Chapitre 55 : A S T R O

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Lior entra dans la petite infirmerie, passant la porte vitrée, sur laquelle un autocollant au nom de Dr B.Dawilt était collé, le regard baissé sur ses paumes tachés de quelques goutes de sang qui commençait déjà à coaguler.

« Bonjour, qu'est-ce que je peux... » Le docteur en question releva la tête du dossier qu'il était en train de lire et ouvrit la bouche surprit, puis se leva précipitamment. « Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ? Assieds-toi je vais chercher du désinfectant et des compresses. »

Lior hocha la tête en silence, et s'assit sur une des deux chaises devant le bureau. Iel était un peu angoisé.e de se retrouver seul.e dans la même pièce que l'objet de tous ses désirs.

« Alors, comment tu t'es mis dans cet état ? »

« Je suis tombé. En fait j'ai trébuché dans la cour. Ça paraît un peu bête dit comme ça. »

Lior promena son regard sur la pièce et remarqua un disque vinyle posé au coin du bureau. Il l'attrapa du bout des doigts et lu l'intitulé. Sound of Silence, Simon et Garfunkel.

« Le fameux vinyle. » Murmura-t-iel sans s'en rendre compte.

« Quoi ? »

« Oh rien. Je regardais juste. C'est une jolie chanson. »

Mais quelle gourde !

L'infirmier lui sourit en déballant une compresse stérile, s'appuyant contre son bureau, juste devant Lior.

« Je l'aime bien aussi. Elle a un petit quelque chose de profondément apaisant. Comme si une vérité sincère était inscrite juste là, entre ses lignes. »

Lior se contenta de hocher la tête, trop apeuré.e à l'idée de faire une nouvelle bêtise qui pourrait mettre à découvert ses cachoteries.

« Tu relèves un peu la tête vers moi s'il te plaît ? »

L'adolescent.e obtempéra et l'infirmier commença par essuyer le sang sous son nez. Il s'était arrêté de saigner de lui même, mais il lui mit tout de même un morceau de coton dans la narine, sachant parfaitement que les hémorragies nasales avaient tendance à se redéclencher.

Lior se sentait faible. Le visage concentré de M.Dawilt était bien trop proche du sien, et iel ne pouvait empêcher ses pensées et son regard de s'égarer, sur ses lèvres ou au fond de ses yeux.

« Donne-moi ta main. »

Une fois de plus, Lior obtempéra. L'atmosphère qui régnait dans la pièce était à la fois calme -presque intime- et suffocante.

« Ça risque de piquer un peu. » Avertit-il en posant le coton imbibé antiseptique sur la plaie.

Lior retînt une grimace, ce qui fit sourire l'homme en face de lui. Trouvant le silence trop pesant, iel demanda soudain, sans réfléchir :

« Pourquoi vous avez choisi de devenir infirmier scolaire ? »

Il eut un petit sourire, comme s'il repensait à toutes les raisons qui l'avaient poussé à ce choix.

« Tu sais, tu peux me tutoyer. »

Il attrapa sa seconde main pour désinfecter sa paume et continua :

« J'ai pas toujours voulu faire ça. Petit je voulais être artiste. Je voulais chanter, et composer. Mais j'avais pas les moyens, ni l'endurance pour poursuivre mes rêves. Mes parents sont venus de Palestine, ils ont eut beaucoup de mal à construire une vie ici, en France, et je ne pouvais pas réduire tous leurs efforts à néant pour poursuivre des chimères. Alors j'ai suivit ce que mes professeurs me disaient, ils étaient persuadés que j'avais le potentiel pour faire médecine, c'est ce que j'ai fait, et ma mère a été si fière que pas une fois je me suis dit que je faisais le mauvais choix. J'ai même fini par aimer cela, vraiment. Le fait d'être utile aux gens, c'est un peu ironique à dire, mais c'est réellement devenu une vocation. Et j'ai toujours eut plus d'attrait pour les jeunes. »

Les Derniers Pétales Des FleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant