Par un froid de décembre

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Dimitri s'éveilla en grommelant comme à son habitude, extirpé brutalement des bras de Morphée, lui qui y était si bien installé. Rare que cela fut, il faisait un magnifique rêve. S'en débarrasser fut une tâche plus atroce que cela en avait l'air. Ce qui semblait banal pour le commun des mortels lui paraissait toujours extraordinaire. Dans le bon comme dans le mauvais sens. Quoiqu'il en fût, s'extraire d'un songe dans lequel il possédait tout pouvoir lui procurait un horrible sentiment d'amertume et de mélancolie. Mécontent de cet état similaire à tant d'autres, ses paupières s'ouvrirent lentement, révélant deux pupilles vertes teintées de gris emplies de froideur. A peine éveillé, un air désabusé se peignait sur son visage. Sa conscience revenait à peine que sa prestance le rattrapât et qu'il ne voyait que la tristesse envahir ce monde. Il en venait presque à se demander ce qui le poussait à se relever. Machinalement, ses prunelles se dirigèrent vers son réveil-matin, il vit qu'il était dans les temps et que son programme ne serait pas chamboulé. Pourtant, il était tenté de demeurer inerte malgré ce monstre qui le rappelait à l'ordre. Hésitant, il fixait cette créature métallique qui le sortait si brusquement de ses songes. Maintenant qu'il l'avait dérangé, il valait mieux se lever et accomplir ses projets du jour. Rancunier envers ce réveil qui l'avait tiré de son merveilleux royaume sans pitié, il se leva juste assez pour être assis. Étirant ses membres, son esprit était encore perdu dans le vague. Il n'était pas totalement revenu dans cette obscène réalité. Quand ce fut le cas, il délaissa définitivement son lit pour se diriger nonchalamment vers sa salle de bain.

La pièce qu'il venait de quitter ne différait pas des autres qui composaient son appartement. C'était une grande pièce aux couleurs froides, habillée uniquement d'un mobilier simple et dénué de chaleur. À savoir un lit pour se reposer, des rideaux pour protéger sa pauvre rétine du soleil, une table de chevet ainsi u'une lampe noire et deux armoires qui contenaient ses affaires. Aucune fantaisie n'était présente et aucune touche de personnalité ne détonnait de cet habitat parisien. Si ce n'était ces quelques tableaux qui permettaient de ne pas créer un véritable vide. La salle de bain qu'il rejoignait s'avérait tout aussi classique. Une pièce parfaitement blanche comprenant une baignoire, un lavabo, un radiateur servant également d'étendoir et un miroir. Rien de très éclatant malgré le luxe qui l'entourait. Vivant dans le cœur culturel de la capitale, ce jeune russe possédait les moyens de se loger dans le cinquième arrondissement de la capitale. Pourtant, son environnement demeurait sobre et pratique.

Une fois dans sa douche, il laissa l'eau chaude glisser le long de sa peau, détendant chaque parcelle de son corps engourdi par un réveil encore inachevé. À mesure que son corps s'animait, il en allait de même pour son cerveau qui activait un flot de pensées aberrantes et lugubres. Il passa de nombreuses minutes à dompter ces idées qui partaient dans tous les sens et qui lui dictaient de fuir cette routine qui lui inspirait tant de répugnance. Il nettoya les impuretés de son organisme avant d'éteindre l'eau du jet et de mettre fin à ces pensées qui le tourmentaient. Au moins, il était prêt à endurer cette nouvelle journée qui s'annonçait rude. Il prit beaucoup moins de temps pour enfiler ses habits. Il s'était contenté de revêtir un jean, ses chaussures d'hiver, un pull et un manteau. En ce qui concerne sa coiffure, il avait juste rangé ses cheveux de telle sorte à ce qu'ils ne furent pas trop ébouriffés. Dès que le jeune blondinet franchit le seuil de la porte de son immeuble huppé, la morsure du froid vint s'abattre sur sa peau de porcelaine. Un autre que lui aurait frissonné face à cet air glacial. Ce fut le cas des passants qui coururent devant lui pour se rendre le plus rapidement possible dans un foyer réchauffant et agréable.

Pathétique.

C'était la seule pensée qui lui vint à l'esprit face à cette agitation mue par la force du vent. Il méprisait ces frêles humains qui ne supportaient pas la fraîcheur de cette matinée de décembre. Cet affligeant spectacle ne cessait de le désespérer. Ce constat ne le perturba pas plus que cela, il s'était accoutumé à la bassesse de ce monde. Au lieu de se préoccuper davantage des gesticulations de ces êtres si fragiles, Dimitri avança lentement, profitant de cet air frisquet qui lui rappelait ses terres natales. Alors qu'il effectuait de grandes enjambées, il surplombait la plupart des autres carcasses humanoïdes qui lui parurent si petites et encore plus insignifiantes qu'elles ne pourraient l'être pour quelqu'un de leur taille. À sa grande stature étaient associés des cheveux lisses et coupés courts oscillant entre le blond doré et le châtain clair. Ils étaien assortis à des orbes mi-gris, mi-verts, ainsi qu'à un visage finement sculpté mettant en avant une mâchoire carrée qui contrastait avec ses fins cils. Son teint beige et frais rendait son air impassible un peu moins sévère. Le reste de son corps était saillant et bien proportionné, et ce, à tel point que sa hauteur s'accordait à merveille avec son envergure musculaire. Si bien qu'il ne passait jamais inaperçu.

Hiver de débaucheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant