VOISINS┃j.sancho (✓)

chapitre vingt-quatre.

Petra et Jadon passèrent un moment agréable depuis une assiette de pâtes. Ils rirent, plaisantèrent beaucoup et discutèrent longuement de toute sorte de sujets. Cela faisait longtemps qu’ils n’avaient pas passé de moments comme celui-ci–du fait de leur dispute, mais aussi de l’omniprésence de Jacob dans la vie de Petra. Au moment de faire la vaisselle, ils se rendirent dans la cuisine toute équipée du footballeur. Le lave-vaisselle de Jadon était en panne depuis quelques jours, alors il devait tout faire à la main. Petra proposa de l’aider, et ils lavèrent ensemble les assiettes. Petra ne pouvait s’empêcher de sourire à chaque fois que leurs doigts se frôlaient quand il lui tendait un couvert à essuyer.

– Je suis désolée de t’avoir traité de sale con, Jadon, Petra fit pendant qu’ils nettoyaient la table où ils venaient de manger.

– Non, c’est bon. Je le méritais après tout ce que je t’ai dit, Jadon décréta, haussant les épaules dans une nonchalance qui lui était devenue habituelle. 

Il ne lui en voulait pas, à croire le sourire bon enfant qu’il arborait sur son visage. Il lui suggéra de manger une glace, ce que Petra accepta grandement. Ils s’installèrent sur le grand sofa du salon, profitant de la chaleur que la climatisation réversible diffusait dans la pièce. Depuis quelques semaines, le temps s’était considérablement refroidi à Dortmund. La période hivernale approchait à grand pas, tout comme les vacances d’ailleurs. Pour Petra, c’était paradoxalement le meilleur moment pour consommer des aliments froids. 

– Alors, comment ça se passe entre Jacob et toi ? Jadon demanda, une fois son pot de glace à la vanille terminé. 

– Bien. 

Petra ne remarqua pas tout de suite qu’elle s’était légèrement crispée à l’évocation du prénom de son petit ami. Le ton que Jadon employa lorsqu’il posa cette question la dérangea, pour une raison qu’elle ne parvint pas à déterminer. C’était juste extrêmement bizarre, et cela la rendit inconfortable. Elle pria pour que le footballeur britannique n’insiste pas plus, mais ce dernier ne semblait pas déterminer à lâcher l’affaire. Au contraire, il arqua ses sourcils, puis un rictus sarcastique incurva ses lèvres. Tandis qu’il se penchait vers elle, lui permettant de s’enivrer de son odeur– et de comprendre pourquoi elle l’aimait tant– elle put distinguer une lueur étrange dans ses yeux noisette :

– Juste bien ? Ce mec est fou amoureux de toi, je pense que les choses doivent se passer plus que bien entre vous, Petra.

– J’imagine que oui, Jadon. 

Petra plissa les paupières, n’appréciant pas la voix teintée de fiel et la proximité déroutante que Jadon cherchait visiblement à créer entre eux. Son changement d’attitude était incompréhensible, comme depuis quelques semaines déjà. Cependant, elle ne fut pas au bout de ses surprises. En effet, Jadon reprit, encore plus intrusif, déstabilisant : 

– Et toi, tu es amoureuse de lui ?

– On sort ensemble, Petra déclara prudemment, ne voulant pas s’aventurer sur ce terrain-là.

Elle ne savait pas ce que Jadon voulait en lui demandant une chose pareille. On aurait dit qu’il cherchait à la piéger, à lui faire dire quelque chose en particulier. Petra le regarda s’humidifier les lèvres, puis les tordre en un sourire moqueur. 

– Ça ne répond pas à ma question. Tu n’es pas obligée d’aimer quelqu’un pour sortir avec lui, l’embrasser et poster des photos de vous deux sur les réseaux sociaux.

Petra se sentit rougir, confuse et chamboulée. Cela ressemblait à une attaque personnelle déguisée sous la forme d’une généralité. La jeune femme s’efforça pourtant d’esquisser un sourire poli.

– Ce n’est pas notre cas, à Jacob et moi. Pourquoi est-ce que tu as besoin de savoir ça, Jadon ?

– Parce que ça m’intéresse, Jadon répondit, comme si cela allait de soit. 

– D’accord, Petra souffla, contrariée. Et toi, tu es amoureux de Margaret ?

Elle cherchait simplement à le piquer, pour lui faire comprendre que toutes ses remarques étaient ridicules. Néanmoins, cela n’eut pas du tout l’effet escompté. 

– Pas autant que je l’aurai cru, Jadon avoua tandis que ses paupières s’abaissait lentement. 

Durant une fraction de secondes, il fixa ses lèvres avec une expression hagarde, comme s’il était envoûté. Trop sonnée par sa réponse, Petra l’observa se pencher vers elle, à la fois paniquée et tétanisée. Elle sentait les battements de son coeur s’affoler, cogner dans sa poitrine à un rythme démesuré alors que leurs souffles se mêlaient. Petra ne parvenait pas à croire ce qui était en train de se passer ; son cerveau hurlait “danger” mais son corps lui interdisait de bouger. Tout paraissait tellement irréel, Jadon respirait fort. Lorsque leurs nez se touchèrent, leurs bouches ne se trouvant plus qu’à quelques millimètres l’une de l’autre, Petra recula aussitôt : 

– Jadon, à quoi tu joues ?

Mais c’était trop tard. Jadon crashait déjà ses lèvres sur les siennes.