Avant même d'entrer dans le lycée, Nuccya alla trouver Élias, et, sans lui laisser le temps de dire le moindre mot, elle le gifla. Comme elle n'avait jamais giflé personne. Elle pouvait voir l'empreinte rouge de sa main sur la joue claire du blond, et ça ne lui fit pas le moindre bien. Elle lutta pour garder une posture droite, royale tout le long de sa tirade quand elle lui avoua que tout était fini entre eux et qu'il n'était qu'un connard. Elle ne devait pas flancher, pas pleurer pour un garçon comme lui, il n'en valait pas la peine, et puis trop de monde les regardait, comme des vautours, rameutés par le bruit claquant de la gifle -ou bien était-ce par le bruit de son cœur qui se brisait qu'elle n'avait su couvrir ?-. Elle ne s'embêta pas à lui expliquer pourquoi elle le quittait, après tout, il devait déjà le savoir, mieux que quiconque, et elle passa la grille du lycée, le laissant, lui et son regard perdu à la porte.
Élias la regarda partir sans dire un mot. Se faire larguer n'aurait pas dû le soulager, pourtant ce fut le cas. Pendant un bref instant. Mais son esprit fut bien trop rapidement assailli de questions, qu'allait-il dire à son père pour la soirée à laquelle il voulait qu'il l'a convie ? Était-ce à cause de ce baiser avec Éos ? Comment avait-elle su ? A qui l'avait-elle dit ? Il ne voulait pas que cela porte préjudice à qui que ce soit d'autre, il ne voulait pas rentraîner Éos et il ne savait combien d'autres à la chaîne dans la spirale de ses problèmes... Il se demandait aussi si elle accepterait de lui reparler un jour. Parce qu'avant qu'il foute tout en l'air, ils avaient été amis. Et cela lui manquait, il avait trop besoin d'une amie. Perdu, il fit le seul truc qu'il savait faire, il alla trouver Alix.
En réalité, ce fut le bleu, qui le trouva en premier, se précipitant pour le prendre dans ses bras. Alix était déjà au courant de la nouvelle, il était toujours au courant de tout, des derniers potins. En arrivant devant Élias, Alix comprit à quel point il allait mal, c'était écrit partout sur son visage. Toute sa colère de la veille disparut en un instant. Il aurait voulu avoir une discussion avec Élias, une vraie, pour mettre les choses au clair, mais visiblement, ce n'était une fois de plus pas le bon moment.
« Tout va bien, je suis là. » Souffla Alix sous l'œil ahurit d'Éos qui devait se demander, sans oser le formuler, ce qui se passait.
Élias explicita :
« J'ai rompu. Enfin non, Nuccya a rompu, même ça j'ai pas su le faire. Je sais pas comment, mais elle a dû apprendre que je t'ai embrassé Éos. Je sais même pas pourquoi j'ai fait ça... »
Éos baissa le regard. Quelque part, il se sentait coupable pour quelque chose qu'il n'avait pas voulu. Et pire encore, il devait se retenir d'ajouter au malheur du blond par de viles reproches. Parce qu'il ne pouvait s'empêcher de le tenir pour responsable du fait qu'Andrea ne veuille plus lui adresser la parole. Il s'éloigna, comme pour leur laisser un peu d'intimité, mais surtout pour se retenir d'incendier le blond avec son tact légendaire. Alix susurrait des mots réconfortants à l'oreille du blond.
« Comment elle a pu savoir aussi vite... » Se lamenta Élias, toujours au bord des larmes.
« Je te jure que j'ai rien dit à personne. » S'empressa de dire Alix.
Il avait peur qu'Élias le croit responsable, après tout il aurait eut toutes les raisons du monde d'être allé dire à Nuccya qu'Élias avait embrassé Éos. Premièrement, ça les ferait rompre, et deuxièmement ce serait comme une petite vengeance contre le blond, parce que Alix avait été blessé par ce baiser. Mais il avait bien vu dans quel état était Élias à ce moment, il était complètement stone, il n'était pas vraiment conscient de ce qu'il faisait. Il était juste triste perdu et défoncé et il avait embrassé le premier garçon venu, parce qu'il voulait se prouver que les seules lèvres capables de soulever son cœur comme prit dans une tempête de sensations étaient celles non pas de Nuccya, ni d'un garçon de passage, mais celles d'Alix. Quelque part, ce ne serait peut-être jamais advenus s'ils n'avaient pas couché ensemble.
Alix sentait que le blond était à deux doigts de s'écrouler, les regards qui pesaient sur lui n'arrangeaient rien. Le bleu se demandait ce qu'ils savaient. Savaient ils simplement que Nuccya l'avait largué avec éclat ou étaient-ils au courant de plus ? Ces questions ne le lâchaient pas. En revanche, Alix était certain d'une chose, c'était qu'Élias ne réussirait pas à garder la face toute la journée sous le poids des regards. Il était bien trop affaiblit psychologiquement et le bleu soupçonnait son père de ne pas être étranger à cela. Aussi, quand il vit le blond fondre en larmes après qu'Aïssah soit venu le voir pour lui dire à quel point il s'était comporté en connard et qu'il ferait mieux de ne plus s'approcher de Nuccya, Alix ne lui laissa pas le choix, il ramassa son sac et le traîna hors du lycée. Ils prirent le bus en silence, Alix savait bien qu'Élias se contenait pour pas fondre une nouvelle fois en larmes, comme si ces larmes étaient taboues. Les garçons se cachent pour pleurer, comme disait la chanson.
