Hiver de débauche

Mots envolés

Bonsoir, voici la suite des aventures de Dimitri avec le prochain thème : Trouver les mots ! Bonne lecture !

Lorsque le jeune homme blond rouvrit les yeux pour la seconde fois, l'astre solaire éclairait le ciel même si sa luminosité était masquée par les volets du salon. Il en déduisit donc que le reste de la maison demeurait plongée dans les limbes du sommeil. Cela lui indiquait également de ne pas faire de bruit sous peine de se coltiner la rancœur paternelle. Cela ne gênait pas Dimitri, il avait l'habitude de se mouvoir comme un spectre. Ou plutôt, il avait dû acquérir cette habitude. C'était plus une question de survie qu'une véritable volonté de technique. Après un bref soupir, il se redressa légèrement, ce qui lui fit remarquer qu'un plaid recouvrait le long de son corps, ce qui expliquait pourquoi il avait si bien dormi. Rejetant la fine couverture sur le côté, il se mit lentement en position assise car son esprit était encore plongé dans une sorte de brume insondable. De nouveau, sa conscience fut frappée par le délicieux silence qui l'entourait. Cela n'avait rien de normal dans cette demeure qui devenait toujours bruyante et encombrée à l'approche des festivités. Il se permit alors d'apprécier cette absence d'agitation, immobile comme pour mieux en imprégner sa douceur. Cette mielleuse tranquillité trouvait un extraordinaire écho en lui car il avait cru la perdre en revenant en ces lieux maudits.

Apparemment, il avait tort. Quoique cette certitude fut ébranlée à l'instant où il entendit des pas légers avancer sur le parquet du salon. Injustement attaché de sa muette contemplation, l'homme au regard vert-gris se sentit tout de même soulagé de reconnaître la cadence enfantine de ses cadets. Si ça avait été toute autre personne, il aurait trouvé un moyen de fuir de bon matin. Alors qu'avec eux, il n'en ressentait pas le besoin, leur présence lui était toujours agréable. Tandis que les deux têtes blondes avancèrent le plus silencieusement possible, l'un d'entre eux se cogna le pied contre un jouet qui traînait dans le coin. Cela donna une seconde information à Dimitri : un des jumeaux n'avait toujours pas corrigé son infatigable maladresse et il était prêt à parier qu'il s'agissait d'Alexeï. Comme pour lui donner raison, Anton se retourna vivement vers son sosie et le foudroya du regard se faisant violence pour ne pas hurler. De son ton autoritaire, il ne se gêna pas pour le gronder en chuchotant :

« Tu es toujours aussi maladroit ! Je t'ai pourtant dit de faire attention de regarder où tu mettais les pieds ! Si tu continues à faire autant de boucan, tu vas réveiller Dimitri.

— Roh, c'est bon, je sais qu'il faut pas trainer sur les jouets, bougonna le fautif.

— Mais tu continues toujours à le faire et ça cause un bruit monstrueux !

— Oui bah c'est pas ma faute si je suis maladroit.

— T'es un abruti, ouais, siffla Anton entre ses dents.

— Décidément, vous ne ferez jamais espion plus tard vous deux, affirma la voix grave et calme de leur aîné ».

Les deux petits corps se figèrent tels des statues, ce qui amusa Dimitri. À croire que s'ils retenaient suffisamment leur souffle, ils pourraient disparaître. Cela était un prodige impossible, mais les enfants semblaient y croire dur comme fer. Honteux de l'avoir dérangé et d'avoir désobéi à cette simple règle de ne pas le réveiller, leurs regards alternaient conjointement entre leurs pieds et le visage de leur grand frère. Anton était le plus calme des deux, mais Alexeï finit par se basculer d'un pied à l'autre, ce qu'il faisait systématiquement quand il se sentait en mauvaise posture. Ils pensaient sûrement avoir droit à des remontrances alors que Dimitri se moquait de leur intrusion peu discrète. Au contraire, cela égayait sa journée, ce qui était rare ces temps-ci. Après les avoir torturés en restant silencieux quelques instants, il finit par leur demander à voix basse :