Chapitre 7 - 1

13 0 0
                                    

Shelby ne me lâche pas du regard depuis près de quinze minutes. Mes multiples refus de coopération sont en train de la rendre folle. Bien évidemment l'incident de samedi soir lui a été rapporté par les rumeurs qui circulent et elle me taraude pour savoir qui est le beau brun qui est venu me sauver la mise face à Samuel. Je ne sais pas qu'elle stupide collègue a fait remarquer le comportement d'Emmett à mon amie mais je vais avoir du mal à m'en débarrasser.

Fort heureusement, elle est à mille lieux d'imaginer ce qu'il se passe réellement. Shelby croit que j'ai suivi son conseil et que je me suis trouvé un garçon sans trop d'attaches. C'est en partie vrai, excepté que l'heureux élu est une personne que je méprise en théorie depuis quatre ans. La brune tomberait sûrement des nus si elle était informée de toute la vérité.

« Récapitulons, s'exclame Shelby. Un homme arrive dans ce bar seulement dix minutes après que je sois partie rejoindre Jaxon. Vous fricotez dans un coin jusqu'à ce que Samuel intervienne et ne t'entraîne avec lui. Ton cher ami en vient presque aux mains avec lui pour te défendre et vous disparaissez de la soirée. Ose me dire qu'il ne s'est rien passé !

- Je ne dis pas ça, capitulé-je enfin.

- Mais tu ne veux pas non plus dévoiler son identité.

J'hoche la tête et fais mine de me plonger sur le dossier d'une maison en vente. Malheureusement elle ne se contentera pas de ça.

- Comment oses-tu me cacher ça à moi ? Surtout que d'après Wendy il était carrément sexy.

Shelby avait pris grand soin d'accentuer le « carrément ». Cette petite fouine était incorrigible. Mais à force de ressasser les souvenirs de ce samedi soir, mon bas ventre s'échauffait. Emmett était réellement le mec le plus chaud qui m'ait été donné de rencontrer. Les trois fois où nous avions couché ensemble avaient été merveilleuses.

Le souvenir d'une baise rapide dans une voiture m'assaillit et je ne peux m'empêcher de fermer les yeux sous l'émotion. Il est inconcevable que je passe mon temps à imaginer Emmett me prendre de toutes les manières possibles.

- Haha ! cria ma colocataire, que j'avais momentanément oubliée, d'un ton triomphant. Souvenirs hautement sexuels ! On ne me la fait pas à moi Lenny. J'espère au moins qu'il fait ça bien, mais à ton air béat je devine que oui. »

Je lui jette un stylo à la figure sous ses rires moqueurs, tandis que mes joues virent au cramoisis. Shelby semblait en savoir assez pour l'instant et se concentra enfin sur le compte rendu qu'elle était en train de rédiger sur son ordinateur portable. Je repousse difficilement les pensées gravitant autour d'un Emmett nu et essoufflé pour reprendre ma lecture.

Mais mon répit fut de courte durée, la sonnerie stridente de mon téléphone interrompit mon décryptage des cotes du bâtiment. Lorsque je vis une photographie de ma mère apparaître sur l'écran j'avais déjà un mauvais pré sentiment, l'entente de sa voix larmoyante confirma mes doutes.

« Oh Lenny pourquoi ne m'as-tu rien dis ? pleurniche Azela. Je suis ta mère tout de même !

Je soupire bruyamment, j'avais essayé de repousser le plus longtemps possible cette conversation des plus désagréables et le moment semblait venu. J'adorais ma mère mais elle pouvait se montrer si théâtrale que s'en était fatiguant.

- Te rends-tu compte de la position désagréable dans laquelle tu m'as mise ? J'ai croisé Kirsten dans cette épicerie que j'aime tant, je trouvais son comportement à mon égard vraiment très étrange alors je lui ai demandé ce qu'il n'allait pas. Et c'est à cet instant qu'elle m'a dit que Carter et toi aviez rompu !

Elle s'arrêta enfin pour reprendre son souffle et je me mordis la langue. Ma mère avait vraiment appris la nouvelle de la pire manière qui puisse être. Il ne faudrait que quelques heures pour que Caitlyn et Marilyn ne me contactent à leur tour, inquiètes. Mes deux sœurs aînées m'avaient toujours un peu trop couvert.

- Mais qu'est-ce qui t'as pris bon sang ? Tu ne l'aimais plus ? Il te faisait du mal ? Parce que si c'est ça ton père ira le chercher avec un fusil de chasse !

J'imaginais sans mal mon père confortablement assis dans son fauteuil avec un livre sur les différents présidents des Etats-Unis acquiesçant de loin. Il vouait un culte à l'histoire américaine et lisait tous les ouvrages qui lui tombaient sous la main. Cela faisait de longues années que Victor avait cessé de s'intéresser aux babillages de sa femme.

- Non maman il ne me frappait pas, la rassuré-je soucieuse de ne pas laisser planer de doutes.

- Tant mieux parce que si c'était le cas il faudrait en parler Lenny ? J'ai vu un reportage là-dessus est le meilleur moyen de s'en sortir est de se confier à notre entourage. Enfin bon, toujours est-il que je suis passée pour une sotte auprès de Kirsten et je m'en serais bien passée. Toutes les filles du club de gym doivent bien rire de moi maintenant.

- Je suis désolée maman.

Je ne savais pas très bien pour quoi je m'excusais mais j'avais appris avec ma mère à toujours lui donner ce qu'elle voulait. Elle aimait ses enfants du plus profond de tout son être mais avait toujours cette tendance à tout dramatiser. Et le seul moyen pour Azela de détourner l'attention des problèmes était de les ramener à elle.

Goodrich, le berger allemand de la famille, était mort ? Mais qui allait bien pouvoir l'accompagner pour ses balades matinales maintenant ? Papa perdait son travail ? Qu'allait-on penser d'elle à son fameux club de gym ? Marilyn, sa fille aînée, tombait enceinte à seulement dix-sept ans ? Elle était bien trop jeune pour être grand-mère !

- Quand est-ce que tu viens à la maison ? Tu nous manques beaucoup tu sais ma chérie ? Il ne faut pas que tu restes toute seule ? Tu veux finir vieille fille comme tante Lotti ? Tu ne veux pas donner de nouveaux petits-enfants à ta chère maman ?

Comment faisait-elle pour sauter sans arrêts du coq à l'âne ? Ma mère avait une capacité impressionnante pour monopoliser la conversation, à se plaindre sans pour autant attendre la moindre réponse de qui que ce soit. Dans ces cas-là je la laissais seulement parler jusqu'à ce qu'elle en ait marre ou, dans la plupart des cas, qu'elle ait la gorge sèche.

- Enfin bon, ma chérie, je vais te laisser il faut que j'aille à mon cours de gym. Je ne vais pas laisser de vieilles filles qui n'ont rien réussis d'autres que de toucher leurs orteils me dicter ma conduite ! On t'embrasse fort, et reviens vite nous voir.

- Au revoir maman, je t'aime. »

Azela raccrocha et je soupirai bruyamment. La confrontation aurait pu être pire, la séparation de plusieurs dizaines de kilomètres m'ayant sûrement sauvée la mise. La journée ne faisait que de commencer et je la trouvais déjà abominablement longue. Shelby me jeta un regard rassurant et me promit que l'on ferait la fête pour oublier ça. Mais je me doutais bien qu'elle souhaitait aussi me faire boire afin de m'arracher quelques informations supplémentaires. 

I N I B I T A

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

I N I B I T A

PrimoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant