• CHAPITRE NEUF •

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- Tu ne veux toujours pas sortir de cette fichue chambre ?, prononce Sam derrière la porte

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- Tu ne veux toujours pas sortir de cette fichue chambre ?, prononce Sam derrière la porte.

Je suis rentrée à l'hôtel il y a maintenant près de trois heures. Je n'ai pas eu le coeur de revenir à la réception affronter les paroles désabusées de Georges. Mon patron toque à la porte depuis cinq minutes et étant en pyjama, le corps enveloppé dans un cocon de couvertures, je n'ai rien trouvé de mieux que de lui répondre en émettant de petits grognements. Je ne comprends pas pourquoi il insiste autant. J'ai juste envie de contempler mes croquis en leur apportant quelques retouches. Est-ce trop demandé un peu de tranquillité ?

- Très bien, je vais m'assoir devant la porte dans ce cas et ce jusqu'à ce que tu m'ouvres. Je vais peut-être même me commander quelques plats tiens. Si tu avais ne serait-ce que la gentillesse de me laisser aller aux toilettes avant ça, j'apprécierais, continue-t-il.

Bon , je crois qu'on repassera pour l'instant calme de ce soir. Je lève les yeux au ciel et décide finalement d'aller lui ouvrir. Il ne risque pas de me laisser tranquille de sitôt autrement.

- Vous ne préférez pas retourner dans votre chambre ?, demandé-je tout baissant mes yeux sur son corps en tailleurs sur le sol.

Mon dieu. Il l'a vraiment fait. Ce n'est pas possible d'être aussi têtu.

- Quand tu arrêteras de me vouvoyer, peut-être, répond-t-il en haussant ses larges épaules. Mais avant, j'ai besoin d'un verre. Viens avec moi.

Il s'empare alors fermement de mon bras et me traîne jusqu'à l'ascenseur. Je tente de me débattre mais en vain. Ses muscles tressaillent sous sa chemise trop serrée et mon cerveau ne trouve rien de mieux à faire que de lâcher prise et de contempler le minimum de sa force se mettre en oeuvre.

- Juste un alors, pas plus.

Il acquiesce d'un large sourire et lâche soudainement mon bras. Oh... dommage, j'aimais bien ce contact. Non Chloé, décidément ! Je vais finir par me mettre une baffe à chaque fois qu'il m'effleure si ça continue. Il faut absolument que je cesse de me laisser divertir par quelqu'un qui me méprise. Sa gentillesse si soudaine ne me fait pas encore oublier le regard qu'il m'a lancé le premier jour, lorsqu'il a entendu qui j'étais.

En arrivant au bar du rez-de-chaussée, je ne fais que sentir les regards sur moi. C'était peut-être une mauvaise idée de mettre mes idées lucides en mode off et de sortir en pyjama. Les femmes, elles, semblent ne voir que l'homme à côte duquel je me tiens. Je remarque alors que ses cheveux sont tout ébouriffés et que ses lèvres sont encore plus gonflées que tout à l'heure. Le haut de sa chemise est ouverte, laissant entrevoir le commencement d'un torse musclé.

- Deux Gin Tonic s'il vous plaît, demande Sam au barman me coupant de ce fait de mes pensées.

Il s'installe ainsi à notre table, deux verres à la main. Je me demande sincèrement ce qui a bien pu le pousser à devenir si soucieux de moi tout-à-coup. Reconnaitre la souffrance chez autrui est une chose mais s'efforcer de lui redonner le moral en est une autre...

- Tu dois probablement te demander ce qui me pousse à faire cela, commence-t-il comme s'il lisait dans mes pensées.

Je le regarde alors plus attentivement qu'il ne faudrait. Tu as toute mon attention, Sam Miller.

- Je n'ai moi-même pas entretenu une bonne relation avec mon père. Je n'en ai jamais eu à vrai dire. Il est parti lorsque je n'étais encore qu'un enfant et n'a jamais cherché à nous contacter, mon frère et moi. Je sais donc percevoir les émotions qui m'ont tant de fois torturé, dit-il tout en portant davantage d'attention à la table qu'à moi-même.

Mais je le comprends. Je n'ai jusqu'ici rencontré personne ayant vécu l'absence d'un père. Il faut dire que je ne me suis jamais réellement ouverte aux autres en étant constamment enfermée dans une bulle de créativité.

- Tu sais, c'est en quelque sorte ce qui m'a poussé à faire ce que je fais, commencé-je en prenant la sage décision, ou non, de lui faire part de mon parcours personnel. Je n'ai jamais eu la chance d'apprendre aux côtés de quelqu'un de présent, m'avertissant des faux pas possibles et m'encourageant de chaque infime réussite. C'est assez difficile d'être une femme lorsqu'on cherche à s'affirmer dans un milieu d'hommes. Et ça, il me l'a toujours fait inconsciemment sentir.

Je pousse un profond soupir tandis que Sam semble à présent boire mes paroles. C'est agréable d'être aux côtés de quelqu'un qui vous écoute. Je veux dire par là qui vous écoute vraiment pour ce que vous dîtes et non pour ce qu'il aimerait que vous prononciez. Et l'alcool ayant déjà traversé tout mon organisme en est probablement grandement pour quelque chose. Peu importe, il a de toute façon déjà assisté à plus que je n'aurais voulu qu'il voit.

- Votre caractère est bien trempé Mademoiselle Jones, vous devriez lâcher prise lorsque tant de choses vous tracasse. Je pourrais vous apprendre..., prononce-t-il d'une voix à la fois rauque et terriblement sexy.

Est-ce mon cerveau qui me joue des tours ou me fait-il très clairement du rentre dedans ? Non, ce doit être la faute des sept verres déjà vides sur notre table. Aucune pensée claire et précise ne me parvient toutefois. Ma tête tourne de plus en plus vite et des fous rires incontrôlables menacent mes lèvres de laisser échapper un son que je risquerais de regretter. Lui, semble en parfait état, les dents encore et toujours parfaitement brillantes... Je fais une fixette sur sa dentition là où je rêve ! C'est décidé, je vais me baffer ici et maintenant.

Alors que je tente de soulever ma main semblant peser plus d'une tonne, je sens soudainement mon corps s'effondrer de tout son long sur la table.

Et de là s'ouvre la porte de l'obscurité parmi les ténèbres.

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