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         Azilis

Ce dernier mois, le plus long de toute ma vie, me semble-t-il, n'a été que vide, tristesse et souffrance. Lorsque Tiago est parti, j'ai cru que l'on m'avait arraché une partie du cœur. Ce n'est évidemment qu'une image, mais c'est ainsi que je l'ai ressenti.

J'ai passé mon temps à écrire. Les moments que Tiago et moi avons passé ensemble étaient une bonne source d'inspiration. Mon mal être également. J'ai noirci des pages et des pages de traitement de texte, sans même savoir vers quoi cela me menait. Cependant, exprimer toutes mes pensées et mes sentiments par écrit me faisait du bien. Sur le moment, j'avais encore l'impression que Tiago était là, tout près de moi, affalé sur le canapé sur lequel il dormait, ou sortant torse nu de la salle de bain, le corps encore humide. Même lorsque je faisais la cuisine, j'avais l'impression qu'il se tenait à mes côtés.

Un conseil que m'avait donné ce psy que mes parents m'avaient obligée à consulter. Je devais lui parler, lui raconter ce qui n'allait pas. Comme s'il ne savait pas. Mes parents le lui avaient dit avant même que ne commence ma première séance. Bref, il avait compris que j'avais des difficultés à m'exprimer à l'oral et m'avait conseillé d'écrire mes ressentis, sur des pages de brouillons ou sous la forme d'un journal intime. Il m'avait laissé le choix. L'objectif étant de mettre des mots sur tout ce que je ressentais et ne réussissait pas à exprimer. Et cela m'avait aidée. Encore aujourd'hui, j'ai gardé cette habitude d'écrire tout ce qui me passe par la tête. Une fois mes pensées écrites noir sur blanc, elles ne tournent plus en boucle dans ma tête en permanence. Elles sont toujours présentes, bien entendu, mais bien moins obsessives, ce qui est déjà énorme.

Kieran, sachant ce que je traversais, m'a informée qu'il rejoignait Tiago en compagnie de Nina, début août. Il m'a alors proposé de les accompagner. Oui, je voulais le revoir, mais comment lui pardonner d'être parti ainsi ? J'en ai parlé à Youna, la seule à qui je pouvais me confier sans crainte.

— Tu ferais quoi, toi ? lui ai-je demandé un soir où elle était passée me remonter le moral.

Nous étions toutes deux assises côte à côte sur mon canapé. La télé était allumée mais nous n'y prêtions attention ni l'une ni l'autre.

— Franchement, t'as rien à perdre. Et puis, c'est flagrant qu'il te manque. Y a qu'à voir ta tête ! m'a-t-elle dit en m'ébouriffant les cheveux.

— Oui, bien sûr qu'il me manque. Jamais personne ne m'avait autant manqué. Mais ce qu'il a fait, sérieux, comment lui pardonner ? me suis-je plainte.

Youna soupirait, visiblement mal à l'aise. Je sentais que ce qu'elle allait me dire allait changer ma façon de voir les choses, mais je ne pensais pas à ce point.

— Ecoute, Azilis. C'est de ma faute s'il est parti.

— Quoi ? Comment ça, ta faute ? Qu'as-tu fait ? Qu'as-tu dit ?

J'ai inondé ma meilleure amie de questions. J'avais seulement besoin de comprendre. Youna a pris une profonde inspiration et s'est lancée dans un monologue, m'expliquant en détail les événements qui avaient poussé Tiago à partir sans se retourner.

— Ce matin-là, t'étais partie rejoindre Yaël, souviens-toi. Il m'a appelée pour savoir où tu étais et je lui ai dit où et avec qui tu étais. Ça lui a fait beaucoup de peine. Je l'ai entendu, rien qu'au son de sa voix. Du coup, je lui ai proposé de se voir et il a accepté.

— Je ne vois pas le rapport avec son départ, l'ai-je coupée. Viens-en au fait s'il te plaît Youna.

— Oui, je sais, j'y viens, m'a-t-elle répondu en regardant fixement ses mains. Je lui ai dit que s'il restait, tu ne changerais jamais ta façon de le voir et de te comporter avec lui. Le seul moyen pour que tu ouvres les yeux, c'était qu'il te manque. Et...

Inaccessible Bretonne Tome 2 (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant