Mariage Avorté (II)

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Léonore

Il fait chaud, étouffant. Je sens que je transpire dans le dos, insupportable ! Je voudrais me lever, mettre la clime à fond, me déshabiller même ! Il fait beaucoup trop chaud pour un mois d'août. Quoique l'année dernière c'était pareil au fond.
Un message de Baldwin. Il arrive. Mon Dieu, allez il faut sortir de cette apathie ! Qu'est-ce qu'il va penser s'il me voit comme ça ? Allez debout, il a besoin de moi !
Je m'approche de la fenêtre. La cour est dorée d'une lumière orangée. Et remplie de gardes surtout. C'est la "golden hour"... On aurait du être en train de prendre des photos normalement. Pauvre Godeffroi, pauvre Aurélie. Pourquoi est ce qu'il a fallu que ça tombe aujourd'hui ?
Maintenant on est parqués dans le palais jusqu'à nouvel ordre. Je ne sais rien d'autre.
La porte s'ouvre en claquant rageusement.

- C'est pas ta chambre.

- Oh ça va ! Je me suis juste trompé !

Je me retourne.

- Mon Dieu Jean !

Il a envie de pleurer c'est évident. Est-ce que je l'ai déjà vu comme ça ?

- Qu'est ce qu'il y a ?

- Et quand est-ce que tu vas arrêter de parler aussi méchamment ? Qu'est-ce que je t'ai fait ? Je suis pas un terroriste moi, je suis ta soeur jumelle ! Bon sinon quelles nouvelles ?

- Y a une dizaine de blessés à priori. Et toi ? Tout va bien ? ajoute t'il.

- Oui Baldwin nous a emmenées très vite Maman et moi.

- Où est-ce qu'elle est maintenant ?

- Avec Aurélie et les garçons. Rassure moi personne de nous n'est blessé ?

Il a senti l'inquiétude dans ma voix et, s'abandonnant un peu, m'attire vers lui.

- Allons... Baldwin va bien c'est l'essentiel pour toi.

Je me serre dans des bras comme lui dans les miens. Quelques secondes seulement évidemment, même dans la douleur Jean reste Jean. Je sens que ses yeux frissonnent, qu'il voudrait pleurer. Mais à moi il ne racontera rien. Ou alors pas aujourd'hui.

Jean

- Allez, Baldwin m'a dit qu'il arrivait. Recoiffe toi un peu, ne pleure plus, montre lui comment est une princesse dans l'épreuve. Je sais que tu peux le faire.

Elle sourit bravement. Voilà revenue la sœur que j'aime.

- Ils peuvent bien dire ce qu'ils veulent, au fond on se ressemble Léo'. Bon je vais aux nouvelles. Courage...

Dans le couloir, en haut des escaliers, je croise Baldwin.

- T'as réussi à rentrer ? La sécurité t'a laissé passer ?

- C'est que je commence à être une célébrité dans le palais.

- Oh hé c'est devenu le fiancé de ma sœur et toute suite ça prend la grosse tête ! Des nouvelles des blessés ? Raoul et Chiara sont toujours à l'hôpital ?

- Oui ils n'ont rien. Le roi a dit qu'il appellerait Godeffroi.

Bon. La situation est sous contrôle.

- Et toi mon Jean ? T'as une sale tête là.

- Bald', Mattheus est mort. Le premier d'entre nous à mourir. Tu voudrais que je fasse quelle tête ? Il est mort et moi j'ai tué un homme tu te rends compte ?

J'ai presque crié. Non, je ne vais pas pleurer. Non le prince Jean ne pleure plus depuis qu'il a onze ans. Mais Mattheus quand même...
Baldwin me donne une accolade.

- Tu as vu ce qui s'est passé en fait ?

Il fait non de la tête.

- Il était près de Raoul, quand le terroriste s'est approché, il m'a fait un signe pour que je m'en occupe. Et lui tout de suite il s'est jeté devant mon frère et Chiara pour les protéger. Si j'avais désarmé ce type plus tôt, Mattheus serait peut-être pas mort...

Il ne dit rien. Il m'écoute.

- Allez, ma sœur t'attend. Vas...

Un message à Armel.

Ça va ?

Tout va bien pour moi. Tjrs à la cathédrale on gère la situation en attendant le prince Godeffroi.

Ok. Pas besoin que je vienne ?

Nope. Bald et toi vous êtes mieux au palais.

Dehors la cour, les grilles sont bardées de gardes. Ils se mettent au garde à vous devant moi. S'ils savaient comme je crève de chaud dans cet uniforme.
Sur mon téléphone je lance la chaîne nationale en direct :

Attentat à la cathédrale, le tueur était caché dans la foule. Au moment de l'échange des consentements, il a profité du recueillement de tous pour sortir une arme à feu et tirer. La densité de la foule a ralentit l'action des autorités et il a malheureusement eu le temps de blesser une dizaine de personnes et d'essayer de tuer Leurs Majestés avant que les princes Ladislaw et Jean le tuent en légitime défense. On murmure que le terroriste serait un réfugié cardamène mais pour le moment nous n'avons aucune information ratifiant cette hypothèse et... Mais on m'annonce que notre roi Raoul IV souhaite s'adresser à tous en direct...

Raoul et Chiara apparaissent à l'écran, en fond du grand hôpital Sainte Bernadette.

Très chers sujets, le jour de joie est devenu un jour de deuil. Quatre des dix blessés viennent de mourir dans nos bras, à peine une heure après l'attentat. Nous confions leurs âmes à vos prières : Marianne Alberti et sa petite fille Ornella ainsi que le fils du vicomte d'Orlando. Et enfin le chef de notre garde personnelle qui s'est courageusement sacrifié pour Nous. Mattheus Théodoros était un enfant du Royaume, et il a été jusqu'au plus grand sacrifice. Nous ne les oublierons pas, victimes d'une haine barbare ils sont retournés auprès du Père.

Auprès du Père. Comme Papa. Je sais ce qu'il faut faire, il faut appeler Maman. Au fond, on a encore besoin d'elle. On a toujours besoin d'elle.

Raoul

Mon Dieu, protégez nous. Gardez notre, votre Royaume.

Chiara

Mon Dieu... Quatre morts à cause de nous. Comment a t-on pu en arriver là ?

Où est ta victoire ? Où les histoires vivent. Découvrez maintenant