit lâcher prise ou alors tomber avec moi. Il ne me faut pas bien longtemps avant de me rendre à l'évidence, il tomberait avec moi sans regret et je le sais, puisque je ferrai pareil pour lui.

- Je trouve ça égoïste, de prendre le risque qu'il tombe avec moi. Les gens ne méritent pas de sombrer pour les erreurs des autres. Embarquer quelqu'un avec soit dans sa vie, c'est prendre des risques injustes, et ça finit souvent très mal pour tout le monde.

J'écrase durement ma cigarette contre le banc avant de jeter mon mégot dans la poubelle adjacente. Je me frotte les mains et ajuste la fermeture éclaire de ma veste, me rendant compte de la légère brise environnante.

- Je te promets de sortir tous les soirs, pour que tu puisses fumer. Finit-il simplement, m'étant fin à cette conversation pour l'instant. Mais Nao, si tu penses que Jin ne tient pas assez sur ses jambes pour te remonter sur la terre ferme, moi, je pense entre être capable, je ne te laisserais pas sombrer.

Je le dévisage alors son retenu, ma bouche entrouverte et la respiration plus courte, mais très vite, je reprends contenance, après tout, je suis la petite sœur de l'un de ses meilleurs amis. Des amis qu'il considère comme une famille. C'est pour le bien de Jin qu'il ne veut pas qu'il m'arrive quelque chose et je comprends, j'aurais fait la même chose si j'avais ce genre de lien avec quelqu'un.

Je le regarde se lever, retrousser ses manches avant de me pousser en direction de l'appartement. Laissant cette pause clope et tout ces mots échanger dormir sur ce banc, attendant notre prochaine venu pour les refaire sortir. Les refaire vivre en quelque sorte.