mission CONTACT - entrée n°14

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Journal de bord du DELS Espérance


Voilà une heure que l'Espérance aurait dû être joignable. Mais, malgré nos appels répétés, Héra ne répond pas. J'espère qu'il n'est rien arrivé au vaisseau et qu'il s'agit uniquement d'une erreur dans nos calculs de trajectoire. Nous avons pu traiter un peu d'eau et une autre navette est déjà revenue avec un nouveau chargement. C'est long et le rationnement est vraiment pénible pour tout le monde, mais au moins nous arrivons encore à nous débrouiller. A la condition toujours qu'il n'y ait pas d'autres mauvaises surprises concernant les membres de la mission.

Si je fais le compte, j'ai actuellement une quinzaine de personnes dans un état physique ou mental plus ou moins alarmant. Helen et son équipe médicale n'ont toujours pas trouvé la ou les causes de ces différentes pathologies. A première vue, rien ne les relie, mais il n'est pas exclu, selon les médecins, que cela puisse être lié. Deux personnes peuvent avoir des symptômes différents d'une même maladie. Mais là encore, rien ne semble indiquer une infection virale ou bactérienne. Du moins rien que nous ne soyons capable de détecter.


Il est pourtant clair qu'il se passe quelque chose. Fleming n'a toujours pas repris conscience, et les quatre techniciens sont toujours dans le même état, de même que toute l'équipe du docteur Kim. La seule amélioration notable concerne la jeune femme qui avait été diagnostiquée en choc émotionnel : Virginie O'Donnell, une irlandaise elle aussi.

Je me suis entretenue avec elle tout à l'heure pour faire son évaluation de sortie. Bien que cohérente dans ses propos, elle semblait toutefois un peu perdue. Elle m'a dit qu'elle se sentait bien et étrange en même temps. Elle m'a avoué ne pas comprendre ce qui lui était arrivé car cela ne lui ressemblait pas du tout.


Suite à cela, il m'est revenu quelque chose en mémoire. « Or la vérité des êtres n'est pas immuable et celui que l'on fut peut devenir un étranger. »

Avant notre départ de la Terre, j'avais entendu un scientifique dire cela lors d'une conférence sur la psyché humaine. A ce moment-là, je pensais savoir de quoi il parlait, car la vie peut amener des personnes à changer intrinsèquement leur croyance ou leur manière d'être. A présent, quand j'entends les propos de Virginie et que je prends du recul sur ce qui m'arrive, je me rends compte que la réalité est encore plus complexe que je ne l'imaginais.

Je ne sais pas à quel moment c'est arrivé, et j'ignore de quelle manière cela s'est produit. Mais le fait est là, et j'aurai beau me mentir à moi-même, il n'y a pas de marche arrière possible. J'ai changé, je le sens au plus profond de mon être. Quelque chose à l'intérieur de moi a évolué de manière subtile et lente. J'ignore qu'elle sera la finalité de tout cela. J'ignore même si c'est une bonne ou une mauvaise chose. Mais c'est une réalité : je deviens, peu à peu, étrangère à moi-même.

Suis-je la seule à ressentir cet état au sein du camp ? Je n'en sais rien. A dire vrai, je n'ose même pas en parler à Tim. Que pourrait-il bien me dire pour me rassurer ?


J'ai soif, cette restriction d'eau est vraiment infernale.

L'équipe des géologues recherche toujours un moyen d'extraire l'eau du sol, mais pour le moment le seul résultat obtenu est encore plus compliqué à mettre en place que celui déjà exploité. Je ne comprends pas comment cette planète fonctionne. Autant de flore, autant d'eau dans le sol ! Pourquoi ne pleut-il donc jamais ?


Dehors, le vent ne cesse de souffler. Depuis deux mois et demie maintenant que nous sommes sur place, c'est un bruit qui est devenu banal, familier. Les rafales sont parfois tellement violentes qu'elles arrachent même quelques bouts de lichen des arbres qui vont ensuite se déposer ailleurs. L'autre jour, l'un de nos botanistes a remarqué qu'une petite partie d'une des serres avait été envahie par le lichen à cause de ce processus. Il a fallu tout enlever.

Ce lichen, d'ailleurs, reste un mystère à résoudre. Il ne semble pas réagir lorsque nous le touchons ou le prélevons sur les arbres pour faire des analyses en laboratoire. Pourtant, sur les tumuli, il semble animé d'une certaine forme de conscience. Certains ont avancé l'hypothèse que le contact avec le métal qui compose toute l'infrastructure de la ville et des tumuli pourrait avoir un rapport avec cette différence de comportement du lichen. Comme s'il s'agissait d'une sorte de symbiose, ce qui évidemment est tout bonnement impossible puisque le métal n'est pas vivant.

Il n'y a pas eu d'autre signal radio détecté depuis la découverte de la cité. Et toujours aucun signe de l'entité.


Toutes ces questions sans réponses sont source d'insomnies fréquentes. Et cela n'aide pas vraiment à calmer mes maux de tête non plus. Je ne sais ce qui me cause actuellement le plus d'inquiétude : le mal de crâne ? Ou cette soif grandissante que j'ai depuis ce matin ?...

Mission CONTACT (en cours de réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant