Chapitre 21

787 58 1
                                    


3 décembre 2016

L'excitation est à son comble. J'avais si hâte de le voir sur scène. Pour une fois je ne suis pas cachée dans les coulisses ou assise à la régie à côté de Zoé. Cette fois si j'ai voulu profiter du concert comme n'importe lequel des autres spectateurs. C'est pourquoi je me retrouve dans la fosse accompagnée d'Irène, la petite sœur de Ken.

Il était hors de question que je manque son Zénith, je sais que c'était une date qu'il redoute particulièrement, il me l'a même confié alors que Ken ne parle jamais de ses peurs. Dès que je l'ai su, j'ai réservé un billet d'avion me souciant peu de la période. Les examens approchent et si je n'étais pas revenue en France j'aurai probablement passé mon week-end enfermée dans ma chambre à réviser. Et en plus de laisser tomber un week-end de révision, je rate deux jours de cours mais je me devais d'être là. Je manque déjà beaucoup trop d'évènements importants que pour rater celui-là.

Le rappeur ne sait pas du tout que je suis dans la salle, mon avion a atterri peu de temps avant le concert m'empêchant de le voir avant sa montée sur scène. J'ai donc directement filé rejoindre sa petite sœur. Avec le trafic je suis arrivé tout pile à l'heure, je me suis donc abstenue de faire un détour par les coulisses par peur de louper le début. Les gars sont déchaînés. Ils donnent tout ce qu'ils ont, tout ce qu'ils peuvent, le public est plus que réceptif et l'ambiance dans la fosse est incroyable. Qu'est-ce que je suis fière d'eux !
Soudain, les lumières s'éteignent. Le public se met à crier le nom de scène de Ken et un compte à rebours apparaît sur les écrans de la scène. Puis, une image se dessine et je compris... Ce con sort son nouvel album comme ça, sans aucune promo, sans rien. Je n'étais au courant d'absolument rien du tout pourtant j'aurai du m'en douter. Une conversation vieille de quelques mois me revient en tête, nous étions couchés sur mon lit avec Ken. On revenait d'une soirée de folie de chez Deen et Zoé, pourtant le grec était ailleurs.


- Il se passe quoi Ken ?, je lui avais demandé couchée sur le flanc, la tête appuyée dans la paume de ma main. T'es ailleurs là, ça fait dix minutes que je te parle et que t'écoutes rien. Alors je sais bien que je parle beaucoup mais...

- Je flippe Eli., il avait soufflé sans se tourner vers moi. Les retours sur le premier album sont dingues, il a un peu plus d'un an et il a explosé tous les objectifs que je m'étais fixé. On m'attend sur le suivant, je peux pas faire de connerie, il y a trop de choses en jeu.

- Arrête Ken. Tu réfléchis beaucoup trop. Justement le succès du premier peut être que bénéfique pour le suivant, t'as déjà toute une communauté derrière toi. T'as plus besoin de prouver que t'as du talent, ça c'est déjà fait donc profite juste. Sors ce que t'as envie de sortir, de la manière dont tu veux et quand tu le veux ! Mais arrête de te mettre la pression, c'est justement en faisant ça que tu vas foirer.


Il avait soupiré, avait enfoncé un peu plus sa tête dans l'oreiller pendant quelques secondes, laissant le silence planer entre nous. J'avais passé mes doigts dans ses cheveux jusqu'à ce qu'il tourne enfin la tête vers moi pour m'en dire un peu plus.

- Ça fait des semaines que je me creuse la tête pour trouver une idée, un concept nouveau qui fera que ce second album sera pas comme les autres mais je trouve rien. J'ai pas non plus envie de demander à quelqu'un d'autre, je veux que ça soit personnel, ce projet c'est le mien.

- Alors laisse le comme il est maintenant !, j'avais simplement répliqué. Je ne sais pas de quoi ça parle, d'où tu en est dedans et quelle direction tu as choisis mais je te connais toi et je sais que jamais tu fais les choses à moitié. Donc fait ton job, écris des bêtes de textes, fait jalouser les autres avec ton flow et pense à rien d'autre que le contenu. Une fois fini tu le sors.

- Comme ça ? Sans promo ?, il m'avait demandé, étonné.

- Bah oui, des fans tu en as, ils sont tous aux aguets du moindre indice pour savoir à quoi ressemblera ton prochain projet alors pas la peine de les prévenir., j'avais haussé les épaules. A la minute où ça sortira il se jetteront dessus, fais moi confiance.

- Je sais pas...c'est risqué quand même., il avait hésité. Et si l'info passait à la trappe parce que justement quelqu'un avait fait plus de bruit que moi ?, il s'était encore inquiété.

Ça avait été à mon tour de prendre un peu de temps pour réfléchir à cette idée. Puis, délaissant mes caresses dans ses cheveux pour m'approcher un peu plus de lui, je lui avais glissé une idée de plus.

- Alors fait en sorte de le sortir au bon moment, que personne ne s'y attende et que ça marque tout le monde., j'avais proposé et, devant son air circonspect, j'avais continué avec un sourire. Sérieux Ken, qui fait des études de communication ici ? Si je te dirais pas ça si j'étais pas un minimum sûre de moi.

- Je vais y réfléchir... Mais merci., m'avait il glissé à l'oreille avant d'embrasser mon front en glissant ses bras autour de moi.

Et il l'avait fait ce con, il m'avait écouté et fait confiance.

Sa voix qui résonne dans les enceintes me rappelle au moment présent. Il commence par remercier son public puis toutes son équipe qui avait su le soutenir et garder l'info secrète jusqu'au bout. Très vite il enchaîne sur un des ses sons de ce fameux album, et le public est plus que réactif. Je le sais, il va faire un carton. De toute manière c'est très rare que Ken se lance dans quelque chose si ce n'est pas pour arriver à atteindre les objectifs qu'il s'est fixé. Il est comme ça. Passionné et investi dans tout ce qu'il fait.

La fin du concert arrive très vite et on file avec Irène rejoindre les gars. Dans les coulisses, l'exitation était la même quand dans la salle de spectacle. Tout le monde hurle et se serre les uns contre les autres tellement cette soirée est incroyable. Au milieu de tout ça, Ken est quant à lui assez calme. Un immense sourire aux lèvres il observe ce qu'il l'entoure sans se rendre compte que moi, c'est lui que j'observe. Il rayonne, pourtant il ne sait pas que je suis là.
J'ai un petit pincement au cœur en voyant qu'il est heureux sans moi. Mais quand ses yeux croisent les miens, son sourire s'agrandit encore plus et me rassure un peu.

Parce que oui, j'ai encore une place assez importante dans sa vie pour que mon absence se fasse ressentir. Mais pour combien de temps ?

Combien de fois ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant