Les gens heureux n'ont pas d'histoire (III)

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Mais Guy ne peut comprendre, pas cette fois.

Ils ont peut être tous un peu trop bu, ils sont saisis de regrets. Les fantômes étranges d'un passé qu'ils croyaient fermement avoir surmonté.

Les couloirs sont vides ou presque. Les galeries du Louvre, mi-musée, mi-palais, où se met à errer la silhouette de Philoména. Statues qui observent sans un geste ses larmes. Elle croise d'autres jeunes gens, des français éméchés qui se proposent pour la consoler d'un air entendu, mais rapidement découragés d'un geste de la tête.

Qu'importe sa belle robe et sa jolie coiffure, elle serre les dents. Pas de larmes, elle voudrait détester ce désir qui l'a saisie d'un coup.

Elle a vu ses lèvres, les recoins de son visage, ces yeux qu'elle connaissait si bien. Et d'un coup son corps s'est rappelé qu'elle l'avait aimé.

Son corps, pas son coeur.

- Philo ? Tout va bien ?

Le petit prince approche et d'abord abusé par le visage calme qu'elle s'est composé, retrouve le sourire. Mais sa voix tremble dès les premiers mots.

Alors il ne comprend pas, pas cette fois.

- Ne te moque pas de moi, je suis désolée, je t'inflige tous mes pleurs en ce moment...

- C'est rien, rassure t il d'un ton étrangement doux. Au fond, je sais que tu es forte.

- Tu crois ?

- Oui. Je le sais.

Il affirme tout. Elle va faire de même.

- Tu sais que tu as des yeux mille fois plus beaux que ceux d'Armel ?

Il y a la paix soudain retrouvée, la lumière étouffée dans le renfoncement d'un escalier, un frisson dans la fraîcheur que le fin tissu d'une robe de bal ne peut arrêter.

- S'il te plait, arrête de pleurer. J'ai l'impression que je n'arriverai jamais à te rendre heureuse...

Alors, cheveux qui doucement effleurent sa joue et parfum qui glisse près de lui, elle lui chuchote à l'oreille avec la gaieté grave que lui ont donné l'alcool et la danse.

- Mon Jean, tu es le seul qui puisse le faire...

A t il bien entendu ? Il croirait rêver !

- Tu es sûre ? Tu pleurais à cause d'Armel pourtant. Tu regrettes encore qu'il ne te rende plus heureuse.

- Espèce d'idiot, sourit elle simplement. En le voyant, je me suis souvenue ce que ça faisait d'être embrassée, d'être prise dans les bras de celui qu'on aime...

Et devant son air incrédule, elle ajoute avec douceur.

- Mais celui que j'aime et que je veux embrasser, c'est toi.

Nécessité soudain d'essayer. Elle se penche comme si elle allait l'embrasser, irrésolue et rougissante.

- Excuse moi, je n'aurais pas dû...

- Non. C'est moi qui aurait dû le faire depuis bien longtemps, achève t il d'un seul coup.

Brutalité de ce qui jaillit enfin, d'un premier baiser. Maladroit puis déjà familier. De coeurs qui se rejoignent, trop longtemps cherchés.

De la passion enfin retrouvée.
Ils se séparent soudain, baissent les yeux sans trop savoir pourquoi.
Incrédules mais secrètement heureux.


Bon voilà, pour les fans de Jean et Philoména, voilà un premier pas... Le prince se met à faire des semblants d'aveu !

Malheureusement pas le temps de s'attendrir ! Je vous partage tout le suite la fin du chapitre, et attention Cyr va faire des siennes...

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