Les soupçons de Suzanne Hertz

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— Mais enfin, Suzanne, c'est insensé ! La fille de Franz doit avoir plus de vingt ans aujourd'hui. Aelita Stones n'est qu'une adolescente.

Jean-Pierre Delmas était perplexe face à ce que Suzanne Hertz était en train de lui raconter.

— Aelita Hopper ! Pas Stones !

Le proviseur posa ses lunettes sur son bureau pour se frotter les yeux. Il sentait un mal de crâne commencer à le gagner.

— Suzanne, vous êtes une femme de sciences, vous devez être consciente que ce que vous avancez n'est pas plausible.

La femme en face de lui, qui était restée debout, posa ses deux mains sur le bureau.

— Jean-Pierre, je sais qu'évoquer Franz est difficile pour toi, surtout avec ce qui est arrivé à Émilie mais-

— Stop, Suzanne. L'affaire est close. Émilie est morte depuis longtemps.

— Ne dis pas ça.

— Les hommes que fuyait Franz n'était pas des gentils, Suzanne, et tu le sais. Lui aussi, tout comme sa fille, doit être six pieds sous terre.

La professeure de sciences de Kadic soupira. Si Aelita était vivante, il y avait une chance que Franz le soit aussi, non ?

— Je peux te prouver qu'Aelita est bien la fille de Franz.

Le proviseur remit ses lunettes sur son nez.

— Je t'écoute.

— Tu n'as qu'à appeler les parents de Odd Della Robbia. Elle est censée être sa cousine, non ? S'ils n'ont la connaissance d'aucune nièce orpheline canadienne, cela prouve que j'ai raison.

— C'est un peu léger comme preuve ça, Suzanne. Ce n'est pas parce qu'Aelita n'est peut-être pas la cousine de Odd qu'elle est la fille de Franz.

— Pourquoi ce mensonge alors ? Et pourquoi a-t-elle passé l'été à l'Ermitage ? J'ai déjà contacté l'ambassade canadienne et il n'y a aucune trace d'une quelconque Aelita Stones dans leurs registres.

— Suzanne, tu te rends compte de ce que tu dis ? Une adolescente ne peut pas se créer une identité comme ça !

— Tu oublies Jérémy Belpois.

Comment l'oublier ? Des élèves aussi brillants que lui, on en croise que quelques uns dans une vie. Le proviseur soupira.

— Donc, si je suis ta théorie, Aelita Stones est en réalité la fille de Franz Hopper, même si elle n'a pas vieillit en dix ans, et le petit prodige Jérémy Belpois l'a aidée à se constituer une nouvelle identité.

Suzanne grimaça. Dit comme ça, ça semblait en effet peu plausible.

— Oui...

— Tu regardes trop de films, Suzanne. Je peux imaginer que le jeune Belpois, doué comme il est, puisse pirater quelques serveurs municipaux, mais quel intérêt aurait-il là-dedans ?

— C'est ce que je compte découvrir !

— Mais il n'est même plus scolarisé ici !

— Aelita et ses autres amis le sont toujours !

— Odd Della Robbia et Ulrich Stern ? Allons, Suzanne, je sais bien qu'ils font des efforts depuis la rentrée mais ils sont loin d'être aussi doués que leur ancien camarade. Jérémy Belpois est littéralement surdoué !

Suzanne se massa les tempes. Elle se doutait que convaincre le proviseur ne serait pas chose facile, mais la jeune fille savait peut-être quelque chose concernant Émilie Delmas. Suzanne savait que Jean-Pierre ne l'avait pas oubliée.

— Et si Aelita savait quelque chose sur la disparition de ta femme ?

— Ne commence pas, Suzanne. Je n'ai aucune envie d'en parler. Aelita Stones est la cousine canadienne de Odd Della Robbia, et c'est très bien comme ça !

— Appelle les parents de notre cher Odd, dans ce cas. Si ils te confirment qu'Aelita est bien leur nièce, je lâcherai l'affaire.

Jean-Pierre Delmas sembla hésiter, mais il ne voulait pas remuer le passé, cela lui faisait trop mal. Il avait déjà eu du mal à expliquer à sa fille la vérité sur sa mère disparue, bien que ce ne soit qu'une vérité partielle.

En effet, s'il lui avait raconté que sa mère avait été enlevée par des hommes peu scrupuleux, il avait menti sur la raison de cet enlèvement. Il avait inventé une série d'enlèvements de femmes qui avait eu lieu à l'époque en région parisienne, insistant sur le fait qu'aucune d'entre elles n'avait été retrouvée.

— Sors de mon bureau, s'il te plaît, Suzanne. Et ne vient plus m'embêter avec tes théories dignes de romans de science fiction.

L'intéressée acquiesça, défaite. Elle s'y attendait, après tout.

— Comme tu voudras, Jean-Pierre.

Une fois qu'elle fut sortie, le proviseur ne pu s'empêcher de fixer le combiné du téléphone pendant de longues minutes. Il savait que Hopper avait été mêlé à des affaires confidentielles, mais manipuler le temps ? Il y avait de quoi douter. Il hésita, et si Suzanne avait raison ? Il lui suffisait d'un coup de fil pour vérifier.

L'Affaire Waldo Schaeffer [Code Lyoko]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant