Chapitre 33

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Eishun et Naël dansent serrés l'un contre l'autre, un grand sourire sur le visage. Soudainement, une fille les bouscule violemment et les sépare d'un geste rageur avant de passer entre eux sans aucune manière.

« Oh, ce n'est pas une boîte gay là ! s'exclame, d'une voix pâteuse et avec un regard dédaigneux.

Eishun s'énerve aussitôt et Naël le retient de justesse avant qu'il ne saute à la gorge de la jeune femme, Haneki arrive en renfort pour retenir son frère. La femme ne bouge pas d'un poil malgré les regards qui se tournent.

- Et après on dit que les préjugés sur les gays sont faux, regardez comme ils sont susceptibles ! renchérit-elle en levant exagérément les yeux au ciel.

Ses amis arrivent derrière elle et tentent de la tirer en arrière, paniqués.

- Désolée, elle a trop bu ! Ne vous occupez pas d'elle.

- Je le pense, je le pense ! s'enfonce-t-elle au grand dam de ses proches.

Naël laisse Eishun, qui ressemble à un chien enragé prêt à en découdre, à Haneki pour s'approcher doucement de la demoiselle, quoique fortement agacé.

- Nous ne sommes pas particulièrement susceptibles mais nous ne supportons pas les remarques déplacées de ce genre, c'est tout. Au lieu de venir insulter les gens dans un bar, tu devrais retourner étudier pour apprendre que tous les humains sont égaux peu importe ce qu'ils sont !

- Justement, mon éducation est assez bonne pour savoir qu'un homme doit aimer une femme.

- Je te souhaite bonne chance pour avancer dans la vie et t'intégrer dans la société d'aujourd'hui avec une pensée moyenâgeuse pareille. Regarde, tu fais même honte à tes amis en te comportant ainsi, à leur place, je t'aurais laissé là, seule et bourrée.

Ses amis ne répliquent rien et évitent soigneusement son regard lorsqu'elle cherche leur soutien. Elle pousse un long soupir.

- Je pense qu'il y a plus de personnes d'accord avec moi qu'avec vous ici, à moins que la montagne ne soit habitée que par des idiots sans cervelle, crache-t-elle.

Tout le bar est silencieux, si on omet les insultes d'Eishun, étouffées par la main d'Arianne. Le barman grimpe alors sur le comptoir, un shot à la main.

- Que ceux qui sont fiers d'être des idiots sans cervelles vivant à la montagne, lève leur verre ! hurle-t-il avec un grand sourire et un clin d'œil pour les garçons.

Aussitôt, la totalité du bar, lève son verre ou son bras en criant.

- Santé ! hurle de nouveau le barman.

- Santé ! crie tout le monde en chœur. »

Il descend de son perchoir et vient demander poliment aux amis de la jeune femme, rouge de colère mais la bouche fermée par la honte, s'ils peuvent l'emmener dehors et ne pas revenir pour ce soir, pour ne pas causer plus de problèmes que ce n'est déjà le cas. Ils opinent aussitôt et s'excusent auprès des garçons avant de la traîner dehors.

« Vous allez bien, les gars ? s'inquiète-t-il en s'approchant d'eux.

- Oui, merci. C'était vraiment cool de votre part.

Eishun confirme d'un hochement de tête, enfin calmé et Haneki le relâche complètement.

- Pas de problème, c'est normal ! Ne restez pas bloqué là-dessus, pour vous remonter le moral, je vous offre une tournée à vous et vos potes ! »

Bien que cette altercation leur soit restée en travers de la gorge, ils acceptent d'un sourire et reprennent la soirée. Naël s'inquiète de la quantité d'alcool qu'ingère son petit-ami, il tente à plusieurs fois de lui retirer son verre sans succès. Naël s'assume tel qu'il est depuis plusieurs années et ce genre d'idioties ne lui fait plus rien, il sait qui il est et qu'il ne fait rien de mal, il est fier d'être lui mais pour Eishun c'est tout nouveau, il a déjà eu beaucoup de mal à accepter le fait qu'il puisse aimer les hommes et se rendre compte à présent que tout le monde n'est pas ouvert, n'est pas d'accord avec leur amour, c'est plutôt dur à encaisser. Si aujourd'hui, on leur a dit ça, qu'est-ce qu'ils pourraient entendre demain ?

