Chapitre 72 : O B S E S S

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{Ceux qui ont lu CUPDUB (une majorité il me semble) vous comprendrez que ce chapitre est le tournant décisif de bien des histoires, parce que beaucoup, si ce n'est la totalité de mes personnages ont été impactés par ce qui découla de ce moment. Mais vous allez apprendre des éléments dont on avait pas connaissance dans CUPDUB, et vous verrez que la culpabilité qui semblait incomber à Dwight n'est en réalité pas totalement sienne... BREF, je vous laisse avec la chapitre }

Le lendemain, à l'heure que lui avait indiqué Aïssah, Dwight se trouva dans le petit parc, adossé contre l'écorce d'un vieux chêne, toujours à se demander s'il ne ferait pas mieux de rentrer tranquillement chez ses grands-parents. Le croassement d'un corbeau le fit sursauter. Le volatile était perché juste au dessus de lui, sur une branche, occupé à en arracher un gland. Puis il darda son regard de ténèbres sur Dwight. Le blond vit cela comme une mise en garde et prit au bout de quelques instants la décision de s'en aller. Espionner les autres afin de les piéger, ce n'était définitivement pas un acte de foi, et Dwight était sûr qu'à ce moment même, Dieu devait avoir honte de ses actions, il ne méritait pas même son amour. Alors il choisi de faire demi-tour, tant pis pour Aïssah ou sa tante, elles n'avaient qu'à pêcher en leur propre nom plutôt que de l'envoyer lui. Toute cette histoire était ridicule.

Pourtant, au moment même où il allait tourner les talons, il vit, sur le banc un peu plus loin, Élias poser ses lèvres sur celles d'Éos. Cela ne dura que quelques secondes, mais cela suffit pour qu'il soit pris d'un haut-le-cœur. Il n'était pas celui qui pêchait ici. Il se rappela alors que le corbeau pouvait être bon, comme quand il avait emporté le pain bénit de saint Benoît qui avait perfidement été empoisonné par un prêtre jaloux, s'il avait écouté sa mise en garde, il n'aurait pas assisté à cette scène. Voir ces deux garçons s'embrasser remua quelque chose en lui, et il catégorisa cela comme du dégoût, sans y réfléchir plus. Sa tante avait finalement raison, il devait éloigner ce garçon perdu, ce pêcheur, de son cousin si doux et si naïf.

Parce qu'il ne savait pas quoi faire d'autre, il sortit son téléphone pour prendre une photo, il lui fallait une preuve. Une preuve que cela était réel, pas juste un cauchemar sordide. À l'instant même où il appuya sur le déclencheur, Élias releva les yeux. Dwight sursauta et se cacha derrière le tronc de l'arbre, priant pour qu'il ne l'ait pas reconnu, et il prit ses jambes à son cou, les joues piquées de larmes. Pourquoi avait-il fallu que ce soit lui qui assiste à cela ? Qu'avait-il fait de mal pour que Dieu lui en veuille ainsi et le mette tant à l'épreuve ? Si seulement il y avait quelqu'un pour l'éclairer, l'aider à comprendre.

Il monta dans un bus -n'importe lequel, pour aller n'importe où- espérant que ses pensées elles, resteraient dans ce parc. Mais évidemment, elles vinrent avec lui, comme on se fait poursuivre par un essaim d'abeilles après avoir dérangé la reine. Et pour ne rien arranger, il y avait cette photo, comme preuve que la véracité de ce qu'il avait vu, il n'avait pas rêvé -cauchemardé aurait été plus exact-. Il ne savait même pas pourquoi il avait prit ce cliché. Il avait le cœur au bord des lèvres, les joues trempées et les cheveux en désordre à force de trop tirer dessus. Sa respiration s'emballait, alors il la retenait, en apnée volontaire, comme si le manque d'oxygène pouvait faire repartir son cerveau, effaçant les derniers instants qu'ils venait de vivre, les supprimant de sa mémoire. Écrasés.

Conscient des regards concernés que les autres voyageurs portaient sur lui, il descendit du bus. Il ne supportait pas leur yeux qui lui brûlaient la peau, comme s'ils pouvaient voir au travers de lui ce qu'il avait vu. Ça le rendait inconfortable, il se sentait sale.

Il marcha dans les rues tristes sans savoir où il était, perdu dans ses pensées autant qu'il l'était dans cette ville. Puis il se laissa tomber sur les marches d'une église, se sentant trop souillé encore pour entrer dans la maison de Dieu mais ayant désespérément besoin de se sentir proche du père céleste. Il resta un moment encore, sans bouger, jusqu'à ce que l'éclairage publique se mette en route. Il ne faisait pas encore nuit, pourtant Dwight avait cette impression d'être incapable d'y voir clair. Son téléphone vibra sur une notification inutile. En le déverrouillant, il retomba sur cette photo, qu'il n'osait regarder, mais de laquelle il était paradoxalement incapable de détourner entièrement les yeux. Alors, parce que c'était la seule solution qui lui paraissait envisageable, parce qu'elle était la seule personne qu'il connaissait dans cette ville hormis son cousin et ses prétendus amis, il appela Aïssah. Il savait même pas ce qui le poussait à se mettre dans des états pareils, juste qu'il était au bord de la crise de panique et qu'il avait besoin de quelqu'un pour l'épauler.

Les Derniers Pétales Des FleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant