Fray (BTS FF)

Chapitre 22

Nikita remarque probablement mon état et essaye de me faire réagir en attrapant l'une de mes mèches de cheveux du même blond que lui. Il l'enroule autour de son doigt avant de se pencher à mon oreille.

- Ça fait longtemps, pas vrai ? Murmure-t-il.

Le souffle de sa voix me fait enfin sortir de ma transe, je me dégage de sa prise comme brûlée au fer rouge et tangue sur mes jambes avant de récupérer ma canne. Essayant de trouver une certaine contenance pour lui faire face.

- Qu'est-ce que tu fais ici ? Demandé-je, le visage fermé alors que je fourre ma main plâtrée dans ma poche pour y trouver mon briquet.

- Il faut avoir de l'ambition dans la vie et la mienne m'a conduit à amener mes produits dans ce magnifique pays. Je suis heureux de retrouver des visages familiers dans le personnel.

- Je ne travaillerais pas longtemps pour toi Nikita, une fois ma dette épongée, vous n'entendrez plus parler de moi. Lancé-je d'une voix claire, sans tremblement.

En effet, les tremblements n'apparaissent qu'en entendant les deux garçons éclater d'un rire mauvais et gras. L'allure féline de Minho contraste énormément avec les muscles apparents de Nikita. Minho m'effrayait par sa force tranquille et surtout à travers ses hommes de mains, mais je reconnais la facilité qu'à Nikita pour briser les gens dans ce qu'il m'est arrivé dernièrement. C'est lui qui a demandé à ce que Moscou soit tué et que mon ordinateur soit détruit. Minho ne fait que suivre ses ordres depuis le début et je n'ai pas besoin de réfléchir plus pour comprendre que le russe a du demandé directement à l'étudiant de m'enrôler dans son trafic. Il me surveille depuis plus de temps que je ne l'imaginais.

Leurs rires se meurent et Nikita s'approche de moi. Je contracte la mâchoire en voyant ses mains se tendre vers mon visage. J'en connais chaque aspérité, chaque cicatrice, et ce, depuis mon plus jeune âge. Nikita connaît toutes mes faiblesses, les plus profondes soient elles. Il connaît mon goût pour l'écriture et l'imaginaire, développé dans ma chambre d'hôpital à presque huit ans, quand il m'a lui-même offert un cahier et un stylo pour ce faire pardonner du trou dans mon ventre. Il connaît mon attachement aux chats, m'ayant très souvent vu nourrir ceux errants qui traînaient à deux pas de mon orphelinat. Mais par-dessus tout, il connaissait mon désir de trouver une famille. Pendant longtemps, il a endossé pour moi, petite fille sans repère, le rôle d'un grand frère et ce n'est qu'en rencontrant Jin, sa douceur et son amour pour moi que j'ai compris, j'ai compris que je n'étais qu'un simple jouet et il s'est bien amusé avec moi pendant toutes ses années.

- Tu feras tout ce que je te dis, comme au bon vieux temps Kira. Soufflé-je en caressant ma peau de sa main abîmée.

Un nouveau frisson de dégoût me parcourt, accompagné d'une chaleur émanant de ma cage thoracique. Je bouillonne face à cet homme et à tout ce qu'il représente et pourtant, je reste immobile encore durant de longue secondes, laissant le temps à sa main de se frayer un passage jusqu'à ma poitrine qu'il palpe sans retenu. Seulement, là, je recule et sans attendre mon reste, je prends la porte. Ils ne me retiennent pas.

- La puberté t'a plutôt bien réussie, Kira.

Sa voix résonne dans mes oreilles jusqu'à ce que je retrouve l'air frais de la nuit. J'avance machinalement jusqu'à l'abri bus et dès que mon image apparaît sous les yeux de Taehyung, il saute sur ses jambes pour m'aider à m'asseoir dans ma chaise.

- Ça s'est bien passé ? Pourquoi ça a été aussi long ? Nao ?

Je ne réponds pas à son avalanche de questions, ne désirant qu'une chose, mon lit et ma couverture pour faire disparaître une bonne fois pour toute cette journée maudite. Impuissant face à mon mutisme, le chanteur se met en marche, sillonnant les rues vidées de toutes forme de vie.

Quand nous nous arrêtons à un feu, mon regard, perdu dans le vide, s'attache à mon reflet dans une vitre d'un magasin haut de gamme situé de l'autre côté de la rue. Il y a mon fauteuil et le pansement recouvrant mon nez, mais surtout, il y a ses mains. Partout. Je pince mes lèvres et baisse la tête, retenant difficilement les larmes qui menacent d'envahir mon visage.

Je vois le feu passé au vert du coin de l'œil, mais nous n'avançons pas. Taehyung tire un coup sec sur les poignées de mon fauteuil de sorte à ce que je me retrouve face à lui. Je devine sa présence et sers encore plus les dents. Je ne dois pas craquer, je ne dois jamais le faire, devant personne. Ses mains viennent se poser sur mes cuisses et j'ai un geste de recul, relevant la tête et plantant mes yeux clairs dans les siens. Une fois de plus, je lis en lui comme dans un livre ouvert. J'arrive à distinguer la tempête ayant lieu dans son crâne et je regrette de l'avoir mêlé à ma vie, sachant pertinemment que ce genre d'aléas n'allaient jamais en diminuant. Un ouragan en entraîne toujours un autre.

- Parles-moi ! Merde ! Moi aussi, je veux pouvoir te protéger de tout ça ! Mais pour cela, tu dois me parler.

Son ouragan se mêle à celui ayant déjà lieu à l'intérieur de moi et je n'arrive plus à retenir la pluie qui vient s'échapper de mes yeux. Je prends mon visage entre mes mains et éclate en sanglots sonores, remplissant le monde de mes plaintes. Ses mains quittent mes cuisses pour venir me serrer contre lui. Ma tête s'écrase contre son épaule, laissant son pull absorber le surplus de larme. Sa main droite vient calmement caresser mon crâne alors qu'il murmure de tendres paroles que mes oreilles n'arrivent pas à déchiffrés. Mes bras viennent se glisser autour de sa taille et je m'accroche à lui, découvrant presque une nouvelle fonction vitale dans son toucher.

- Je ne vais pas survivre à ça. Commencé-je, la voix cassée. Mon ancien dealer est ici, à Séoul.

Je marque une pause et Taehyung aussi, dans ses douces caresses.

- Je lui dois beaucoup d'argent Tae, beaucoup trop et il ne va pas vouloir que je le rembourse de manière conventionnelle.

Son étreinte se fait plus forte, me faisant presque mal, mais je ne dis rien et me contente de le serrer à mon tour, ne voulant plus qu'il me laisse. Je ne veux plus être seule.