Lorsqu'ils prennent le chemin du retour, tard dans la nuit, le jeune homme tient à peine debout et les autres ont dû mal à le soutenir. Il ne cesse de marmonner des insultes non-fondées et Naël, lui aussi assez éméché, est épuisé rien qu'à l'idée de devoir s'occuper de lui. Ils passent la porte avec difficulté, Haneki est le seul qui marche droit et il ne peut pas gérer quatre personnes en même temps.

« Je m'occupe de Ei', tu peux gérer les filles ? gémit Naël, vacillant de plus belle sous le poids du garçon.

- Oui, oui, je me débrouille, réplique Haneki qui commence à s'agacer de cette situation. »

Ils enlèvent leurs chaussures et grimpent les escaliers dans un boucan énorme. Timéo, le petit-frère de Charline, passe une tête mal-réveillée dans l'embrasure de sa chambre et grimace en apercevant l'état de ses aînés, il s'empresse de retourner dans son antre, en espérant qu'ils vont être silencieux.

Haneki amène les deux filles dans leur chambre, les portant à moitié tandis qu'elles discutent en riant joyeusement. Il commence à s'énerver sans vraiment le vouloir, il aimerait que ses amis soient un peu plus responsables et apprennent à connaître leurs limites. Alors qu'il tente de les allonger sur le lit, elles continuent de chanter joyeusement sans l'aider ne serait-ce qu'un peu.

« Arrêtez maintenant ! s'agace définitivement le garçon, élevant le ton sur elles pour la première fois.

Elles se stoppent directement, ouvrant de grands yeux vers lui, soudainement désaoulées. Il ne leur accorde pas un regard et déplie la couverture d'un geste rageur.

- Han', je, commence Charline.

- Stop, couchez-vous maintenant, coupe-t-il sèchement ».

Il dépose la couverture sur elles et quitte la pièce sans regarder en arrière. Les jeunes filles échangent un regard consterné mais ont l'esprit trop flou pour courir après le jeune homme. Charline se promet de s'excuser auprès de lui.

Naël et Eishun se soutiennent l'un l'autre avant de s'écraser sur le matelas. Ils se débarrassent difficilement de leurs vêtements pour finir en caleçon, Eishun semble déjà à moitié dormir tandis que Naël ne cesse de bouger dans tous les sens.

« Arrête, dors, grogne son compagnon.

Mais celui-ci n'écoute pas et vient plutôt se coller au jeune homme. Il attrape le visage d'Eishun entre ses mains et le tourne brusquement vers lui.

- Aïe ! Qu'est-ce que tu fais ?

Sans dire un mot, Naël l'embrasse, pressant fortement ses lèvres contre les siennes et se collant de plus belle contre lui bien qu'ils soient presque nus. Eishun se laisse d'abord faire puis quand son petit-ami devient plus osé et tente de descendre sa main vers la seule partie couverte de son corps, il l'éloigne de lui.

- Ne fais pas ça, tu es bourré.

- Tu en avais envie la dernière fois.

- Mais pas ce soir, alors qu'on a bu, affirme le jeune homme, reprenant un peu de ses esprits.

Il se redresse et ignore le regard déçu de l'autre. Naël retente une fois et Eishun le repousse encore.

- Dis donc, tu n'es plus aussi innocent une fois que tu as bu, s'amuse-t-il ».

Il le serre plutôt contre lui, humant son odeur et met la couverture en place sur eux. L'alcool semble enfin avoir eu raison de Naël qui s'effondre de sommeil sur le torse d'Eishun, celui-ci l'admire quelques instants mais ne tarde pas à s'endormir aussi. 

Fierté de garçonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant