Chapitre 40 : S.O.S

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Lior, dans son lit, faisait tourner son téléphone dans une main, le numéro de celui qu'iel considérait comme le futur homme de sa vie depuis qu'iel avait fait un tour sur son profil Instagram -sans déconner, c'était pas permis d'être si sexy- dans son autre main. Iel finit par simplement l'enregistrer dans ses contacts et reposa son téléphone sur sa table de nuit.

Iel avait longtemps hésité à garder le numéro, et même à entièrement abandonner le pari qu'il avait fait avec Prune, mais iel avait fini par se persuader que le bel infirmier ne pourrait pas le reconnaître pour l'avoir vu une seule fois, quelques minutes dans un bar. Et puis il n'irait jamais jusqu'à comprendre qu'iel ne se sentait ni homme ni femme et passait certaines de ses soirées dans de jolies robes de mousseline.

Oui, iel en était persuadé. Du moins essayait de l'être.

Les journées racourciçaient, et il faisait déjà presque nuit. L'été lui manquait déjà. C'était sa saison préférée, les longues soirées dehors, à discuter sous les étoiles, une bouteille de bière à la main. Et cet été avait été sans conteste le meilleur de sa vie. Iel avait été ellui-même, entièrement. Iel s'était sentit libre, aimé.e -par les autres et par ellui-même- et heureux.se.

Iel alluma sa lampe de chevet avant de la recouvrir d'un foulard rouge pour tamiser l'ambiance. Iel n'aimait les lumières trop vives, elles avaient un effet négatif sur son moral et déséquilibraient ses chakras. Iel prit un livre sur sa table de nuit et se plongea dans la lecture, jusqu'à ce que sa mère l'appelle pour manger.

Iel descendit les escaliers. Mais à chaque marche son cœur se reserrait, et iel comprit qu'iel ne supportait plus de mentir à ses parents. Chaque souffle qu'iel prenait en face d'eux était comme un immense et incroyable mensonge. Et ils ne méritaient pas cela. La liberté que lui avait procuré l'été lui pesait désormais. Maintenant qu'iel y avait goûté, iel se languissait de sentir de nouveau le goût de celle-ci. Iel donnerait tout pour ne serait-ce que la frôler de nouveau du bout des lèvres. Mais une fois de plus, une vielle amie, la peur, lae rattrapa, l'entourant de ses doigts gelés et vint lae retirer en arrière, bien au fond du placard, trop petit qu'iel puisse y rester sans piétiner outrageusement son propre bonheur. C'était comme un pieu dans le cœur qu'iel ne pouvait ni retirer ni oublier.

Iel restait sur le seuil de la cuisine, n'osant quitter l'ombre du couloir, de peur d'entrer en pleine lumière et d'exposer ses odieux mensonges encore une fois.

« Alors, Lior, tu viens manger ? »

Iel se reprit et se força à faire un pas en avant, dans la lumière.

« Oui, oui j'arrive. »

Iel relégua toutes ses pensées au second plan et alla s'asseoir à table, entouré de ses secrets au moins une soirée de plus.

« Ton frère revient demain Lior, tu pourras passer à la boulangerie en revenant des cours, lui acheter un petit truc je te laisserais de l'argent ? »

Iel avala de travers.

« Mais il n'était pas censé revenir que pour Noël ? » S'enquit Lior, le regard fuyant.

« Si, mais il a économisé pour se payer un billet d'avion, et comme il est en congé pour toute une semaine, il a décider de venir la passer à la maison. » Sourit sa mère. « Ça fait un moment que je n'ai pas eut mes deux garçons à la maison. »

« Oh... »

« Quoi, ça ne te fait pas plaisir ? Pourtant tu ne l'as pas vu depuis au moins six mois. » Interrogea son père.

« Si. Si, ça me fait plaisir. C'est juste que c'est hyper soudain... J'étais pas... préparé. » Bredouilla-t-iel.

Sa mère rit sans qu'iel ne comprenne pourquoi.

« Lior, voyons, c'est ton frère, pas la reine d'Angleterre, tu n'as pas besoin d'être préparé à quoi que ce soit. »

C'était juste qu'iel n'avait pas besoin d'une personne de plus à qui iel devrait mentir. C'était déjà assez dur comme cela... Que son frère soit loin l'arrangeait bien.

Une fois le repas fini, iel remonta dans sa chambre, en démêlant ses écouteurs avant de s'allonger sur son lit, dans le noir, et iel lança la musique. Iel avait besoin d'un moment au calme, seul.e.

Quelques notes claires s'élevèrent et la chanson débuta. Toujours la même.

SOS d'un terrien en détresse. Interprétée Daniel Balavoine -c'était sa version préférée, l'originale-. Composée par Michel Berger, et écrite par Luc Plamondon, pour la comedie musicale Starmania.

Ouais, voilà ce que devait être sa vie, rien qu'une vaste comédie. Devant laquelle les forces de l'univers devaient bien rire.

Hilarant. Vraiment.

J'aimerais mieux être un oiseau,
J'suis mal dans ma peau.

Iel ferma les yeux plus fort, parce qu'iel ne voulait pas se laisser aller à son vague à l'âme, iel ne pouvait pas pleurer. Iel se l'interdisait, iel n'en avait pas le droit. Pas alors qu'iel était faible au point d'être terrorisé à l'idée de ne plus mentir à sa famille. Qui avait ce genre de craintes à part ellui ? Tout cela lui semblait si irréel.

J'ai comme des envies de métamorphose,
Je sens quelque chose qui m'attire,
Qui m'attire, qui m'attire ,
Vers le haut.

Terrorisé à l'idée de devenir qui iel était vraiment. Son cœur se serra. Et iel se laissa submerger. Iel n'avait plus aucune prise sur rien et iel coulait doucement, son désespoir l'engloutissant doucement, au rythme des accords majeurs de la chanson et de la mélodie qui lui perçait le cœur.

Pourquoi je vis, pourquoi je meurs,
Pourquoi je cris, pourquoi je pleure.

Iel se retourna dans son lit, entouré de pénombre. Et la chanson redémarra. Encore et encore. Alors iel se mit doucement à murmurer les paroles -iel les connaissait par cœur, de tout son corps-, la nuit pour seule témoin de ses larmes honteuses. Iel serra tout contre ellui son collier de Lapis-lazuli, cherchant le réconfort qu'apportait cette pierre. La fraîcheur du minéral entre ses mains lui fit du bien, ça lui permettait de rester un minimum ancré.e à la réalité. Et c'était sans doute aucun au moment où iel s'endormit, que le lendemain iel se réveillerait les yeux encore rouges et gonflés. Mais plus que cela, iel savait qu'iel aurait encore le cœur tout aussi lourd, menaçant de lâcher à chaque soupire, et iel devrait encore faire comme de rien. Tasha avait raison. Cette solitude lui pesait bien plus qu'iel n'était prêt.e a l'admettre.

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[EDIT (20/10/21) : Version révisée]
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J'ai mal au cœur à l'idée de faire pleurer bébé Lior 😭
Prochain chapitre : Mardi ♡

Les Derniers Pétales Des FleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant