A tombe ouverte

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Bonsoir, désolée pour cette publication plus que tardive, mais voici la suite ! Le héros semble sauf, mais est-ce vraiment le cas ? Et bien découvrez-le dans ce chapitre qui suit : Quelques fleurs !


Dès qu'il retournait de l'autre côté de l'Europe, il manquait à cette promesse qu'il avait fait de ne jamais les délaisser dans la solitude. Ils avaient l'un l'autre pour se rassurer, mais il avait peur que ce fût insuffisant. Pris d'une soudaine peur qu'ils ne soient heureux qu'au mois de décembre, pour la première fois, il pensait à ne plus quitter la Russie, jugeant cette option égoïste. Après tout, il ne partait que pour satisfaire son propre bonheur. Il ne s'était jamais inquiété de la souffrance et du malheur que cela pouvait causer à ses benjamins. L'esprit empli de ces sombres pensées, il se laissa plonger dans un sommeil sans rêves. Au bout d'un certain moment, il se tourna sur le côté et là où aurait dû se trouver une petite masse humanoïde, il ne sentit que du vide. En quelques secondes, il ouvrit en grand ses yeux et se redressa. Il grogna en ressentant sa plaie à peine recousue le lancer, mais ce n'était pas important. Son rythme cardiaque se ralentit lorsqu'il vit ceux qu'on lui avait ravis reposer sur les deux fauteuils qui se trouvaient dans la chambre. Il plaqua ses cheveux en arrière en poussant un soupir de soulagement. Cela avait attiré l'attention de sa mère car elle le prévint d'une voix douce :

« Ton père les a déplacés pour que tu puisses bien te reposer. ».

Face à sa mine inquiète, il ne lui offrit qu'un regard froid et méprisant. Le même qu'il lui décernait depuis près de onze ans. On pourrait le croire cruel, voire sans cœur, mais il avait raison de lui en vouloir. S'il poussait sa mauvaise foi à l'extrême, il pourrait penser que c'était de sa faute s'il se retrouvait alité. Sans sa demande plus que foireuse, il serait resté à la maison, bien au chaud, et il n'aurait jamais été embarqué dans cette situation digne des films d'action. Pourtant, il la méprisait pour une raison tout autre. Il ne la haïssait pas, il n'éprouvait simplement aucun amour pour cette femme qui avait négligé ses enfants et qui espérait se racheter. Mais il était trop tard. Peut-être que ses jumeaux pouvaient lui pardonner au vu de leur innocence et de leur candeur. Sauf que Dimitri ne leur ressemblait en rien au niveau du caractère et elle le savait. Au fond d'elle, elle savait que peu importe tous les efforts qu'elle ferait, tous les miracles qu'elle accomplirait pour lui, il ne cesserait d'éprouver de la rancœur à son encontre. Alors, elle qui ne pouvait pas modifier le passé, elle tentait d'améliorer le présent.

Celui où ce fils qu'elle avait nié pendant trop longtemps et dont l'âge même semblait lui indiquer que tout ce qu'elle faisait était vain. Elle avait beau vouloir racheter ses erreurs, elle pouvait avoir toutes les meilleures intentions du monde, rien ne changerait cette époque-là où seul Dimitri garantissait l'unité de leur famille. Ce temps où il s'occupait de nourrisson qui était dépourvu de tout amour et de bienveillance maternelle. Lui qui s'était assuré que cette figure maternelle ne prendrait jamais assez de cachets pour rejoindre le ciel. C'était lui qui avait essuyé les coups d'un père désolé par la perte d'un être cher à son cœur, lui qui s'était assuré que ses cadets conserveraient leur innocence, lui qui avait réchappé à tout cela et qui avait bâti un mental paré à toute épreuve.

Il avait réussi à survivre à tout cela. Et il en était fier, c'était peut-être cela qui animait les flammes de son aversion pour ceux qui, chargés de le protéger, avaient détruit la fin de son enfance. Ils étaient responsables de son malheur, ils étaient responsables de son caractère glacial, incapable de s'attendrir. À quelques personnes ou occasions près. Elle ne se rappelait plus la dernière fois où elle avait vu son premier-né sourire. Sourire pour de vrai. Pas juste pour rassurer ceux qu'il aimait ni pour conserver sa dignité ni pour masquer sa douleur ni pour éviter les pleurs. Non, rien de tous ceux-là... Elle faisait référence à ces sourires qu'il esquissait au moment où la joie le prenait aux tripes et qu'elle chassait toutes traces de tracas en lui. Cela remontait à loin, vers ses six ans ou sept ans, quand tout était encore parfait.

Hiver de débaucheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant