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Tiago

Un mois s'est écoulé depuis que j'ai lu la lettre d'Azilis, m'expliquant l'enfer qu'elle a vécu. Elle était alors persuadée que je lui en voulais, que j'allais la délaisser, la quitter. J'ai beau être toujours aussi présent et patient avec elle, elle doute encore quelquefois de mes sentiments. Je la retrouve alors seule, les yeux rivés sur son écran d'ordinateur, tapant rapidement sur le clavier ses pensées les plus intimes.

Je ne suis pas fier de moi sur ce coup-là. La curiosité a été la plus forte. Un soir, après lui avoir fait l'amour et qu'elle se soit endormie, j'ai ouvert son ordinateur afin de faire quelques recherches sur internet. Une page de traitement de texte était restée ouverte et je n'ai pas pu m'empêcher de la lire.

Azilis avait inscrit ses émotions, qu'elles soient bonnes ou mauvaises. Tout ce qu'elle a ressenti depuis que nous nous sommes rencontrés. Toutes ses impressions, tous ses sentiments étaient étalés là, noir sur blanc, devant moi.

J'ai passé toute la nuit à lire ses écrits, les larmes aux yeux ou le sourire aux lèvres, selon les passages qui défilaient devant mes yeux. Certains m'ont bien évidemment marqué plus que d'autres. Mon préféré, celui qui m'a ému aux larmes et a rempli mon cœur d'amour, c'est ce moment magnifique où elle décrit qu'elle tombe amoureuse de moi sans pourtant prononcer les mots aimer ou amour. J'ai tellement lu et relu ces mots que je les connais par cœur. Elle les a écrits lorsque nous étions séparés. Immédiatement, ses paroles me reviennent en mémoire sans que j'aie besoin d'y réfléchir, les mots s'impriment d'eux-mêmes dans mon esprit.

Tiago est parti, il m'a abandonnée. Il me manque. Tellement. Ce sentiment de manque est si poignant, si prenant que je peine à respirer. Une boule s'est formée au fond de ma gorge, m'empêchant de prendre l'air dont j'ai besoin. Les larmes maculent mes joues, laissant des trainées salées dans leurs sillages. Mes yeux rougis d'avoir tant pleurer ont des difficultés à voir l'écran de mon ordinateur et mes doigts qui s'activent sur le clavier.

Tout ce que je sais, c'est qu'il n'est plus là. Et j'ai tant besoin de lui, de sa présence, de ses paroles douces et rassurantes. Il a toujours été d'une patience infinie envers moi, d'une telle douceur et toujours si compréhensif.

A un moment, j'ai bien cru que toute cette tendresse émanant de lui aurait raison des remparts que j'ai érigé si difficilement autour de mon cœur. Mais en fait non. Il est parti trop vite pour réaliser pareil exploit. Il a seulement effrité cette muraille, l'a ébréché par endroit. Le mur est toujours là, moins imposant, certes, mais toujours présent.

A certains moments, je me dis qu'il a bien fait de partir. De me laisser maintenant, alors que je peux encore me reconstruire. S'il était parti plus tard, une fois qu'il aurait brisé l'intégralité de ma carapace, je ne m'en serais pas remise. J'en suis sûre.

De toute façon, tôt ou tard, il serait parti. Il n'aurait pas supporté mes dérives, les choses que j'ai laissées faire. Il m'aurait quitté. Alors vaut mieux maintenant que plus tard.

J'ai beau me répéter ça en boucle - vaut mieux maintenant que plus tard – ça ne me réconforte pas. J'aurais tant souhaité qu'il reste. Qu'il soit là, près de moi.

Je me reposais beaucoup sur lui, certainement trop parfois. Je me souviendrais toujours de son regard sombre, empli d'inquiétude, lorsqu'il m'a réveillée de mon cauchemar. Lorsqu'il m'a ramenée à la réalité avec ses paroles si douces, sa voix rauque et ses yeux débordant d'amour.

Il aurait été égoïste de ma part de le garder près de moi. Je ne peux pas lui apporter ce dont il a besoin. Il l'a bien compris. Il l'a compris bien assez tôt. Heureusement pour nous deux.

Inaccessible Bretonne Tome 2 (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant