• CHAPITRE VINGT-CINQ •

1.8K 187 10
                                    

C'est décidé

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

C'est décidé. J'ai pris mon courage à deux mains tout en envoyant un bref message à Matt afin de le convier à venir boire un verre chez moi. D'un point de vue évidemment strictement professionnel. Il est de toute façon hors de question que, cette fois-ci, je me déconcentre de mon véritable objectif. Dans tous les cas, le frère de mon patron ne m'intéresse pas. Bien que je serais tentée de dire que je ne fais pas les choses qu'à moitié, mieux vaut ne pas s'essayer aux sarcasmes alors qu'il s'est enfuit comme une furie après avoir laissé Sam dans une flaque de sang.

Étrangement, Alda a absolument tenu à rentrer chez elle. Nous n'avons pas eu le temps de parler de la relation qu'elle entretient actuellement avec Harvey. Il faut dire que j'aurais pu chercher à en savoir davantage mais mon pic de motivation est remonté à bloc depuis les dernières paroles de ma meilleure amie. Par conséquent, je n'ai plus qu'un objectif en tête en ce moment même : chercher la racine du problème afin d'établir un plan bien rodé pour me remettre en scelle.

Après avoir rassemblé mes cheveux bruns en un vague chignon, tout en essayant tant bien que mal de lisser ma chemise blanche de mes deux mains, je m'empresse d'ouvrir la porte d'entrée lorsque j'entends la sonnette retentir.

- Salut.

Matt se tient face à moi, les yeux rivés sur ses pieds et les mains dans les poches de son jean's délavé. Je n'avais jamais remarqué à quel point son style différait énormément de celui de son frère. Il possède un air légèrement nonchalant et me fait même penser à un de ces rockeurs que l'on idolâtrait autant pour son art que pour sa beauté.

- Je t'en prie, entre.

Celui-ci s'installe alors sur une des chaises disposées autour de la table de la cuisine, là où j'ai pris soin de disposer deux tasses ainsi qu'une cafetière et une théière. J'ai toujours tendance à en faire trop lorsque je reçois mais il faut dire que cela m'arrive si rarement que je ne sais jamais s'il y a de quelconques règles à suivre en matière de service. On peut en quelque sorte décréter que je suis complètement déconnectée des gestes de la vie quotidienne.

- Je t'écoute, exprime-t-il tout en me questionnant du regard.

Je m'arrête un instant afin de reproduire son geste. Ses cheveux blonds en bataille, sa barbe naissante ainsi que les cernes qui se prolongent jusque sur ses joues creusées lui donnent un air de mort-vivant faisant peine à voir. Mes regard semble me trahir lorsqu'il pousse un immense soupire, se relevant brutalement de l'endroit où il venait de prendre place.

- Écouté Chloé, je pense avoir déjà assez donné de ma personne pour encore subir une de tes indifférences.

- Comment ça ?, le questionné-je, interloquée.

Alors là, je m'attendais probablement à tout sauf à cela. J'ai toujours pensé m'être montrée très polie envers lui, même davantage lors de notre sortie récente... Bon, je me suis peut-être légèrement servie de lui afin de provoquer la jalousie de Sam mais ce n'était pas vraiment volontaire au vue de tout l'alcool qui avait passé les barrières que représentent mes lèvres. Oui, on peut dire que c'était à mon insu dans la mesure où je n'étais plus maitresse de moi-même. Et puis je n'avais quand même pas prévu que mon boss me ramène chez lui !

- Qu'est-ce que tu me veux au juste ?

- Savoir ce qu'il s'est réellement passé avec le fameux contrat dont tu parlais tout à l'heure.

- Tu veux plutôt dire le contrat que Sam t'a ouvertement caché afin de réduire tes chances à néant ?, m'assène-t-il violemment.

- Je n'aurais pas formulé cela de cette façon mais soit, réponds-je quoique bien honteuse lorsque je me remémore le fait qu'il nous ait surpris dans les bras l'un de l'autre.

Son visage se couvre alors d'un épais voile de colère, faisant de ce fait apparaître des plis au coin de sa fine bouche ainsi que de son front.

- À bien y réfléchir, ce n'était peut-être pas la meilleure des idées de te faire venir ici, me rétracté-je lorsqu'il commence à s'approcher de moi à pas de loup.

- Non mais tu te moques du monde là...Tu me fais venir ici, après ce qu'il s'est passé, pour au final me congédier parce que je n'ai selon toi pas le droit d'être en colère ?, se met-il soudainement à prononcer en haussant le ton d'une manière qui m'effraie un tant soit soit peu.

- Ce n'est pas...

Matt coupe alors le commencement de mes paroles d'un brusque geste de la main, un de ceux qu'un chef d'orchestre produirait afin de signaler la fin d'un concert. Sauf que dans ce cas précis, cela ne fait que prononcer la fin de toutes les excuses que je pourrais sortir et qui, à ses yeux, ne s'avèrent pas assez légitimes afin de m'extirper d'une nouvelle situation s'annonçant catastrophique. Peut-être a-t-il cependant raison. Je devrais pour une fois le laisser aller au bout de ses pensées. Il est même probable qu'il incarnait mon signal d'alerte envers Sam Miller et ce, depuis le début.

- C'est quand même dingue qu'un homme aussi ingrat que Sam parvienne à s'emparer de tout ce dont il désire d'un claquement de doigts. Moi qui étais l'un des seuls à ne pas te prendre pour une idiote superficielle, voilà qu'on dirait que je me suis bel et bien trompé. Pourquoi crois-tu qu'il t'a ramené chez lui ? Pour le plaisir de ta compagnie ?, me demande-t-il tout en dégageant un rire emplit d'un sarcasme si profond que cela me fait immédiatement froid dans le dos.

À dire vrai, je ne m'étais pas réellement posée la question. Ses paroles acerbes ne font que toutefois accentuer l'amertume naissante de ce matin. Je n'arrive pas à comprendre à quel moment j'ai attisé, en lui, un tel sentiment de défiance et surtout de méchanceté.

- Il t'a donné l'illusion d'être spéciale ? D'être la seule ? Parce que laisse-moi t'assurer que tu es loin d'être l'unique fille qu'il met dans son lit. Non mais bordel, tu n'as plus seize ans ! Réfléchis un peu.

Mes yeux ont besoin de se fermer, ne serait-ce que quelques secondes. Le sang circule dans mes veines à une vitesse phénoménale, à tel point que j'ai l'impression qu'il va jaillir d'une minute à l'autre accompagné des éclats du peu de sensibilité qu'il me restait jusqu'alors. Dans un ultime élan d'effort, je tente de prendre sur moi sur moi afin de ne pas exploser et hurler comme mon interlocuteur le fait après moi. Je dois absolument savoir ce qu'il s'est réellement passer.

- Ma patience a des limites Matt. Je n'ai pas besoin que l'on vienne me faire la morale pour un oui ou pour un non. Alors dis-moi simplement ce qu'il s'est passé vis-à-vis de ce contrat, exprimé-je bien plus calme que je ne le souhaiterais.

En réalité, mon esprit s'était imaginé cette même phrase criée, à gorge déployée. Son comportement n'est que la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Je sers fermement mes poings, si fort que mes longs ongles parsemés de rouge ne font que davantage s'enfoncer dans les paumes de mes mains moites.

- Emma Rosewood a appelé Sam hier soir afin de discuter d'un éventuel contrat à établir entre l'entreprise et elle, avec toi comme chef de projet. Il aurait apparemment accepté avant de lui poser un lapin dont il t'a fait porter le chapeau, conclut-il le souffle court et le visage crispé sous le poids de la fureur, avant de brutalement claquer la porte d'entrée.

Le vertige me prend soudainement. J'ai besoin de m'assoir avant de m'effondrer d'une minute à l'autre. Je ne peux pas croire que c'est avec elle que nous aurions dû aller. Je comprends maintenant pourquoi il a mis un point d'honneur à ne pas me communiquer le moindre détail quant à cette fameuse soirée. Et ce qu'il s'est passé dans la salle de bain... Rien de tout cela ne comptait à ses yeux. Je pensais être prête à jouer tandis que lui était tout simplement prêt à m'écraser.

Game over, Chloé.

Obsession Où les histoires vivent. Découvrez maintenant