Chapitre 39

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Mon cœur est en pleine effusion. Toute retenue l'enveloppant commence à céder.

— Tu m'es précieuse, ajoute-t-il en caressant mes joues humides. Tu me sauves tous les jours d'une noirceur qui me dévore de l'intérieur. Lorsque tu es là, je me sens serein ; comme si ton aura avait le pouvoir de me faire renaître en celui que j'étais réellement au fond.

C'est ce dont la reine Clarion avait parlé. Bien que l'entendre me dire ceci de vive voix me touche au plus profond de mon être, qu'ai-je de si spécial pour qu'il se sente ainsi à mes côtés ? Je n'ai rien d'exceptionnel.

— Le regard que tu portes sur moi est le reflet de mon âme. Mais il n'y a pas que ça...

Que peut-il y avoir de plus ? Je ne crois pas que mon cœur puisse en supporter d'avantage... Chacun de ses mots est semblable à un coup porté à son encontre, tant ils me bouleversent. Une lueur pleine de sincérité s'est emparée de ses iris vertes, rongeant toutes barrières que je tentais de me créer.

— Tu m'obsèdes, Keira, avoue-t-il en me lâchant pour entamer une marche des cent pas comme un être tourmenté. Depuis le premier jour tu m'intriguais, et je ne voulais qu'une chose, m'amuser avec toi. Mais au fil des jours j'ai commencé à réellement m'attacher. Je ne sais pourquoi j'avais ce désir de veiller sur toi, te protéger. Ça ne m'est jamais arrivé d'être ainsi avec une fille et ça m'a perturbé... Je ne comprenais pas pourquoi j'étais comme ça, et pourquoi toi. Parce qu'à première vue tu paraissais simple et ennuyeuse...

Quoi ?! Comment ose-t-il ? Sur le coup je ne sais comment prendre cette révélation passant largement au-dessus de tout ce qu'il a précédemment dit. Révoltante, blessante ? Plusieurs émotions s'emparent de mon être sans que je puisse en choisir une ; mais une chose est sûre, je reste profondément outrée.

— Ennuyeuse ?

Je me renfrogne, il éclate de rire en s'approchant à nouveau pour me faire face et placer en douceur ses mains sur mes épaules.

— Mais en réalité, poursuit-il le sourire aux lèvres se voulant sincère. Tu es tout le contraire. Tu es assez attrayante, mais aussi tu es forte et tu as la tête sur les épaules. Tu en as bavé depuis que tu es ici, pourtant tu n'as jamais abandonné. J'aime ça de toi, cette détermination.

Je l'observe en silence, quelque peu touchée par ses mots. Avant d'arriver ici j'étais convaincu du contraire. Fille de bonne famille habituée à faire bonne figure aux Garden Party, il ne me serait jamais venu à l'esprit de partir à l'aventure, pourtant en y étant confronté je ne pensais pas que j'aurais tenu le coup en affrontant toutes ces péripéties de front. Il faut croire que l'instinct de survie existe réellement...

Le courage est présent en chacun de nous, tel un enfant paisiblement endormi après sa berceuse, mais confronté au danger, à l'inimaginable, il se réveil et agit sans se poser de questions. Voici sa force.

— Juste, arrête de te poser toutes les questions qui te taraudent l'esprit, ajoute-t-il en me tapotant le front de son index. Vis comme tu le fais depuis que tu es au Pays Imaginaire. Ce monde a le mérite d'offrir la liberté, il met en lumière ce que chacun s'évertue à intérioriser. Laisse ta lumière éclore, elle s'est déjà imprégnée en moi tant elle est magnifique et pure ; elle ne demande qu'à s'extérioriser d'avantage...

Toutes les supplications faites à mon cœur afin qu'il tienne le coup sont vaines, les quelques remparts restant – déjà affaiblis, viennent de céder lamentablement. Est-ce bien Peter Pan qui me parle ? Si oui, je suis sans défenses face à cet être qui s'empare en douceur de mon cœur.

Ses doigts glissent quelques mèches rebelles derrière mon oreille avant de s'éterniser sur ma joue, de quoi m'affaiblir à son contact. J'enlace sa main de la mienne et l'abaisse – sans pour autant me résoudre à la lâcher ; comme si celle-ci me donnait le courage dont j'avais besoin pour m'ouvrir.

L'Ombre de Peter (Pause / Réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant