Chapitre 20 (suite)

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***

Tandis que nous sommes assis dans la grande salle à manger du chalet, le ton monte entre Loran et moi.

— Tu commences vraiment à me mettre les nerfs pour du vrai avec tes principes et tes décisions, là ! Tu décides de rien, ici ! T'as compris ? hurle mon oncle à bout.

Une engueulade de plus se dessine à l'horizon. J'aime le défier, parce que je sais qu'il est sur le point de craquer. Il ne peut strictement rien me reprocher, car je continue de lui verser le fameux loyer pour vivre sur le camp et il n'a pas les moyens de connaître avec précision toutes les recettes de mes manœuvres en dehors de mon travail officiel. Tito ne me trahira pas, j'ai confiance en lui. Loran a émis plusieurs fois ses doutes, mais sans preuve, il demeure impuissant. Les conflits au sujet de la réversion augmentent jour après jour et je ne peux que constater avec joie qu'il perd sa notoriété de chef. Mes insinuations durant l'hiver commencent à porter leurs fruits. Mon but principal est de lui faire cracher tout ce qu'il garde secret, qu'il me lâche enfin ce qu'il a sur le cœur. Je le lis dans ses yeux exorbités, dans son haleine qui pue la viande pourrie, sur son front ridé, dans ses doigts qui tremblent. Alors je marmonne une ultime provocation, juste assez fort pour qu'il l'entende.

— Si tu le dis, assassin...

Cependant, je n'avais pas prévu qu'il trouve du renfort auprès de quelques cousins restés a priori dans la cuisine et qui le craignent encore. Ces derniers se positionnent derrière lui pour montrer leur soutien au vieux chef qui en profite pour hausser la voix et me menacer du poing. De mon côté, je demeure droit et inflexible sur ma chaise.

— Mais, tu m'énerves, maintenant ! Faut que j'te le dise comment ? Je l'ai pas tué ton père, sinon, j'aurais été en prison ! Alors maintenant, écoute-moi bien par contre...

Tout le monde, y compris moi, est soudain surpris par l'assaut de Diabla qui m'attendait dehors. Elle aboie sauvagement en direction de mon oncle, obligeant les cousins qui viennent de sursauter à reculer d'un pas. Elle sait bien qu'elle n'a pas le droit d'entrer et a dû profiter de l'arrivée de Paco pour s'introduire dans la pièce avec lui. Le poil hérissé, elle se positionne devant Loran, à côté de moi, et montre les dents en grognant avec hargne, comme un loup le ferait. Avec elle, mon oncle et sa bande ne me font pas peur du tout, je n'ai qu'un mot à dire pour qu'elle attaque. J'hésite un instant, cela lui ferait les pieds à ce gros porc.

Chaque personne présente a les yeux rivés sur ma chienne qui est devenue mon bouclier. Son soutien me donne un peu plus d'assurance et je l'utilise pour continuer à pousser Loran à bout.

— Tu ne l'as pas tué, mais tu l'as aidé à se flinguer !

— Ferme ta gueule ! Tu sais pas ce que tu baves. Ici, je commande ! Donc tu paies ce que tu me dois ! Sinon, tu prends ton chien et tu dégages !

Il me répond avec beaucoup de méfiance, sans hausser le ton pour ne pas affoler Diabla qui émet toujours des petits grognements. Il veut m'imposer ses règles, mais il est hors de question que dorénavant je me plie. Je n'ai plus peur.

— Scar, on y va ! intervient Paco pour éviter que la dispute soit irréversible.

Il tapote plusieurs fois mon épaule et insiste pour que je sorte.

— Va te faire voir ! je lâche en direction de Loran.

Merde, une fois de plus, il a tout ramené à ce satané fric. Je me recule d'un coup et fais tomber ma chaise dans un grand fracas en me levant. Je la laisse giser à terre. Je suis en colère, j'ai encore échoué. Je siffle Diabla qui vient aussitôt se placer à côté de moi et me suit vers l'extérieur.

SCAR - Pour le plus grand malOù les histoires vivent. Découvrez maintenant