mission CONTACT - entrée n°20

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Journal de bord du DELS Espérance


Je suis le lieutenant Timothé Crowfield, en charge de l'expédition qui devait retrouver la trace de l'Espérance, car Héra, l'I.A. de notre vaisseau, n'avait pas repris contact avec nous depuis deux semaines maintenant. Cat, le capitaine CatrionaByrne, m'avait demandé de tenir un journal de bord pour pouvoir alimenter nos archives de mission. N'ayant pas eu le loisir de le faire plus tôt, je vais tâcher de retranscrire dans ce rapport tout ce qui nous est arrivé depuis le départ du camp.


Nous étions six à partir.

Ewen était notre pilote, et il était épaulé par Ruth Gruber, une jeune autrichienne qui sortait tout juste de ses classes, en tant que première de sa promotion, lorsqu'elle a été recrutée pour embarquer sur l'Espérance. Du haut de ses vingt-deux ans, elle était la benjamine de notre petit groupe.

Il y avait également un linguiste, américain d'origine, du nom de Daniel Harper, reconnu comme étant une pointure dans son domaine lorsque nous étions encore sur Terre. Présent également, et doyen de notre groupe, Takeshi Kuroda, un technicien. Et enfin, Stéfanie Masbat, une pédologue française, dans la quarantaine environ.


Nous avions des vivres et du carburant pour tenir un peu plus de trois semaines, et de quoi traiter l'eau pour la rendre potable durant le voyage. La navette était assez grande pour faire dormir quatre personnes en même temps. Un roulement s'est donc très vite installé.


La première semaine, nous n'avons rien relevé d'anormal. Nous suivions, comme prévu, une trajectoire au sol similaire à celle qu'était censée avoir suivi Héra en orbite basse. Notre navette était en mesure de localiser le vaisseau jusqu'à une certaine distance seulement. Nous espérions que la chance serait avec nous dans cette entreprise, car nous n'avions pas d'autres solutions, et c'était littéralement comme chercher une aiguille dans une botte de foin.


Les jours défilaient, au rythme de nos quarts. Ewen, en bon vivant qu'il était, avait inventé un jeu pour tromper l'ennui. Il s'était engagé à partager sa dernière bouteille de whisky avec la première personne qui trouverait autre chose que du gris dans la flore d'Edae4. Cette planète était étrange, et manquait cruellement de couleur, ça oui ! Tous, nous nous étions habitués à évoluer dans cette grisaille permanente, et je doutais que quiconque trouve un jour une note de couleur sur cette planète.

Je me trompais.


Le huitième jour, j'étais de quart avec Ruth et Stéfanie lorsque cette dernière a lancé un cri de surprise. Elle nous a montré une sorte de montagne qui se découpait sur l'horizon. Or, à l'exception des tumuli, il n'y avait pas, selon nos relevés, de relief dans cette partie-ci de l'hémisphère. C'était étrange, et cela méritait que nous allions voir cela de plus près.


Moins de trente minutes plus tard, nous étions suffisamment proche pour pouvoir observer ce qui nous faisait face. Ce que nous avons découvert nous laissa bouche bée pendant un long moment.

En fait de montagne, il s'agissait plutôt d'une énorme colline pyramidale, entièrement lisse et grise. Elle semblait être faite dans le même matériau que les tumuli et la ville souterraine. Mais ce n'était pas cela qui était le plus surprenant. La hauteur de la colline n'était pas constante. Elle changeait en permanence. Tantôt diminuant, tantôt s'élevant, et tout cela sur un rythme régulier.


Excitée, Stéfanie voulait absolument aller observer ce phénomène, arguant du fait que nous n'en aurions peut-être plus jamais l'occasion ensuite. J'ai cédé et ai fait signe à Ruth de poser la navette au sol, non loin de la colline. Quelques minutes plus tard, nous étions sortis voir cela de plus près.

C'est à ce moment là que les choses ont commencé à mal tourner.


Nous étions tous au pied de la pyramide, si tant est que nous puissions l'appeler ainsi, et Stéfanie a voulu la toucher. Avant même que l'un de nous ait pu réagir, elle avait placé ses deux paumes à plat sur la surface lisse devant nous. La seconde d'après, nous volions dans les airs, repoussés par une formidable force invisible, comme des brindilles qu'un coup de vent aurait emportées.


La plupart d'entre nous n'eurent rien de plus que des bleus et des bosses. Takeshi s'était foulé une cheville. Mais Stéfanie, hurlant de douleur, avait été projetée contre un arbre dont l'une des branches, fine et pointue, lui a traversé l'abdomen.

Même sans être médecin, je savais qu'une telle blessure était fatale sans le support d'un bloc opératoire. Stéfanie a crié et pleuré durant les quelques très longues minutes qu'Ewen et moi avons mises pour arriver jusqu'à sa hauteur. Tant bien que mal, nous l'avons dégagée de l'arbre avec le plus de douceur possible, puis nous l'avons couchée sur le sol. Ruth, les larmes aux yeux, s'était empressée de lui faire une piqûre de la morphine qu'elle était allée récupérer en vitesse dans la navette.

Ce fut très rapide ensuite. Le visage de Stéfanie a semblé se détendre au fur et à mesure que la douleur s'estompait. Puis elle a fermé les yeux et cessé de respirer. Je fus soulagé de la voir se vider de son sang, enfin apaisée par la mort.

Au-dessus de nos têtes, l'une des branches de l'arbre arborait maintenant une horrible teinte cramoisie.


Ce qui s'est passé juste après nous a profondément choqué.

Le corps de Stéfanie a commencé à se recouvrir de lichen, comme si ce dernier migrait du tronc de l'arbre vers elle. En quelques secondes, nous l'avons vu disparaître dans une masse grisâtre et informe.

Derrière nous, la pyramide avait cessé de bouger. Le temps de regagner la navette, elle avait même commencé à se résorber. Lorsque nous nous sommes envolés, il n'y avait plus aucune trace du phénomène qui venait de coûter la vie à un membre de notre équipe.


Nous nous sommes remis en route. La bouteille qu'avait amenée Ewen a servi pour l'oraison funèbre de Stéfanie.



Il nous reste encore une semaine avant de rentrer au camp, et toujours aucun signe de l'Espérance. Notre retour me tarde, vaisseau retrouvé ou pas. Il faut que je relate à Cat ce que nous avons vu. Edae4 est vraiment étrange, et j'ai un mauvais pressentiment. 

Mission CONTACT (en cours de réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant