• CHAPITRE VINGT-TROIS •

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Il m'a fallu un certain temps pour me remettre de mes émotions

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Il m'a fallu un certain temps pour me remettre de mes émotions. Je suis restée là, appuyée sur les paumes des mains, face au miroir. Sam a disparu de façon si soudaine que j'en suis restée interloquée. Qu'ai-je bien pu faire de travers pour provoquer un tel comportement ? Je ne cesse de me remettre en question, repassant sans interruption la scène en boucle. Je repense toutefois au fait que je n'ai toujours pas eu ce que je désirais, soit une tenue convenable pour sortir dans un endroit encore inconnu. Je m'empare alors de mes habits de la veille, sans me poser davantage de questions. J'admets ne pas avoir tellement envie de l'appeler une nouvelle fois.

Soudain, le bruit sourd d'éclats de verre se fracassant sur le sol résonnent en écho autour de moi. Je sors précipitamment de la pièce, poussée par une curiosité indéniable. L'homme tendre que j'avais dos à moi il y a à peine quelques minutes tient ses poings crispés au-dessus de la photographie, représentant la femme rousse et le nourrisson, jonchée de morcellements provenant de sa vitre brisée. Ses yeux sont à présent d'un rouge intense, comme s'ils avaient laissé échapper un trop-plein de tristesse. Il se passe alors la main dans les cheveux, balayant de ses pieds le cadre qui se retrouve propulsé quelques mètres plus loin.

- Qu'est-ce que tu me veux ?, clame-t-il sans m'accorder la moindre importance. On ne sort plus si c'est ce que tu veux savoir alors fiche-moi la paix.

Sans répondre, je m'empresse de ramasser les bouts de verre ayant atterri au quatre coins du salon. Sam s'accapare au même moment d'une bouteille de Whisky, me laissant seule face aux souvenirs brisés s'étalant sous mes yeux. Je constate bien qu'il n'a pas envie de parler alors je ne prononce pas un mot jusqu'à ce qu'il s'enferme à double tour dans l'enceinte de ce qui semble être son bureau.

Ma tête se met instantanément à tourner. J'ai besoin de m'asseoir. Peut-être n'aurions nous tout simplement pas dû escalader le mur nous séparant au lieu de creuser notre propre tranchée afin de nous y enterrer côte à côte, entamant de ce fait une relation que n'en vaut apparement pas la peine. Je ne sais ce que j'ai bien pu faire de mal pour provoquer en lui une telle tempête mais le cyclone semble s'être enclenché et rien ne peut l'arrêter. Au risque de me retrouver balayée sur son passage, je préfère m'abstenir. Je me suis déjà bien trop accrochée à la distance qu'ont pu instaurer quelques personnes vis-à-vis moi, en commençant par mon père.

Je décide alors de rassembler le peu d'affaires que j'ai ici et de rentrer chez moi. Je n'ai plus envie de participer à ce jeu aux allures morbides. Je refuse de subir les émotions colériques d'un homme qui ne veut que satisfaire ses envies égoïstes. Je tiens davantage à mon travail qu'à une relation d'un soir.

Lorsque j'empoigne la porte, mes confusions ne se font que plus grandes. Dois-je encore le qualifier de patron ? Notre relation est à vrai dire devenue plus que cordiale... Cette situation est en partie de ma faute, je n'aurais pas dû accepter de rester vivre ici le temps d'une semaine. Lui et moi savons pertinemment que ce n'était en rien dû au travail. Je n'ai pas besoin de me soumettre ainsi pour faire mes preuves. Je me suis laissée emporter par la tendresse de l'instant.

La main toujours sur la poignée, j'hésite un instant à mettre un pied dehors, fixant le bois face à moi comme si je pouvais y trouver une réponse. De nombreux souvenirs de la veille me reviennent soudainement en mémoire. Le corps de Matt contre le mien, le regard de Sam, le fille à la chevelure  d'or et tout droit sortie des magazines... L'alchimie entre lui et moi n'est donc pas un simple songe.

- Reste, s'il te plaît.

La voix de Sam résonne derrière moi. J'hésite un instant à me retourner au risque de ne définitivement plus pouvoir revenir en arrière. Je m'apprête alors à quitter les lieux pour de bon quand, tout-à-coup, sa main vient retenir mon poignet avec une douceur extrême. Mon coeur fait un bond inopiné dans ma poitrine, tandis que mon corps, lui, refuse de lui faire face une nouvelle fois.

- Je suis désolé Chloé, je ne voulais pas réagir comme ça.

- On fait donc comme toi tu veux, c'est ça le fin mot de l'histoire ? Tu claques des doigts et je rapplique ?

Un intense noeud se propage à présent au creux de mon ventre. Cette boule d'énergie négative croissante ne demande qu'à exploser. Je me retourne alors et, à cet instant, toute la colère qui s'était emparée de moi disparait comme par magie. Les yeux de Sam sont encore plus rouges que tout à l'heure, tandis que de fines perles roulent le long de ses joues.

Sans plus réfléchir, je le prends dans mes bras. Les siens m'entourent durement, tandis que son corps se colle au mien comme si celui-ci refusait de me dire au revoir. La bonne décision serait toutefois de partir loin d'ici avant de voir mon univers s'effondrer mais mes jambes refusent de s'en aller. Je suis comme prise au piège au milieu des effluves de parfum, d'alcool et de tendresse, cette dernière balayant les événements d'un revers de la main.

- Pourquoi n'as-tu pas prévenu Chloé ?

Nous nous lâchons subitement face à la voix qui retentit. J'observe Sam, incrédule, lorsque Matt s'approche de l'entrée de l'appartement de son frère. Celui-ci ne cache pas la surprise qu'il a de nous prendre ainsi en flagrant délit. Il ne manquait plus que lui pour couronner le tout... Je vais définitivement devoir dire au revoir à mon stage maintenant que les deux hommes les plus importants de la Maison ont de quoi me faire quitter la partie.

Contre toute attente, ce dernier se jette précipitamment sur son frère, attrapant l'encolure de sa chemise avec une violence inouïe. Je me recule immédiatement lorsque le corps de Sam se retrouve propulsée contre le mur du couloir.

- Tu n'as pas pu t'en empêcher, n'est-ce pas ?, s'égosille Matt sans laisser son frère reprendre son souffle avant de lui donner un coup de poing sur le visage. Tu es vraiment la pire des raclures.

Ce dernier le lâche avec désinvolture contre le sol. Je me précipite automatiquement sur cet homme à terre, à moitié assommé par le mélange non seulement provoqué par le coup de Matt mais également du liquide sombre récemment ingurgité.

- Non mais ça ne va pas !, hurlé-je à mon tour. Qu'est-ce qui te prend ?

- Demande plutôt à ton nouveau petit-ami pourquoi il a gâché ton possible contrat avec Madame Rosewood.

Sur cette dernière bombe, Matt tourne les talons sans même se donner la peine de donner davantage d'explications. Et je comprends alors à quel point je me suis faite avoir en beauté lorsque je sens la pointe de confiance naissante se briser en mille morceaux au-dessus de son corps allongé.

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