9 - MATHIEU

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Bip

— Bon, mon reuf, tu passes à gauche, ok ? Et surtout, tu contournes bien la rue, j'ai pas envie qu'on se fasse chopper. — indique Hugo à Mathieu, l'air grave.

Mathieu hoche la tête, silencieux. Hugo lui ébouriffe les cheveux, un sourire supérieur aux lèvres.

— Tu me diras si c'est de la bonne, hein ? C'est un nouveau fournisseur italien, j'sais pas trop quoi penser de lui pour l'instant.

Mathieu hoche de nouveau la tête, tape dans la main d'Hugo pour lui dire au revoir, puis part à gauche, suivant les instructions en contournant le quartier. Hugo, quant à lui, monte sur son scooter et s'éloigne par la droite.

Aucun des deux ne doit se faire prendre. Surtout pas Hugo, qui transporte la plus grande quantité de drogue. Après tout, c'est lui le dealer ; Mathieu n'est qu'un simple client.

Tout avait commencé quand Théo Bernet, un des mecs les plus populaires de terminale, avait conseillé à Mathieu de contacter Hugo Quertar, son dealer, s'il voulait de l'herbe pour fumer. Au début, Mathieu l'avait contacté uniquement pour ça. Mais au fil du temps, Hugo lui avait proposé de plus en plus de choses à des prix attractifs, et Mathieu s'était laissé tenter. À présent, grâce à Hugo, Mathieu était passé à la cocaïne.

Les lycéens de Sainte-Geneviève étaient une véritable mine d'or pour Hugo.

En chemin, Mathieu s'arrête dans des toilettes publiques de la ville, le genre de lieu délabré où traînent les sans-abris et les junkies. Il sort une ligne de coke, la sniffe rapidement, puis prend plusieurs gorgées de whisky de sa fiole, qu'il garde toujours dans sa poche et remplit tous les deux jours. Enfin, il ressent ce bien-être qu'il attendait depuis des heures.

Bip

@skskzz_lena a demandé à vous suivre.

Bip

@skskzz_lena est en train d'écrire...

Bip

@skskzz_lena vous a envoyé un message.
"Mathieu, j'ai dû recréer un dixième compte, pas pour que tu me bloques encore. Parle-moi, bon sang. Je ne comprends pas ce que je t'ai fait. C'est toi qui m'as larguée, je te rappelle... Ça fait 8 mois, Mathieu, 8 mois que j'attends que tu m'adresses à nouveau la parole. J'aimerais juste savoir si tu vas bien, et pourquoi tu réagis comme ça. Je sais que notre relation était vouée à l'échec, mais je suis encore amoureuse de toi, et ça me ronge. Léna."

Mathieu clique sur son profil, puis appuie sur « bloquer » sans la moindre hésitation. Léna l'a brisé ; elle n'a pas le droit de revenir vers lui comme si de rien n'était, quand bon lui semble.

Vous avez bloqué @skskzz_lena.

Il ne veut plus jamais entendre parler d'elle. S'il faut la bloquer des centaines de fois, il le fera. Elle peut bien l'aimer, ça ne change rien pour lui. Lui, il est passé à autre chose. Du moins, c'est ce qu'il se répète.

En entrant dans la cour du lycée, il rejoint William, Raphaël et Alexander, mais les trois garçons le dévisagent étrangement.

— Qu'est-ce que vous avez ? — demande Mathieu, l'agressivité dans la voix.

— Ça va, mec ? T'as pleuré ou quoi ? T'as les yeux super rouges. — demande William, l'air inquiet.

— Non, j'ai juste pas assez dormi. — grogne Mathieu, évitant leur regard.

— Mec, t'es défoncé ou quoi ? — renchérit Raphaël, fronçant les sourcils, suspicieux.

— Ouais, t'as fumé quoi, sérieux ? — ajoute Alexander, un sourire en coin.

— Rien ! Lâchez-moi, je vous dis que j'ai mal dormi, bordel. Vous allez me faire chier encore longtemps avec vos conneries ? Parce que là, vous me cassez les couilles avec vos suppositions de merde !

William lève les mains en signe de reddition, tandis que Raphaël et Alexander, trop choqués par la violence des propos de Mathieu, restent silencieux.

— Je vais en cours, désolé... — murmure Mathieu en les bousculant pour passer.

Les trois autres le regardent partir, toujours sous le choc. « C'est rien, il doit faire sa crise de bipolaire », « Il est timbré, on le sait tous », « Ce mec est cinglé. » Ce sont sûrement les mots qui circulent à son sujet, mais non, ce n'est pas juste une crise. Si seulement c'était aussi simple...

Mathieu soupire profondément en entrant dans les toilettes du lycée. Il a besoin d'une autre ligne pour se calmer. Léna hante encore ses pensées, et il aimerait bien jeter son téléphone pour qu'elle ne puisse plus jamais le contacter.

Il la déteste. Il déteste le monde entier. Il veut disparaître.

@mathieuharoy a changé sa biographie
« Détruit, je vais me détruire jusqu'à ne plus exister. »

les étoiles brillent Où les histoires vivent. Découvrez maintenant