24. Douloureux souvenirs

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Ordinary love - U2
***

19 août 1916, dix heures et demi

Je suis restée sur la plage, seule. Je regardais les vagues se former et se casser sur le sable mouillé, assise un peu plus loin. J'écoutais le son de ces dernières et observais l'écume qui se formait. Ma seule volonté était d'avoir Thomas à mes côtés afin de pouvoir me blottir contre lui et profiter de sa présence. Mais là encore, c'était irréalisable. La mort nous sépare et nous séparera pour l'éternité. Cette satanée guerre nous a brisé à jamais. Un frisson me parcourt l'échine lorsque je quitte la baie, les pieds souillés de sable. Oui, car je suis allée me tremper les orteils dans l'eau, rien que pour lui, Thomas James Grennan.

Sur le chemin vers la maison des Grennan, j'ère dans les rues, les yeux fatigués et douloureux à force de pleurer. Bientôt, je n'aurais plus assez d'eau dans mon corps pour le faire et je serais impuissante face au chagrin qui me ronge petit à petit. Lorsque je parviens à rentrer, Monsieur Grennan n'est plus là. Peggy m'accueille, inquiète.

- Bon sang, j'ai cru que vous ne reviendrai pas... ! me dit-elle en posant une main sur son cœur.

J'esquisse un faible sourire, fuyant son regard bienveillant et triste.

- Je suis extrêmement fatiguée, je crois que je vais aller me reposer. Puis-je ?

Peggy pose une main sur mon épaule et la serre gentiment.

- Bien sûr ma chère. Allez-y, la porte de sa chambre est déverrouillée...

Je n'attends pas, me déchausse et monte les escaliers à toute vitesse, le cœur battant la chamade. Avant de pénétrer dans la chambre de Tom, je passe dans la salle de bains et me passe de l'eau sur les pieds afin de retirer le surplus de sable. Retournant ensuite devant la porte, j'hésite à poser mes doigts sur la poignée et la tourner. Est-il là ? M'attend-il sur le lit, un large sourire allant jusqu'aux oreilles et les lèvres attendant impatiemment de retrouver les miennes ?

Tout en prenant une bouffée d'oxygène, je tourne la poignée et pousse. Personne n'est là, pour mon plus grand désespoir. L'odeur de renfermé me prend et me donne la nausée. Ses parents n'ont rien touché depuis notre départ : les draps sont les mêmes et sont froissés, les quelques affaires pendues de Tom sont encore dans sa penderie et ses livres sur l'espace traînent sur les étagères pleines de poussière. Un tas de douloureux souvenirs me reviennent et la nostalgie me frappe de plein fouet. Dans cette chambre, nous avions fait notre première fois à dix-huit ans, un moment inoubliable. C'était en plein mois de mai et nous nous étions unis à jamais, corps et âme. Ses parents étaient partis au restaurant, nous n'étions que tous les deux. Je viens m'assoir sur le lit et pose mes mains contre les draps. Je me souviens alors de cette fameuse nuit comme s'il s'agissait d'hier...

Trois ans auparavant, 23 mai 1913, minuit et demi

- En es-tu sûre, Willow ? me demande Tom en me surplombant, l'air soucieux.

Son souffle chaud et saccadé caresse la peau de mon visage tandis que ses yeux cherchent les miens. Son minois se démarque dans l'obscurité malgré que les rayons de la lune inondent la pièce. Effleurant ses lèvres rosées du bout des doigts, je hoche la tête, confiante.

- Certaine.

Il me sourit, se penche vers moi et m'embrasse tendrement puis avec plus d'envie, de hâte. Il glisse ses doigts sous ma jupe et agrippe mes cuisses. Je le sens sourire contre moi, satisfait. Ses lèvres se baladent avec appétence dans ma nuque et me font frémir de plaisir. Je glisse mes doigts dans sa chevelure et me cambre, fermant les yeux.

- Oh Tom..., gémis-je lorsqu'il fait glisser ma jupe le long de mes jambes.

Une fois débarrassée de cette dernière, je me retrouve en culotte. Il ne reste plus que mon chemisier en dentelle. Ses doigts agiles le soulèvent alors que ses lèvres quittent ma nuque pour trouver mon ventre. Des baisers humides recouvrent ma peau et me font trembler de désir.

Nos Cœurs ContrairesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant