Inaccessible Bretonne Tome 2 (Terminé)

10

Tiago

Des larmes me piquent les yeux. Je tente de les retenir, ne souhaitant pas qu'Azilis me prenne pour un faible. Dès qu'elle s'en est aperçu, elle s'est figée, pareille à une statue. Je détourne le regard, et fixe distraitement le feu. Une larme se détache et roule lentement sur ma joue. S'en apercevant, Azilis tend immédiatement sa main vers moi et essuie la larme de son pouce, dans un geste d'une intense délicatesse, d'une infinie tendresse que je ne lui aurais jamais soupçonnée.

— Ne pleure pas Tiago, je n'en vaux pas la peine.

Comment peut-elle dire de telles inepties ? Je suis médusé de constater le peu d'estime qu'elle se porte. Lire dans son regard émeraude qu'elle ne ment pas et pense chaque mot ne fait qu'augmenter mon chagrin. Ce n'est pas ainsi que je réussirais à tarir les larmes qui ne cessent d'affluer.

— Ne dis pas ça, ma belle. Tu vaux bien plus encore. Tu n'imagines même pas la valeur que tu représentes à mes yeux.

Si seulement elle savait qu'elle est tout pour moi. Que je me sens enfin vivant lorsque je suis à ses côtés mais si vide lorsqu'elle s'éloigne de moi.

— C'est ce que tu dis, mais je vois bien ce que je te fais endurer. Regarde-toi, la larme à l'œil, par ma faute.

Afin de la contredire, j'esquisse un début de sourire mais celui-ci sonne encore plus faux que je ne le pensais possible, et s'évanoui aussi vite qu'il est apparu. Les larmes me brouillant considérablement la vue.

— Triste que tu veuilles m'abandonner, oui, c'est la vérité. Reste près de moi Azilis, je t'en conjure.

Au dépourvu, hésitante, elle acquiesce avant d'essuyer une autre larme dévalant ma joue, suivant le même trajet que la précédente. Je n'en reviens pas qu'elle ait fini par céder. Un léger sourire se dessine sur mes lèvres, répondant au sien, tout aussi faible, mais sincère cette fois-ci.

— Vas-tu vraiment rester ? Où est-ce seulement un moyen pour toi d'apaiser mes craintes ?

Je l'interroge, anxieux de sa réponse. Si elle se dérobe, maintenant que l'espoir grandit en moi, je ne suis pas certain de pouvoir y survivre. Plus le temps passe et plus je ressemble à un adolescent boutonneux encore puceau. Face à elle, je me sens vulnérable, faible et loin d'éprouver la moindre fierté de ce que je suis ou étais. En fait, je ne sais plus qui je suis. Je me croyais fort, courageux et indomptable. Je ne suis jamais tombé amoureux. Oui, j'ai eu de nombreux flirts, je ne m'en cache pas. Et j'aimais bien les filles avec qui je suis sorti. Sinon, soyons honnêtes, je ne serais pas sorti avec elles. Mais je ne les ai jamais aimées au point d'envisager de faire passer l'une d'elles avant moi. Jamais au point de bouleverser toute ma vie pour elle. Et puis, comme je l'ai dit, je les aimais bien. Azilis, elle, je l'aime tout court.

J'ai tout lâché pour elle. Ma vie à Paris, mes potes, tout. Juste pour pouvoir me rapprocher d'elle. Il s'avère que face à ma belle Azilis, je ne suis plus rien de tout ce que je pensais être. Je ne suis qu'une pauvre loque en mal d'affection qui essaie désespérément d'attirer son attention, de faire en sorte qu'elle m'aime. Peut-être pas au point où moi je l'aime, mais au moins un peu. Un tout petit peu. Juste assez pour qu'elle me laisse être à ses côtés et qu'elle cesse de me rejeter.

— Je n'ai qu'une parole Tiago. Si tu penses qu'il est préférable pour toi de rester près de moi, alors soit, qu'il en soit ainsi. Je ne me déroberais pas. Mais saches que tu souffriras de ma présence et de ton amour à sens unique, me prévient-elle.

— Je le sais, ne t'en fais pas. Je prends le risque.

Cette fois, mon visage est éclairé d'un véritable sourire. La joie, le bonheur, illuminent mon être tout entier. Je ne tiens plus en place, j'ai envie de bouger, de sauter, de danser et même de crier que je suis l'homme le plus heureux du monde en cet instant. Mes larmes ont disparu. Mes yeux doivent être toujours aussi brillants, mais cette fois ce ne sont pas les larmes qui les éclairent mais les paroles d'Azilis. Enfin... Enfin, elle m'accepte. Elle accepte que je l'aime. Enfin...