Une fois chez lui, Alix laissa Élias s'affaler sur le canapé, et même si c'était l'un des pires clichés, il alla chercher un pot de glace dans le congélateur. Il n'avait pas vraiment d'autre idée pour apaiser la peine de cœur du garçon qu'il aimait. C'était pour lui trop difficile de se dire qu'une fille l'avait mis dans cet état, qu'Élias pleurait de l'avoir perdue. Cela remettrait bien trop de choses en cause.
Manger leur permettrait de ne pas parler, ça lui éviterait d'être trop impulsif et de dire des choses qu'il regretterait plus tard. Il savait qu'il agissait parfois de manière un peu trop égocentrique, ayant l'habitude de tirer la couverture à lui, même quand c'était les autres qui avaient des problèmes. Il travaillait beaucoup sur cela, parce qu'il savait que ça venait en partie de l'abandon de sa mère, il en avait gardé ce besoin de reconnaissance, comme un chien qui cherche les caresses pour se prouver à lui-même qu'il était aimé. Alix avec ce besoin de se sentir désiré, indispensable. C'était aussi pour ses raisons qu'il couchait un peu à droite à gauche, parce que ne choisir qu'une seule personne était lui donner le pouvoir de nous abandonner, de nous détruire. Mais depuis Élias, il ne pouvait plus penser à personne d'autre. Tous les cheveux blonds lui rappelaient les siens. A cause de la couleur des blés. Si l'être humain savait apprivoiser ses semblables, c'était ce qui leur était arrivé à tous les deux. Et il leur était désormais trop difficile de se quitter, impossible de faire machine arrière. Apprivoiser quelqu'un, c'est aussi en prendre la responsabilité. Et Alix ne le comprenait que maintenant, alors qu'il était incapable de laisser Élias s'en aller, incapable de le perdre. Parce qu'il savait que ce serait comme de se perdre lui-même. Il avait l'impression de vivre en vase clos, tiraillé entre le père tyrannique du blond, le lycée, les mensonges et les secrets. Il avait besoin, tout comme Élias de prendre du recul pour réfléchir, de prendre de la hauteur quant aux derniers événements. Sans cela, ils seraient capables l'un comme l'autre de faire une bêtise.
Le bleu se redressa un peu sur le canapé et écarta le pot de glace qu'ils avaient terminé depuis un moment déjà. Une main perdue dans les mèches blondes d'Élias, il dit :
« On part. Ce soir. Tu te rappelles ce que tu m'avais dit l'autre soir ? Que tu voulais te casser loin et ne jamais revenir ? Et bien c'est le moment. On a qu'à aller n'importe où, à la plage, tant que c'est loin de ton père. Loin des problèmes. Si on roule toute la nuit, demain on est à la mer. »
Élias releva la tête, les joues encore trempées. Ça commençait à devenir une vision familière pour Alix et il détestait cela.
« Alix, quand j'ai parlé de partir, j'étais bourré. Mais tu vois bien que c'est pas réaliste. On ne peut pas se battre contre le destin. »
Dans un accès de colère, Alix lui lança un regard noir. C'était comme si Élias venait de le trahir, comme si tous les mots qu'il avait pu dire ce soir là n'avaient été que des mensonges. Le baiser échangé sur le sol d'une chambre inconnue en tête de liste. Il prit un instant pour se contenir. Ce n'était pas le moment le mieux choisi pour s'énerver. A vrai dire, c'était plutôt le pire. Et le fait de réussir à aller contre son instinct qui lui soufflait de repousser Élias lui fit comprendre à quel point toute cette histoire le faisait évoluer en tant que personne. Avant tout cela, il n'aurait jamais supporté de se voir rembarré de la sorte, il l'aurait prit comme un rejet. Il s'adoucît et dit :
« Je ne veux pas forcément que l'on parte pour ne plus revenir. Je veux juste qu'on passe un week-end loin de tout. Le grand-père de Prune a légué à sa famille une vieille maison au bord de la mer. On est carrément hors saison mais je pense que changer d'air nous ferait le plus grand bien. On peut partir vendredi soir et être de retour d'avant lundi matin, d'accord ? C'est à moins de deux heures en train. »
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[EDIT (17/02/2022) : Version révisée]
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Les Derniers Pétales Des Fleurs
Teen FictionAlix sourit. Toujours. Alix est heureux. Toujours. Parce qu'Alix il s'en fout, toujours aussi, de tout. Il a les cheveux bleus, il rigole trop fort et finit toujours dans les bras d'inconnus les lendemains de soirée. Alors oui, il n'est pas comme t...