Tome 2 - Chapitre 8

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Yankee est le premier à retrouver sa femme et à rendre visite à sa fille, mais très rapidement il ressort les mains dans les poches de son jogging.

— Tout va bien ? l'interroge Paco, un poil inquiet qu'il réapparaisse si vite.

— Oui, elle est dans sa chambre maintenant. Elle veut te voir ! me lance-t-il en s'approchant de notre groupe, toujours réuni sur le parking.

Je jette ma cigarette par-dessus les voitures, termine ma bière d'un trait avant de faire signe à mes frères de me suivre. D'un geste de la main, Yankee les arrête.

— Seul ! précise-t-il. Chambre 306.

Loin d'être jaloux, Tito et Paco ne s'offusquent pas de l'invitation et de mon rapport privilégié avec Picouly. Au contraire, ils préfèrent se consacrer à démarrer la fête et arroser la naissance en ouvrant une nouvelle bouteille.

Les mains dans les poches, je passe l'entrée et longe l'étroit couloir aseptisé qui sent l'alcool et les désinfectants. Deux jeunes infirmières dans leurs tenues blanches, âgées d'une vingtaine d'années, arrivent face à moi et me font les yeux doux.

J'en profite pour m'arrêter face à elle et leur demander en prenant mon regard de séducteur :

— Pouvez-vous me dire où est la 306, s'il vous plaît ?

Amusées, elles me sourient et se tournent pour m'indiquer une chambre à proximité. Je me passe la main dans les cheveux et les remercie d'un clin d'œil.

La porte est ouverte et je découvre Picouly, les traits tirés, sans maquillage, assise sur son lit, serrant contre elle un bébé au crâne velu. Elle qui est si active et dynamique, je n'ai pas l'habitude de la trouver ainsi posée. Je suis ému de distinguer chez ma sœur la satisfaction d'être mère et l'affection qu'elle porte déjà au nouveau-né.

— Tu crois que je t'ai pas vu faire ton numéro aux infirmières... m'attaque-t-elle en souriant.

Je hausse les épaules et referme la porte derrière moi avec précaution pour ne pas réveiller le bébé qui dort.

— J'espère que tu respectes les filles ! me lance ma sœur en me défiant.

Je lève les yeux au ciel, je n'ai pas envie de recevoir ce genre de remontrances, surtout après l'épisode de Belinda. Peut-être est-elle au courant de mon aventure avec la femme de mon cousin.

Je m'assois sur le lit près de Picouly et contemple ma nièce qui dort paisiblement, bien calée dans les bras de sa mère.

— Tu veux la porter ?

Je refuse instantanément, j'aurais trop peur de lui faire mal ou de la faire tomber et surtout, je ne saurais pas comment m'y prendre.

— Tu peux, ça t'apprendra pour quand ça sera ton tour...

Son regard accusateur m'indique qu'elle est au courant, je me demande immédiatement comment elle l'a su. Je ne pense pas que Paco ou Tito aient pu raconter mon aventure avec Belinda. Il y a des choses que nous les hommes nous gardons pour nous, coûte que coûte, ce genre d'affaires nous regardent. Je préfère ne rien répondre, pour ne pas lui donner l'occasion de continuer cette conversation.

Elle soupire puis se penche pour poser le bébé emmailloté de layette rose dans son couffin transparent. J'observe du coin de l'œil ses gestes tendres et ses yeux débordants d'amour. Picouly est un sacré bout de femme, au tempérament affirmé bien caché derrière ses faux airs doucereux.

Elle tend une main vers mon visage et me caresse affectueusement la joue.

— Scar, on fait tous des bêtises, mais on les paie toutes un jour ! Tu peux pas offrir ton petit à Bastian ! Belinda sera une bonne mère.

Je jette un coup d'œil vers la fenêtre d'où je peux distinguer mes frères au milieu de nos cousins. Bastian est appuyé contre sa voiture, son regard noir et son sourire en coin me donnent la chair de poule. Je le hais toujours autant et j'ai enfin trouvé le moyen de me venger à la hauteur de ce qu'il m'a fait endurer.

— Ma décision est prise !

Je me dégage la main tendue de Picouly et me lève brusquement.

— Scar, attends ! J'ai eu une vision...

Je me tourne vers ma sœur, surpris de sa confession et je me souviens de Nona qui m'avait donné toutes les clefs concernant la mort de mes parents.

Picouly attache ses cheveux en chignon et tire sur le drap qu'elle remonte sur sa chemise de nuit fleurie, puis elle continue en me regardant droit dans les yeux.

— J'ai vu le serpent, sur toi. Il était plus épineux qu'un cactus ! Tu sais ce que cela signifie ?

Je secoue la tête sans quitter l'extérieur. La bande de gitans qui entoure Yankee semble unie et heureuse de partager cette nouvelle vie dans la famille.

— Il y a un traître dans ton clan ! Tu dois te méfier !

Un traître ? Je ne comprends pas vraiment à quoi ma sœur fait référence, si ce traître est en lien avec ma famille ou avec mes affaires.

— Depuis quand tu as des visions ?

— Très longtemps. Nona m'a transmis son don.

— Prends soin de ton bébé. Ne t'inquiète pas pour le reste. Je vais m'occuper de cette histoire, tout va bien se passer.

J'embrasse rapidement Picouly sur le front et je sors sans un regard pour le bébé qui commence à chouiner.

En marchant, je fais l'inventaire des personnes les plus proches qui s'investissent dans les affaires et j'écarte sans hésiter mes frères et Yankee. Il est impossible qu'ils me trahissent.

Sur le parking, toute ma famille nous a maintenant rejoints, ils vont tous défiler les uns après les autres dans la chambre 306. Stazek et Karlo sont également présents. Ils m'ont largement prouvé leur fidélité depuis des années. Le traître dont Picouly a rêvé ne peut être que Bastian, je ne vois personne à part lui et je dois redoubler de prudence sur nos futurs plans quand il est dans les parages.

SCAR - Pour le plus grand malOù les histoires vivent. Découvrez maintenant