Transfiguration (III)

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Aldéric et Bruno

-Tu vas où ?

- Je sais pas trop. Je m'ennuie...

- Mais non, regarde ! Le dauphin de France est là, on pourrait aller lui parler !

- Pitié Bruno ! Il est beaucoup trop vieux !

- Il a vingt ans à tout casser, comme Jean.

- Tiens regarde plutôt Léonore. Elle a réussi à mettre le grappin sur son chanteur.

- Comme si des gens écoutaient encore ce genre de musique !

- Tu crois qu'ils veulent marier Godeffroi avec la princesse française ?

- Depuis quand tu fais de la diplomatie mon Ald' ?

- Non mais c'est vrai, cela renforcerait notre alliance avec la France ! C'est pas si bête que ça !

- Eh bien non... Ça n'est pas si bête. Tu es prêt à prendre ma succession dis moi !

La voix de Ladislaw s'est fraternellement amusé de nous.

-Te moque pas de nous !

- Je n'oserais pas Vénérable Bruno... Mais c'est vrai que Godeffroi a toujours bien aimé Aurélie non ?

Ladislaw nous regarde échanger un regard entendu.

-Ah ça...

- On les a vu s'embrasser un jour...

- De vrais commères du palais ces jumeaux dites moi !

- Tu te moques de nous Lad' !

- Mais non, mais non... Je suis très fier de vous les gars !

La reine mère

Je me souviens de notre sacre, il y a bien des années. Mes cheveux ont grisonné depuis jusqu'à devenir cette mer blanche que je roule chaque matin en un chignon compliqué. J'ai vieilli et toi, mon mari, tu m'attends déjà dans la tombe. Ainsi va le temps. Nos enfants qu'hier encore je berçais dans mes bras n'ont plus besoin de moi. Nos fils, dont les premiers pas me semblent à peine lointains, gouvernent à notre place. Notre Léonore, ta toute petite fille, rit et danse avec la grâce de sa jeunesse. Je sais qu'aucun ne t'a oublié, malgré les apparences. Tu leur avais appris à mépriser la mort pour garder en leurs âmes, plus fort que tout, l'espérance de la Vie qui nous réunira. Tu dois être fier de Raoul n'est-ce pas ? Depuis ce matin, il joue son rôle à merveille. Le voilà qui approche. Chiara le suit.

- Vous allez bien Maman ?

- Parfaitement mes enfants. Et vous ? Il semblerait que vous ne vous en sortiez pas trop mal...

- On fait de notre mieux pour être à la hauteur.

Chiara est toujours trop modeste ! Je prends maternellement sa main.

- Personne mieux que toi ne pouvais porter ces trois bagues ma fille. Raoul a beaucoup de chance.

Elle rougit et abaisse son regard sur ses doigts. Magnifique diamant de ses fiançailles. Mince alliance gravée de son mariage. Et le sceau des Reines, au chaton de lapis-lazuli. Je l'ai porté durant trente-sept ans, puisse t'elle le garder au moins aussi longtemps !

Charles XII se dirige vers nous. Lui, a perdu sa femme il y a quelques années de cela. Pourtant, il ne lui manque rien de sa stature et de son charme vieillissant. Je me souviens, lorsque je n'étais encore qu'une jeune princesse de Danemark, je rêvais souvent du beau Charles de Bourbon.
Mais c'était avant de te connaître, toi, mon époux bien-aimé...

Où est ta victoire ? Où les histoires vivent. Découvrez maintenant