Tiago
Azilis s'obstine à nier l'évidence, toujours assise sur le siège conducteur de sa voiture, les larmes aux yeux. Et pourtant je suis certain qu'elle est envahie par un profond sentiment de jalousie. Me voir avec Rozen l'a touchée bien plus qu'elle ne voudra jamais l'admettre. A moi de tout mettre en œuvre pour qu'elle se livre enfin, même si je dois la pousser dans ses derniers retranchements.
Enfin, peut-être ne pas trop la pousser. La voir en larme à cause de moi me brise le cœur. Je dois pourtant savoir ce qu'elle pense, ce qu'elle ressent. Je suis devenu important pour elle au fil des semaines, je le vois bien. Elle me le montre chaque jour. Dans ce cas, pourquoi ne pas me dire enfin ce que je crève d'entendre.
— Azilis, réponds-moi. Qu'est-ce que tu as ressenti lorsque tu m'as vu avec Rozen ?
Elle sursaute presque en entendant le prénom de son amie. Me fixant de ses yeux rougis par les larmes, elle semble hésiter à me répondre, réfléchissant à ce qu'elle pourrait bien me rétorquer. Elle se tortille les doigts, signe d'anxiété.
Je commence à lire plus facilement son langage corporel. Heureusement puisque la communication verbale n'est pas son fort, surtout pour les sujets sensibles tels que ses sentiments. Ses cauchemars sont encore plus délicats à aborder. Je ne pense pas que j'aurais des réponses à toutes les questions qui traversent mon esprit avant longtemps, voire très, très longtemps. Mais je ne perds pas espoir. Un jour viendra où toutes ses barrières cèderons, elle me dira alors tout ce que j'ai besoin de connaître sur son passé.
Ce jour n'est pas encore arrivé. Je continue de la fixer, ses larmes coulent toujours le long de ses joues si douces, avec moins de violence tout de même. Lors de mon arrivée, un torrent inondait ses joues, à présent un simple ruisseau survit. Je m'en veux. Tout est ma faute.
Elle fixe un point dans la nuit, loin devant elle. L'éclairage public, bien que faible et vacillant, permet de distinguer les voitures garées le long de la rue ainsi que les silhouettes de quelques personnes marchant sur le trottoir. Je tente de d'apercevoir ce sur quoi son regard est bloqué depuis de trop longues secondes, mais je ne discerne rien dans la nuit. A-t-elle vu quelque chose ou quelqu'un ? Ou cherche-t-elle simplement à me fuir ?
A aucun moment Azilis ne croise mon regard, elle y lirait pourtant tous les remords qui m'assaillent depuis que je l'ai retrouvée assise seule dans sa voiture, les yeux rougis de larmes.
Après plusieurs minutes de silence, elle se décide à m'adresser la parole.
— Ça m'a fait mal, voilà, t'es content ? C'est ça que tu voulais entendre ?
Ces mots me déchirent le cœur, tout autant que les larmes qui se remettent à déferler de plus belle sur ses joues. Oui, c'est cela que je voulais entendre, oui je voulais qu'elle me dise qu'elle avait ressenti la même souffrance que celle que j'éprouve lorsque je la vois dans les bras de Yaël. Mais maintenant, je me rends compte que cela n'avait pas une grande importance.
Je n'avais aucun besoin de lui infliger cette vengeance de bas étage. Quand j'analyse le comportement que j'ai eu ce soir, j'ai la désagréable impression d'être de retour à l'école primaire. Vous savez, lorsque nous nous disputons ou nous battons avec nos camarades de classe pour des broutilles. Cela n'a aucun sens. Je ne suis plus un gamin, même si je viens de prouver le contraire.
L'état dans lequel se trouve Azilis est la pire des tortures, et j'en suis le seul fautif. La voir ainsi tourmentée est bien plus insupportable que de la voir avec Yaël. A quoi donc avais-je la tête, ce soir, en embrassant Rozen. En plus, cette fille ne m'intéresse aucunement. Elle est agréable à regarder, certainement sympathique, mais ne prendra jamais la place qu'Azilis s'est frayée dans mon cœur et mon âme.
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Inaccessible Bretonne Tome 2 (Terminé)
Romance« Je ne veux plus jamais tomber amoureuse, c'est fini. Mon cœur est mort à l'intérieur. Des années que je suis devenue insensible et ça me va très bien comme ça. » Voilà où en sont les résolutions d'Azilis. Mais c'était sans compter sans ce mystérie...