XXV- Fatale rencontre

140 19 2
                                    

Aline


Fenris se redresse doucement, d'un calme olympien en apparence, bien que je perçoive la tension qui l'habite et la tempête d'émotions qui le submerge. Je sens le conflit en lui, annonciateur d'un combat à venir.

Il me fait discrètement signe de ne pas bouger, de rester silencieuse, tandis qu'il s'apprête à faire face à Lilith, première femme de la Création, reine et créatrice des Enfers, sa propre mère. Cette femme qui, de par sa simple présence, m'arrache des tremblements incontrôlés et fait hurler mon âme de terreur.

- Mère, quelle plaisante surprise que de vous trouver en ces lieux, lâche le démon d'une voix doucereuse et suintante de sarcasme semblant faire vibrer la violence inouïe qui se dessine doucement et se love sinueusement dans les cœurs de chacun. Cette journée sent le sang.

- Mon fils, il me semblait bien avoir ressenti la présence d'un traître sur mes terres... répond la voix chantante de la reine démoniaque.

Fenris garde le silence, mais le regard plus noir que la nuit qu'il lance à sa mère aurait foudroyé sur place n'importe quelle créature vivante. Mais pas Lilith. Au contraire, cette situation semble l'amuser au plus haut point tandis qu'elle continu.

- Mais je vois que tu n'es pas totalement inutile. Tu m'as apporté, je le vois, un présent inestimable... Tu dois être Aline, je suppose, dit-elle en plantant son regard de braise dans le mien.

Je trésaille et déglutis avec peine, incapable d'articuler ne serait-ce qu'un minuscule "oui". Fenris vole à ma rescousse en répondant à ma place d'une voix glaçante à faire trembler un mort.

- Laisse-la en paix, mère. Pour le moment, elle est bien loin d'être ta priorité.

Elle jette à son unique fils un regard empli de dédain, comme si elle se voyait obligée de prendre en compte la présence agaçante d'un chiot bâtard dénué d'intelligence.

- Et qui pourrait donc me détourner de ma proie ? Toi ? Un demi-chien incapable d'obéir et de faire la chose la plus simple au monde et la seule et unique raison pour laquelle il a été conçu : se soumettre ?

Son air supérieur et l'aura de puissance qui l'entoure soudain aurait rendu muet de terreur le plus fier, le plus courageux et le plus sanguinaire des guerriers doués de raison. Mais pas Fenris. Car cela faisait déjà bien longtemps que l'Ange de la Mort avait perdu l'esprit et s'était convaincu qu'il n'avait plus rien à perdre. C'est donc sans même tenter d'user de son charme ou de sa maîtrise de la langue de bois que le prince démoniaque se jette sur sa mère, toutes dagues dehors.

Aussi vif qu'un colibri, aussi mortel qu'un faucon, plus déterminé qu'un aigle, Fenris se lance à l'assaut, se mouvant si rapidement que mon regard peine à le suivre. Pourtant, aucun coup ne semble toucher sa cible, comme si son adversaire était fait d'air et, de ce fait, totalement invulnérable.

Lilth... Comment la décrire ? Comment décrire cette beauté sombre, froide malgré ses yeux de braise et ses cheveux de jais tombant en cascade de feu sombre sur ses épaules aussi pâles qu'un clair de lune. Ses mouvements, d'une grâce surnaturelle, semblent fait pour séduire à chaque instant, même maintenant alors que son propre fils tente de l'éventrer. Une séduction dangereuse, mortelle, comme la danse sinueuse, hypnotique et fatale d'un mamba noir.

Elle évite les coups avec une facilité déconcertante qui aurait put être comique en d'autres circonstances. Elle ondule son corps avec une telle aisance que les coups habituellement terribles de précision de Fenris semblent n'être que les premiers pas hésitants d'un chiot aveugle.

Si Fenris parait anormalement lent et malhabile, Lilith, elle, reste d'une adresse et d'une férocité remarquable. Chaque attaque portée touche sa cible et arrache une plainte sourde au prince démoniaque, brisant une côte, explosant une pommette, faisant couler en abondance le précieux sang de son unique héritier.

Ex Nihilo -2- Si vis pacem, para bellumOù les histoires vivent. Découvrez maintenant